1.3. QUELQUES ELEMENTS DES CONCEPTIONS FREUDIENNES SUR L’ECHEC SCOLAIRE

Tout au long de son œuvre S. Freud s’intéressera à certains aspects des mécanismes intellectuels, tels que la réflexion, les mots d’esprit, l’attention ou encore la mémoire, sans qu’une étude particulière leur soit consacrée. Il fait appel sur le plan économique, à la pulsion d'emprise et aux pulsions épistémologiques et scoptophiliques afin de rendre compte des processus cognitifs et intellectuels. Il lie la pulsion de savoir à la pulsion sexuelle sans toutefois donner d’explications claires sur son origine. Dans Trois essais sur la théorie de la sexualité (1905), il décrit :

‘« A peu près à l'âge où la vie sexuelle de l'enfant atteint son premier sommet, entre 3 et 4 ans, il se manifeste une activité qui peut être rapportée à la pulsion de savoir ou de rechercher. Cette pulsion ne peut être comptée parmi les pulsions partielles élémentaires, et ne peut non plus être considérée comme appartenant exclusivement à la sexualité. Son activité correspond à une sublimation de la pulsion d'emprise, tout en utilisant l'énergie de la scoptophilie. » (S. Freud, 1905, p. 194)’

Si pour S. Freud les processus cognitifs ne débutent pas au commencement de la vie, il insistera particulièrement sur le lien entre curiosité intellectuelle et investigations sexuelles (S. Freud, 1908).

Concernant plus précisément l'échec scolaire, dans Inhibition, symptôme, angoisse (1926) S. Freud écrira, sans vraiment le nommer, qu'il provient dans la plupart des cas d'une inhibition intellectuelle.

‘« L’inhibition est l’expression d’une restriction fonctionnelle du moi qui peut elle-même avoir des causes très diverses. » (S. Freud, 1926, p. 5) ’

Mais, précise S. Freud, cette restriction permet d'éviter l'apparition de l'angoisse. Et, s’il y a angoisse selon S. Freud c’est parce que,

‘« La fonction moïque (au service du moi) d’un organe est endommagée quand son érogénéité, sa signification sexuelle augmente. » (ibid., p. 6) ’

S. Freud indique ainsi que le moi renonce à la fonction car cette fonction a une signification sexuelle pour le sujet. Le sujet ne peut faire l’action car dit S. Freud,

‘« c’est comme s’il exécutait l’action sexuelle interdite. » ( ibid., p. 6)’

Ainsi le sujet, et plus précisément le moi, va renoncer à la fonction pour éviter d’avoir à refouler et donc pour échapper à un conflit avec le Ça.

Selon S. Freud il se peut aussi que l’inhibition se présente comme une autopunition. Ceci est particulièrement valable dans les activités professionnelles précise t-il, et donc a fortiori dans le scolaire. Le moi se refuse à faire des choses qui permettraient au sujet de réussir et donc aboutiraient à une certaine satisfaction que le Surmoi sévère lui refuse. Le sujet évite donc ici un conflit avec le Surmoi.

S. Freud décrit encore des inhibitions plus générales du moi où le mécanisme est plus simple. Il précise que lorsque le moi est sollicité pour une « tâche psychique d’une difficulté particulière » ( ibid., p. 6.) il manque en quelque sorte d’énergie. Ainsi précise S. Freud, on peut observer chez de tels sujets des états de dépression ou de mélancolie.

S. Freud va cependant préciser qu’inhibition et symptôme se différencient. Selon lui, il y a des maladies où il n’y a que des inhibitions et pas de symptôme. L’inhibition est directement liée à la fonction et n’est pas spécifiquement pathologique. Il peut y avoir des restrictions normales. Mais, le symptôme signifie qu’il y a présence d’un processus pathologique. Il souligne toutefois qu’ « une inhibition peut donc être aussi un symptôme. » (ibid., p. 3.)

Concernant plus particulièrement l’échec scolaire, la psychanalyse est fort longtemps, demeurée sur l’idée de l'échec scolaire comme manifestation de l'inhibition. Toutefois, si actuellement de nombreux psychologues cliniciens font encore de l’inhibition intellectuelle un début d’explication de l’échec scolaire, les psychanalystes constatent par le contexte clinique et familial, qu’il est un bien parfois un symptôme au sens freudien du terme. C’est-à-dire qu’il est

« indice et substitut d’une satisfaction pulsionnelle qui n’a pas eu lieu, un succès du processus de refoulement. Le refoulement procède du moi qui, éventuellement par mandat du sur-moi, ne veut pas prendre part à un investissement pulsionnel incité dans le ça. Le moi parvient par le refoulement à ce que la représentation, qui était porteuse de la motion désagréable soit tenue à l’écart du devenir-conscient.» (ibid., p. 7)

Le symptôme a donc pour signification une satisfaction substitutive de la pulsion inassouvie et témoigne d’une formation de compromis.

Voyons à présent, la place des difficultés cognitives dans la psychologie clinique.