Nous ne disposons malheureusement d'aucune information concernant le jeu de cette vielle qui servait à faire danser dans les fêtes villageoises, avant et pendant la période baroque 2 . L'instrument était probablement moins répandu dans ce milieu qu'on ne le croit généralement, mais il était pourtant présent, ce dont l'iconographie témoigne.
Nous en sommes donc réduit à supposer que les problèmes rencontrés et les solutions apportées par la vielle paysanne, à l'époque baroque mais en milieu populaire, doivent être proches de ceux que rencontre ultérieurement, au XIXe et au XXe siècle, la vielle en milieu rural. Nous resterons donc et prudent et rapide dans l'exposé.
Nous nous bornerons à évoquer cinq points :
1) Comme celle du gueux, la vielle paysanne est fabriquée en bois épais trouvé localement par un luthier amateur.
2) Comme celle du gueux, elle doit être extrêmement sonore, mais pas pour les mêmes raisons. Il s'agit seulement d'être clairement entendu des danseurs.
3) Mais l'oreille du danseur est très sélective : on doit lui faire entendre ce qui l'aide à danser, un rythme correspondant aux pas. Un grésillement ou un tapement continu en provenance du chevalet mobile ne lui serait d'aucune utilité. On n'utilisera pas non plus le chevalet mobile comme articulation. La priorité est ailleurs. Nous supposerons que, pour faire danser, le vielleux, comme dans la tradition populaire qui s'est maintenue jusqu'à nous, aura tendance à utiliser l'ensemble trompette/coup de poignet comme une percussion marquant les pas des danseurs et donnée sèchement sur les notes.
4) La mélodie devait mal s'entendre, puisque couverte par la percussion ; c'est l'intervention d'autres instruments comme le violon qui devait permettre qu'elle devienne audible.
5) Comme celle du gueux, la vielle paysanne est donc un instrument composite. Elle juxtapose une percussion (qui est un instrument à haut son), un instrument mélodique (qui est un instrument à bas son) et des sons continus (les bourdons) dont la puissance doit aussi être un facteur susceptible de rendre peu audible l'exécution de la mélodie.
On se reportera au chapitre 14, section 14.2. : L’instrument paysan.