2. Du point de vue de la chronologie

Nous reprenons les actographes (Partie-3, méthodologie) pour quatre « activités » issues :

En ce qui concerne la représentation des actions et « activités », nous avons eu des soucis avec le logiciel (Kronos 2.4) pour « l’activité » P2-IIA2 : les bandeaux de couleurs (action et « activité ») ont été inversé et sont en second plan par rapport aux opérations des acteurs. Nous rappelons qu’en haut de l’axe des abscisses, nous trouvons les opérations orales de l’enseignant, puis ses opérations gestuelles et en bas ce sont les opérations orales et gestuelles des élèves. Nous nous intéressons tout d’abord aux régularités possibles en dehors du contenu des « activités », puis nous prendrons en compte le contenu.

Partie 4 - Figure-10 : P1A3 lors de la première séance d’enseignement
Partie 4 - Figure-10 : P1A3 lors de la première séance d’enseignement
Partie 4 - Figure-11 : P2-IIA2 lors de la cinquième séance d’enseignement
Partie 4 - Figure-11 : P2-IIA2 lors de la cinquième séance d’enseignement
Partie 4 - Figure-12 : P1-A6 lors de la seconde séance d’enseignement
Partie 4 - Figure-12 : P1-A6 lors de la seconde séance d’enseignement
Partie 4 - Figure-13 : P3-RepForce lors de la huitième séance d’enseignement
Partie 4 - Figure-13 : P3-RepForce lors de la huitième séance d’enseignement

En mettant en parallèle les figures 10 et 11, quatre points ressortent:

Nous observons que pour un même type « d’activité », i.e. faisant appel à un modèle de la physique et issues intégralement des documents OUTILS/PEGASE, il existe une évolution entre la première et cinquième séance d’enseignement. Elle se situe du point de vue de la place de l’élève. En effet, lors de la résolution de « l’activité » P2-IIA2, l’enseignant n’intervient plus en mixte. Par conséquent, il laisse la totalité du temps qu’il alloue à la résolution pour les élèves et n’interrompt pas leur travail en binôme. Les élèves interviennent lors de la présentation de « l’activité » en cinquième séance. Il laisse donc plus de place aux élèves quel que soit l’étape de l’activité. En ce sens, il reprend les choix des concepteurs des documents OUTILS/PEGASE.

Nous retrouvons ces mêmes points quand nous mettons en parallèle les figures 12 et 13 :

Deux conclusions sont à mentionner. La première est relative à ce qui a été réellement repris des documents OUTILS/PEGASE et réinjecté ou pas dans les propres « activités » de l’enseignant. La seconde conclusion est relative à l’évolution de la pratique en classe de l’enseignant qui est identique aussi bien dans les cas des « activités » issues des documents que dans le cas « d’activités » issues de sa propre initiative.

En ce qui concerne ce qui a été réellement repris des choix et considérations des concepteurs, nous observons que :

Ce qui vient d’être décrit comme étant repris des documents OUTILS/PEGASE est réinvesti dans les propres « activités » de l’enseignant.

En termes d’opérations, nous avons observé lors des analyses précédentes que l’enseignant usait de régularités et singularités et nous venons d’observer qu’il évolue au fil des semaines en allant de plus en plus vers ce que proposaient les documents OUTILS/PEGASE quelle que soit l’origine de « l’activité ».

Nous effectuons une analyse plus fine en reprenant les deux « activités » P1-A3 et P2-IIA2 qui font appel à un modèle de la physique et qui sont issues des documents OUTILS/PEGASE pour la première et de sa propre initiative pour la seconde. Pour cela, nous prenons en compte le contenu en termes de savoir en jeu de ces deux « activités ».

Du point de vue du contenu « l’activité » P1-A3 vise à caractériser des mouvements pour des objets différents. Elle a pour objectif d’aider l'élève à s'approprier les éléments du modèle de la physique relatifs à la vitesse et à la caractérisation du mouvement et les limites de ce modèle (cas du volant de badminton).

L’activité P2-IIA2 propose d’analyser des interactions lors du mouvement d’un médecine-ball. Les élèves doivent représenter un diagramme des interactions pour chaque phase du lancer vertical du médecine-ball. Auparavant, les élèves ont déjà vu le matériel et ont déterminé les différentes phases du mouvement et les variations de vitesse au cours d’un lancer vertical de ce même médecine-ball.

Pour le texte qui suit, les effets topogénétiques et chronogénétiques sont au niveau-6 de la pratique d’enseignement, i.e. au niveau des opérations des différents acteurs : enseignant et élève(s). Il existe les mêmes temporalités des effets topo et chrono que les temps et rythmes que l’enseignant doit gérer dans son activité. Nous avons vu lors de l’analyse de ses documents personnels, qu’il conservait la topogenèse et chronogenèse de niveau-5 proposé par les documents OUTILS/PEGASE. Nous analysons maintenant s’il existe des régularités au sein de la gestion de effets topogénétiques et chronogénétiques de niveau-6. En sachant, que nous n’avons pas accès au contenu de discours des acteurs, ces effets ne pourront être que suggérés.

