6.3. LA PROBLEMATIQUE PROPREMENT DITE

Adhérant à la description du processus décrit par D. Houzel, nous déduisons : si la fonction contenante "normale" est un processus de stabilisation, lorsque la fonction contenante ne va pas jouer adéquatement son rôle nous aurons un processus de déstabilisation à l'œuvre. Ce processus va conduire à des formes psychiques (contenants de pensée) structurellement instables où les processus sont continuellement actifs. Ainsi, les formes ne seront jamais stables et représentables et donc difficilement pensables et communicables. Les processus sont ainsi continuellement dynamiques.

Approfondissons notre problématique. Nous savons qu'au début de la vie le bébé est totalement incapable de survivre par ses propres moyens. L’état très spécifique de préoccupation maternelle primaire (D.W. Winnicott, 1956) fera que la mère sera là pour répondre à tout ce dont le bébé a besoin. La relation est complémentaire entre le bébé et sa mère. Dans la mesure où la mère répondra de façon adéquate, les ressources potentielles du bébé vont se développer et lui permettre de se détacher de sa mère. Le bébé est donc psychiquement non différencié de la mère. Dans "Le Moi et le Ça" (1923) S. Freud explique très clairement qu'au début de la vie, le moi n'existe pas encore. Il est donc évident comme l’a si bien décrit R. Spitz, que si l'état mental de la mère est défectueux, où si l'on prive l'enfant de relations stables avec sa mère ou un substitut, cela aura des conséquences graves sur sa psyché et entravera le processus de différenciation issu du bon déroulement de la fonction contenante.

Si nous pensons, lorsque nous parlons de sujets en échec scolaire électif qu’il y a présence de déficiences cognitives liées à des carences affectives, défaillance des contenants de pensée et particulièrement difficulté de représentation de soi, si en outre, nous imaginons aisément que les relations objectales ont été perturbées, et que de tels sujets n'ont pu vivre convenablement le processus d'individuation-séparation, nous avons vu que l’utilisation fréquente chez les auteurs du terme de trouble pour désigner ces disfonctionnements implique nécessairement un minimum de constitution de cette fonction défaillante. Cela implique donc un questionnement sur ces constitutions. L'enfant a certainement pu, à un moment ou à un autre, avoir une relation adéquate avec sa mère, avec son père ou avec un ou même plusieurs substituts. Nous pensons que de ces relations ponctuelles l'enfant a pu psychiquement se construire, de façon troublée (ou dirons-nous plutôt déficiente) certes, mais se construire néanmoins, un "minimum" de représentations de soi, et un "minimum" de contenants de pensée.

Le sujet serait-il alors dans une indifférenciation sujet-objet ? L’enfant n’a t-il pu se constituer une représentation de l’objet maternel ? S'il n'a pu se différencier totalement de l’objet, nous pensons qu'il s'est inévitablement constitué un prototype d'objet maternel interne et nous nous poserons la question de sa constitution et de ses caractéristiques particulières.