Phase intermédiaire : La réassurance psychique

Le sujet est effondré. Rien n’est envisageable pour l’avenir et tout participe à une mort psychique qui est en train de l’envahir. Toutefois, il a comme une certaine étincelle de vie. Des pulsions importantes entrent efficacement en jeu à ce niveau là. C’est ici qu’il va y avoir une réactivation positive des « traces mnésiques perceptives » (R. Roussillon, 1995) que nous avions évoqué auparavant. Ceci va permettre au sujet de ressentir qu’il y a là quelqu’un qui veut et peut l’aider, un double étayant selon l’expression de Jean Guillaumin (1996). Il peut s’agir de l’institutrice qui le suit tout au long de l’année avec un certain espoir de voir se résoudre ses difficultés. Ce peut être le psychologue, psychiatre ou psychanalyste qui voit chez cet enfant une possibilité de remédiation des difficultés. Ce peut être encore un éducateur. Bref, toute personne, qui n’est pas indifférente aux difficultés scolaires mais aussi et avant tout psychiques du sujet, va permettre à ce dernier de retrouver progressivement dans un cadre (la classe, l’atelier, la salle de sport, etc.) suffisamment stable et malléable et par l’entremise de ce double étayant une réassurance psychique. C’est cette confiance qui va lui permettre de sortir de son état dépressif. Elle le propulse littéralement. Il est à ce niveau comme le bébé qui porté physiquement et psychiquement par l’objet, qui grâce au holding et handling (D.W.Winnicott,1960), accède à l’aire intermédiaire décrite par D.W. Winnicott (1952). Il s’agit en effet d’une progression psychique comme celle se jouant chez le bébé au 6ème mois de la vie. Ce processus en évoluant permet à l’enfant de se détacher de l’objet. Le sujet amorce donc ici véritablement une ascension psychique, que nous avons nommé processus progrédient.

La psyché se "cramponne" donc véritablement en étant revalorisée du dehors. Cette revalorisation est primordiale dans tout le processus qui s’enclenche ici. En effet, elle va injecter de l’énergie à la psyché, ce qui va permettre au sujet de sortir de son état dépressif. Tout le processus de ce modèle spiralé nécessite beaucoup d’énergie. La psyché est ainsi fortement sollicitée du point de vue économique. Cette énergie est primordiale dans tout le déroulement. Il n’est ainsi pas étonnant de constater chez la plus grande partie de ces sujets une importante fatigabilité. A la fin du processus complet, les sujets sont littéralement épuisés. Cette étape post-dépression est extrêmement importante, car des pulsions entrent en action, et c’est grâce à elles que le processus est possible. C’est en quelque sorte ici que l’énergie se renouvelle et permet que s’esquisse le début du grand parcours de la psyché. Sans cette étape il ne serait pas possible au sujet d’enclencher le long processus à venir. Ici la psyché se recharge progressivement, elle obtient son capital entier d’énergie, grâce au cadre et au double étayant (J. Guillaumin, 1996). Par la suite ce capital va continuellement se réduire comme dans une batterie. Lorsque l’énergie sera complètement épuisée le sujet sera de retour vers cet état dépressif. La boucle sera bouclée. Nous aurons l’occasion d’y revenir.