22.8. Goût français, goût italien.

Certaines pièces du répertoire pour vielle seront désignées par leurs auteurs comme étant de goût français et d’autres le seront comme étant de goût italien 1 . Par « désignation », il faut seulement entendre que l’auteur fait allégeance à un des deux goûts concurrents, indiquant ainsi quelle est l’appartenance qu’il souhaite pour son oeuvre, même si, de l’intérieur de la pièce, la composition musicale ou le style est loin d’être toujours fidèle à sa désignation officielle. On voit alors que 65% du répertoire revendique le goût français ; les appellations utilisées sont alors suite de danses, concert, duo galant, concert champêtre, pastorale, gentillesse, badinerie, amusement, divertissement. En revanche 35% du répertoire serait de goût italien, avec des désignations comme sonate sonata ou concerto.

Au moment où l’intérêt pour la vielle est le plus grand, les deux répertoires montent en puissance, les œuvres à désignation italianisante profitant probablement un peu plus de l’engouement pour l’instrument que les œuvres françaises. Mais, dans la réalité, il faudrait prendre en compte que les deux goûts, français et italien, s’influencent réciproquement pour inspirer des œuvres composites.

A notre connaissance, il n’y aura pas, concernant la vielle, d’opposition frontale entre les deux goûts. Il n’y aura pas confrontation entre une « école française » et une « école italienne ». Les compositeurs plus sensibles à la place symbolique de la vielle, écriront pour celle-ci de la musique française, les compositeurs plus sensibles à la place sociale de la vielle et à sa promotion comme instrument « noble » revendiqueront pour elle la possibilité de jouer aussi de la musique italienne, c’est à dire de mélanger les genres, sans porter d’exclusive contre la musique française. La vielle est donc un instrument de « goût français », à moins qu’elle puisse être de « tous les goûts », pour ceux qui la considèrent comme ayant des qualités et des possibilités analogues à celles que montrent les autres instruments de dessus.

Notes
1.

Voir chapitre 18 : Analyse quantitative du répertoire.