1ère DESSIN et brève analyse : La femme-tronc

Thomas demandera de lui-même après la passation du W.I.S.C. à faire ce premier dessin. Il en dira très peu de choses.

Dessin 1 de Thomas
Dessin 1 de Thomas

Thomas : «C’est une dame, elle fait rien !»

Cette image est sans doute celle de sa mère qui ne réagit pas aux cris de son bébé. Elle est comme effrayée par cet enfant. Pleine de stupeur et certainement dépassée du fait de ses propres problèmes psychologiques. Elle en a "les bras coupés". On peut en effet voir que c’est une femme-tronc.

Moi : « Que peux-tu me dire sur cette femme ? »

Thomas : « Je peux rien dire sur cette dame.»

Il ne peut rien dire car tout simplement elle ne lui renvoie rien, aucun élément α de réponse aux éléments ß de son bébé (W.R. Bion, 1962).

Thomas : « Je fais des dames mais je sais pas qui c’est.»

Thomas est comme poussé à dessiner des dames malgré lui et il ne sait pas pourquoi. Cela montre combien l’image de la mère est constamment au devant de la scène de la vie psychique de Thomas, au point qu’il ne peut contrôler cela.

Thomas ne rajoutera rien de plus sur ce dessin.

La restitution

A la restitution Thomas était très excité. Il gesticulait beaucoup en évitant mon regard. Il craignait visiblement les résultats que j’allais lui annoncer. Son angoisse était très importante. Toute intervention verbale de ma part était reprise par lui de façon négative. Il était « forcément nul » d’après lui. L’impacte de ce que sa mère disait de lui (certainement en permanence) semblait vraiment trop élevé. Etrangement, j’eu le sentiment qu’il m’était plus aisée de lui parler de ses échecs dans la mesure où Thomas s’attendait à des résultats catastrophiques.

Seconde rencontre : LE CYCLOPE

Dessin 2 de Thomas
Dessin 2 de Thomas

Thomas arrive en retard. Je lui demande comme le veut le protocole de me raconter une histoire tout en la dessinant.

Thomas : « Je fais un bonhomme… J’te dirai pas le nom ! »

Lorsque je lui demande malgré tout, qui est ce personnage, il fait rouler sa gomme d’une main à l’autre et joue avec ses crayons, ce qu’il fera jusqu’à la fin de l’entretien. Il se lève sans cesse pour regarder par la fenêtre, et me fait même lever « pour voir » dit-il.

Thomas : « C’est un cyclope, il bouffe des gens !»

Moi : « Ce bonhomme y bouffe qui ? »

Thomas : « Y… Y te bouffe ! »

Moi : « A part moi ? »

Thomas : « Il a bouffé toute la maison des enfants. »

Il est content de me mettre mal à l’aise en sortant de la salle et en allant frapper dans la pièce à côté. Je lui précise que s’il n’est pas coopératif, on arrêtera l’entretien.

Thomas : « Allez !!!…» (Plaintif.)

Il n’apprécie pas cette "menace" et c’est comme s’il me suppliait. Il veut écouter l’enregistrement. Il dit qu’il a faim, me demande où je vais manger à midi et est très étonné par mon incertitude. Puis, je lui demande :

Moi : « Tu aimes les cyclopes ? »

Thomas : « Oui ! »

Moi : « Pourquoi, qu’est ce qu’ils ont de spécial les cyclopes ? »

Aussitôt il répond :

Thomas : « Ils ont un œil ! »

Moi : « Ils arrivent à voir avec un seul œil ? »

Thomas : « Prr ! » (Ce qui veut dire : « je ne sais pas ! »)

Moi : « Tu ne sais pas ? Ils doivent bien voir pour attraper les gens qu’ils mangent ? »

Thomas : « Oui mais pas comme nous ! »

Puis, il va prendre le cendrier et me le passe sous le nez, mais je ne me sens pas menacée. Agité et opposant, je lui rappelle que s’il ne coopère pas je devrai interrompre l’entretien.

Thomas : « Siiiiii ! » (Suppliant)

Moi : « Il est bien ce nez ou vilain ?»

Thomas : « Vilain ! »

Moi : « Ça lui sert à quoi ?

Thomas : « A sentir la bouffe ! »

Moi : « Ils mangent quoi encore les cyclopes ? »

Thomas : « Un sanglier. »

Il scrute le magnétophone et me demande sans cesse :

Thomas : « Fait écouter ce truc ! »

Je lui précise que l’on écoutera après l’entretien et il dit :

Thomas : « Après ! » (Il acquiesce pour ne pas interrompre l’entretien.)

Thomas : « Je peux faire un jeu ? J’ai un jeu ! »

Moi : « Et bien alors explique-moi ce jeu ! »

Il cache sa gomme dans une main, derrière son dos et me demande de deviner dans quelle main elle est. La première fois que je réussis à la trouver, il me dit que j’ai vu, comme si son corps était transparent.

Je lui pose ensuite des questions sur ses frères et sœurs dont il ne dit rien, puis sur ses parents.

Moi : « Ton papa et ta maman qu’est ce qu’ils font comme travail.»

Thomas : « Ma maman ? Elle soigne les gens !» (Puis, il marmonne en souriant comme s’il se moquait.) Et mon papa… Il est… Charcutier… C’est toi ça ! », en me montrant le cyclope et il rit. Je lui dis alors que c’est moi et que c’est moi qu’il mange. Silence.

Thomas : « Y a une histoire qui s’est vraiment passée ! Voilà y a un accident d’avion y avait des hommes qui sont tombés. Ils avaient plus à manger. Ils se sont mangés entre eux. Et après les policiers et tout ils ont cherché. Les autres y ont dit : « Où y sont les autres ?» Et ben… Y ont dit qu’ils les avaient enterrés. Après ils ont regardé… Y ont dit « non », après il a dit… Le monsieur qui a bouffé les autres il a dit…» (Inaudible et confus)

Moi : « Pourquoi ils les ont mangés ? »

Thomas : « Parce qu’ils avaient faim ! »

Moi : « C’est normal ou non ? »

Thomas : « C’est pas normal !»

Moi : « Qu’est ce qu’ils auraient dû faire d’après toi ? »

Thomas : « Heu !… Je sais pas moi ! »

Moi : « Qu’est ce que tu en penses de cette histoire ? »

Thomas : « Elle fait peur !»

Il se lève, montre la gomme puis, veut faire tenir un crayon à papier sur sa base.

Thomas : « J’arrive normalement ! »

Je lui fais remarquer que ce crayon n’est pas très lisse à sa base pour tenir.

Je lui propose que l’on arrête l’entretien et là il s’écrie :

Thomas : « Fais écouter ! »

Il semble très surpris de s’entendre mais y prend un certain plaisir et précise qu’il veut faire écouter cet enregistrement à son père.