Il est hors de question qu'un aristocrate jouant de la vielle puisse s'identifier ou être identifié à l'anti-modèle du gueux vivant de rapines et de rixes. La vielle devra donc être décontaminée, débarrassée de ce qui la «pollue» et l'assimile au misérable.
Les musiciens de profession qui vivent de la vielle à roue sont eux-mêmes pris dans cet enjeu 1 . Conformément à leur idéal, il leur faudrait faire oublier qu'ils proviennent de la ménestrandise, et démontrer qu'ils sont gens de qualité. Il s'agit alors d'une urgence sociale : la ménestrandise a, sous Louis XV, perdu son lustre et son pouvoir, et cette déchéance se traduit, entre autres conséquences, par une assimilation satirique du ménétrier au vielleux. Le musicien vielleux aura à détruire cette image inacceptable de la vielle.
Pour détruire les connotations symboliques et sociales attachées à la vielle, il faudra la débarrasser des trois caractéristiques du jeu misérable :
1- La vielle donne à entendre un « charivari », mélange de bruits et de sons, avec une mélodie peu audible.
2- Un grésillement perpétuel, parfois accentué sous forme d’à coups, accompagne, sans relâche, le développement du chant.
3- L’instrument ne joue que de façon lancinante, fade et ennuyeuse.
Voir chapitre 8 : Les musiciens de profession.