Partie 4 - Figure-14 : Présentation de « l’activité » P1-A3 lors de la première séance
Partie 4 - Figure-14 : Présentation de « l’activité » P1-A3 lors de la première séance
Partie 4 - Figure-15 : Présentation de « l’activité » P2-IIA2 lors de la cinquième séance
Partie 4 - Figure-15 : Présentation de « l’activité » P2-IIA2 lors de la cinquième séance

Nous observons que pour les deux « activités », l’enseignant débute et termine la présentation de chaque activité de la même manière. Il commence par présenter et exposer pour terminer par lire à haute voix la consigne de chaque « activité ». Mais, du point de vue de la gestion du niveau-6 (Partie-2 : cadrage théorique), l’enseignant ne prend pas le même temps pour présenter la consigne de chaque activité. Pour « l’activité » P1-A3 (figure-14), cela prend environ 40s tandis que pour « l’activité » P2-IIA2, cela prend près de 3min. De plus, en termes de pourcentage de temps passé à présenter chacune de ces activités par rapport au temps total pour la résoudre, il existe un rapport de 40 (tableau-39) entre les présentations des deux « activités ».

Contrairement à « l’activité » P1-A3, la présentation de P2-IIA2 se fait successivement en plusieurs étapes :

Partie 4 - Figure-16 : Première étape de la présentation de P2-IIA2
Partie 4 - Figure-16 : Première étape de la présentation de P2-IIA2

La figure-16 présente une première étape de la présentation. Celle-ci regroupe la présentation et le jeu de questions – réponses avec les élèves avant la manipulation par l’enseignant du médecine-ball.

Nous observons que dans le jeu de questions – réponses avec les élèves, les échanges avec l’enseignant sont symétriques et non-symétriques. En effet, au début, l’enseignant reprend des réponses d’élèves, i.e. l’échange est symétrique, puis il pose des questions, les élèves répondent mais l’enseignant continue à présenter malgré les réponses des élèves. Deux cas se présentent : les réponses des élèves sont correctes ou incorrectes par rapport à ce qu’attendait l’enseignant. Dans les deux cas, l’enseignant ignore les réponses et continue, ce qui laisse supposer qu’il ne prend pas en compte le point de vue des élèves et par conséquent que c’est son discours qui fait autorité.

Partie 4 - Figure-17 : Seconde étape de la présentation de P2-IIA2
Partie 4 - Figure-17 : Seconde étape de la présentation de P2-IIA2

La figure-17 présente la même remarque que pour la figure-16 précédente. En effet, l’enseignant articule une interaction symétrique et non-symétrique au cours de cette partie de la présentation de « l’activité ». Au début de la manipulation, l’interaction est non-symétrique, puis à la fin symétrique et en fin de la seconde étape, l’interaction est de nouveau symétrique. Il termine cette seconde étape par une interaction non-symétrique centrée sur ses présentations et exposés.

La troisième étape est la lecture à haute voix de la consigne de cette « activité » P2-IIA2.

Les deux présentations sont différentes dans leurs composantes mais identiques par rapport à leurs effets topogénétiques finaux. En effet, dans les deux « activités », la présentation se termine par l’enseignant qui lit à haute voix la consigne. En ce qui concerne la présentation de « l’activité » P1-A3, le lieu où se situe le savoir se partage entre l’enseignant et le texte de la consigne de « l’activité ». Par contre pour P2-IIA2, il est partagé entre tous les acteurs et ce partage se décompose au travers des différentes étapes de la présentation. Au cours des deux premières étapes, l’enseignant termine à chaque fois par une interaction non-symétrique et faisant autorité. Au final, c’est lui qui possède le savoir.

Les effets chronogénétiques des deux présentations sont également identiques. Pour « l’activité » P1-A3, ayant aucune opération de la part des élèves, c’est l’enseignant qui fait avancer la construction de sens du savoir en jeu. Pour « l’activité » P2-IIA2, l’enseignant fait bien participer les élèves à l’avancement du sens lié au savoir en jeu pour chaque étape de la présentation, mais c’est à chaque fois lui qui est initiateur des questions et c’est lui qui termine chaque phase d’interactions symétrique par une interaction non-symétrique et faisant autorité.

