3. Le processus psychique à l’œuvre

Si la façon d’appréhender les apprentissages témoigne de la constitution ou non de tel ou tel contenant de pensée, nous avons vu avec le W.I.S.C. que cela reflète aussi un conflit où des tensions aboutissent à des investissements très divers. L’incohérence dans les capacités (les sujets ne présentant pas des aptitudes identiques) nous a orientée à saisir que les résultats changent en rapport avec le fonctionnement psychique de ces sujets, à un moment ou à un autre.

Le but de cette recherche était de pouvoir comprendre l’organisation et le fonctionnement psychique de ces sujets. Nous avons ainsi pu constituer un modèle en quatre étapes clefs, de compréhension de ce fonctionnement psychique singulier. Ce modèle nous a montré que ce qui est fondamental pour le sujet c’est la nécessité d’accéder à l’espace transitionnel, étape pionnière capitale. Ici le sujet est dans une phase d’illusion, car l’activité de représentation n’est possible que si le sujet a pu expérimenter un environnement fixe et malléable. Sans cette possibilité il manque au sujet la capacité de se représenter la transformation d’un élément en un autre, ce qui est essentiel pour les apprentissages. Une bonne constitution du médium-malléable (R.Roussillon, 1985) aurait permis de définir un espace et un temps et de délimiter un "dedans" et un "dehors" (M. Sami Ali, 1974). En conséquence, ces sujets, en quête de représentations et donc de contenants, sont dans la nécessité permanente de rejouer ces processus. Les expériences précoces pénibles pour le sujet restent en attente de représentations. La plupart des sujets ont montré qu’ils retournaient dans cette aire intermédiaire afin de rejouer ces processus et tenter d’aller jusqu’à leurs termes. Cependant, ceci ne se joue qu’au niveau fantasmatique. Le processus projection-introjection, l’indifférenciation sujet-objet et l’intériorisation de l’objet maternel échouant, cela ne permet pas d’accéder à la fonction symbolique complète. Certains sujets comme Mélissa ont bien montré combien la problématique de l’introjection a eu des conséquences sur la catégorisation et la représentation mentale. Elle a ainsi exprimé la nécessité de passer des représentations-choses traces mnésiques visuelles, aux représentations-mots plus symboliques. Les sujets sont alors en continuel conflit, obligés de rester psychiquement attachés à cette mère qui les a pourtant si peu soutenu et maintenu (holding et handling) et voulant à la fois faire éclater cette symbiose. Ils sont constamment en quête. La première est celle de l’espace transitionnel qui permettra d’éviter la séparation trop brusque d’avec l’objet et d’expérimenter le médium-malléable (R. Roussillon, 1991), capitale pour l’activité de représentation. Toutefois, il semble que ce soit chaque fois un échec. La représentation ne se faisant pas et la quête restant perpétuelle, la psyché risque constamment la noyade et donc la mort. Ces représentations sont des bouées pour le sujet. Sans elles, il ne pourra jamais garder la tête hors de la mère, c’est-à-dire se détacher de l’objet.

La dépression et la prestance sont des étapes révélatrices du fonctionnement psychique des sujets. La prestance marque le passage dans l’aire intermédiaire de l’illusion et la dépression, l’obligation de quitter cette aire. La honte est le premier signe de la chute dans la phase de dépression.