2.1.3. SELON QUELLE ORGANISATION PSYCHIQUE FONCTIONNENT CES SUJETS ?

Le but essentiel de cette recherche a été de clarifier selon quelle organisation psychique fonctionnent ces sujets.

2.1.3.1. Utilisation des processus primaires ou des processus secondaires ?

Nous avons constaté que ces sujets avaient des difficultés à effectuer des activités faisant appel à des processus secondaires et que dans la plupart des cas ils utilisaient plus volontiers des processus primaires. Que faut-il comprendre de ces fonctionnements ? Les riches analyses de B. Gibello (1984), R. Mises (1963) et M. Berger (1986) n’ont cependant pas permis de situer avec précision cette pathologie dans les organisations traditionnelles. La plupart des études sur ce sujet reflète l’incertitude relative à une réelle représentation de l’organisation psychique de tels sujets. Si ces recherches nous ont éclairée, en témoignant de la singularité de tels cas, elles ne nous ont pas permis de comprendre quels sont l’organisation et le fonctionnement psychiques des sujets en échec scolaire électif et donc quels processus psychiques ils utilisent.

J. Bergeret (1972, cité par D.Marcelli, 1981 ) donne une autre explication. Il définit essentiellement deux structures : la structure névrotique et la structure psychotique. Ces deux organisations s’excluant mutuellement, le sujet appartiendrait donc à l’une ou à l’autre. Selon lui, lorsque le bébé est soumis au traumatisme, dont la gravité n’aboutit pas à l’enfermement dans une structure psychotique, mais est assez grave pour l’empêcher d’accéder à l’Œdipe, il entre dans le « tronc commun aménagé » (J.Bergeret, 1972, cité par D. Marcelli, 1981). Ce n’est pas une structure, mais une absence de structure, où il est en état d’attente. Si par certains aspects les sujets que nous avons rencontrés donnaient ce sentiment de stagnation, cette vision des choses est selon nous trop statique. Nous avons en effet souvent constaté la présence d’un dynamisme psychique chez les sujets en échec scolaire électif.

Il est selon nous nécessaire de revenir à la base des fonctionnements psychiques de tels sujets, à savoir à l’utilisation qui est faite des processus primaires et secondaires. Ces processus sont les deux modes de fonctionnements de l’appareil psychique dégagés par S. Freud dès l’Esquisse d’une psychologie scientifique (1895). Les sujets décrits ont de grandes difficultés de symbolisation et leurs déficiences s’apparentent à des pathologies du narcissisme primaire. Pourtant, nous avons remarqué qu'ils ont parfois des facultés de symbolisation, et des capacités à converser et vivre avec l'autre sans être continuellement collés à lui ou totalement coupés de la réalité. Ils sont donc capables d'attitudes qui correspondent à des processus secondaires.

Pour René Roussillon (1991) la communication paradoxale, d’un point de vue topique, réalise une espèce d’écrasement du préconscient et l’inclusion des processus primaires au sein des processus secondaires. Ces derniers continueraient à bien fonctionner, mais ils seraient subordonnés et subvertis par les processus primaires (citant P.C. Racamier, 1973).

Selon nous si les douloureuses expériences précoces non refoulées restent en attente de structuration, et aboutissent ainsi certainement à un mode de fonctionnement psychique dominant qui se rapprocherait de celui de la psychose les sujets en échec scolaire électif essaient de sortir de cette organisation dominante particulière et ils y parviennent épisodiquement.