Partie 4 - Figure-18 : Résolution de « l’activité » P1-A3
Partie 4 - Figure-18 : Résolution de « l’activité » P1-A3
Partie 4 - Figure-19 : Résolution de « l’activité » P2IIA2
Partie 4 - Figure-19 : Résolution de « l’activité » P2IIA2

En mettant en parallèle les figures-18 et 19, nous observons des régularités pour la résolution de chacune des deux « activités » :

De plus, lors de la résolution de :

Pour P1-A3, l’enseignant interagit avec ses groupes d’élèves symétriquement puis de manière non-symétrique tandis que pour P2-IIA2, il conserve une interaction symétrique et prend en compte le point de vue des groupes d’élèves puisqu’il reprend ou reformule leurs réponses. Comme nous l’avons dit précédemment, l’enseignant tend plus vers ce que proposaient les concepteurs en P2-IIA2 : il n’intervient plus en mixte, reprend ou reformule les réponses des élèves dans une interaction symétrique et les élèves posent en premier les questions.

Les effets topogénétiques de chaque résolution est différente. En effet, pour P1-A3, les interactions entre les groupes d’élèves et l’enseignant se terminent principalement par la présentation et exposé de la part de l’enseignant. Par conséquent, la construction de sens est bien chez le groupe d’élève quant ceux-ci posent la question, mais à la fin c’est l’enseignant qui conclut avec une présentation et un exposé. Tandis que pour P2-IIA2, la topogénèse est différente car c’est un échange symétrique ou l’enseignant ne termine pas, il laisse cela à la charge du groupe d’élèves.

En termes d’effets chronogénétiques, c’est bien les groupes d’élèves qui ont la charge de faire avancer la construction du savoir en jeu, mais pour P1-A3, c’est l’enseignant qui fait avancer la construction, tandis que pour P2-IIA2, l’enseignant la laisse à la charge des groupes d’élèves.

Comme il est dit précédemment, nous n’avons pas accès au contenu de discours des acteurs. Cependant nous pouvons nous interroger sur l’absence d’appel de la part de l’enseignant au modèle de la physique. Un de nos critères de sélection des activités pour cette analyse est relatif à l’utilisation du modèle qui doit être pris en compte ici pour la résolution de cette « activité » du point de vue de l’activité de modélisation. Par conséquent, pour « aider les élèves » lors de leurs sollicitations, l’enseignant devrait faire appel au modèle. Ce qui n’est pas le cas ici. Donc lorsque l’enseignant apporte de l’aide aux élèves, il place le savoir soit du côté des élèves ou de son côté mais pas dans le modèle. Les choix des concepteurs étaient que l’enseignement doit être centré sur l’élève et relatif à l’activité de modélisation. Ceci implique que dans le cas où les groupes d’élèves sollicitent l’enseignant alors il peut situer le savoir soit du côté du groupe d’élèves, du modèle de la physique ou desobjets et événements présents au sein de la situation expérimentale. En ce sens, l’enseignant ne reprend qu’en partie les considérations des concepteurs. Il met bien les élèves par deux pour travailler, mais il ne fait pas appel au modèle pour les aider à résoudre leurs problèmes.

Partie 4 - Figure-20 : Correction de P1A3
Partie 4 - Figure-20 : Correction de P1A3
Partie 4 - Figure-21 : Correction de P2-IIA2
Partie 4 - Figure-21 : Correction de P2-IIA2
Partie 4 - Figure-21 : Correction de P2-IIA2
Partie 4 - Figure-21 : Correction de P2-IIA2

Dans les deux cas, l’enseignant termine par une phase assez longue de présentation et d’exposé où les opérations orales des élèves sont inexistantes et il clôt la correction par une question. C’est l’étape qui est communément appelé : l’institutionnalisation.

Deux éléments sont différents entre les actographes (figure-20 et 21) :

Nous retrouvons les résultats que nous évoquions précédemment. L’enseignant donne de plus en plus de place aux points de vue des élèves, ici en les faisant participer de manière orale et écrite au tableau.

En termes d’effets topogénétiques, lors de la correction, le savoir semble partagé, puis institutionnalisé par l’enseignant en fin de correction. En termes d’effets chronogéntiques, c’est par les élèves que le sens se construit, de part leurs écrits au tableau, leurs réponses aux questions de l’enseignant, mais c’est par l’enseignant que celui-ci s’institutionnalise.

En termes d’institutionnalisation et d’activité de modélisation, du point de vue des concepteurs l’enseignant doit faire rendre compte aux élèves des processus de pensée que ces derniers ont utilisé pour résoudre « l’activité ». Comme pour la résolution, l’enseignant ne fait pas appel au modèle. Par conséquent, nous pouvons supposer que celui-ci ne fait pas rendre compte aux élèves des articulations entre les événements et objets de la situation expérimentale avec la théorie et modèle. En ce sens, l’enseignant n’a pas repris les considérations et choix des concepteurs.