La carrière de type unispatial d’insertion professionnelle renvoie à l’idée que le répertoire de rôles et de ressources des jeunes est agencé autour d’un engagement principal, professionnel, et que celui-ci est fortement articulé à un espace prééminent 238 . Les capitaux hérités et acquis de l’individu sont, comme dans le type précédent, multiples et différenciés. Toutefois, plutôt que d’agir les uns sur les autres et de se consolider mutuellement, ils tendent à s’unir et à se concentrer pour le renforcement d’une forme spécifique de capital : le capital scolaire. En d’autres termes, le répertoire de ressources (sociales, économiques, culturelles) est moins mobilisé en vue d’accroître un patrimoine de lieux et des compétences spatiales qu’en vue d’élever le niveau de formation et de spécialisation professionnelle. Le volume de capital spatial, après une augmentation due à une première appropriation de l’espace international 239 , tend à se stabiliser et à demeurer constant.
Dans les carrières unispatiales d’insertion professionnelle, les individus possèdent un répertoire de rôles agencé à un patrimoine de lieux restreints. Ils partent à l’étranger dans un contexte éducationnel d’ouverture sur l’international et de marchés du travail jugés hautement compétitifs. Les conduites de ces jeunes sont animées par une profonde angoisse quant à l’incertitude que présentent les perspectives d’embauche dans leur domaine de formation et/ou par de puissantes aspirations professionnelles et carriéristes. Par l’expérience d’un séjour d’études à l’étranger, ils cherchent à se distinguer de leurs collègues sur les marchés éducatifs et de l’emploi et à acquérir la meilleure éducation possible. C’est d’ailleurs ce qui incite quelques-uns à opter pour une université prestigieuse. L’investissement d’un espace éducatif étranger, dans leur cas, est conçu comme une stratégie qui, en dépit de ses apports dans d’autres univers de vie (lieu de renégociation des rôles familiaux, d’expérimentation de soi, etc.), aide à renforcer l’engagement professionnel.
Parmi nos enquêtés, il s’agit de l’espace d’origine. Nous pouvons cependant imaginer que pour ceux des étudiants qui s’installent à l’étranger de manière définitive – ou, du moins, dans l’intention de –, cet espace est devenu celui de la société d’accueil.
Pour la majorité des enquêtés concernée, cette mobilisation de l’espace étranger a eu lieu dans le cadre des études.