PREMIÈRE PARTIE : LE TEMPS PRIMITIF

CHAPITRE I. LE TEMPS DE COMBRAY

Ce qui caractérise Combray, c’est l’atmosphère médiévale. Est-ce parce que le Moyen Âge est à la mode ? Est-ce parce que Proust apprécie l’architecture de l’époque ? Ou parce qu’il est un lecteur passionné d’Augustin Thierry ou de Ruskin ? Il nous semble que ce n’est pas suffisant pour expliquer la présence du Moyen Âge. Les images moyenâgeuses ne sont pas de simples ornements nostalgiques de Du côté de chez Swann. Elles ne sont pas non plus que des clins d’œil à la tendance littéraire du temps du romancier. Pourquoi le narrateur rêve-t-il du temps médiéval ? Comment Proust l’emploie-t-il pour créer un « paradis perdu » ? Ces questions nous semblent importantes d’autant plus que la rêverie médiévale détermine dans une certaine mesure le cheminement du narrateur.

Par ailleurs, les images médiévales permettent de conférer une épaisseur temporelle à Combray. Des passés historiques différents s’entrelacent. Ce caractère soutient en effet la structure temporelle de la Recherche.

Nous entreprendrons ensuite de révéler que le temps décrit dans « Combray II » se distingue de la temporalité morcelée et démultipliée qui caractérise le reste d’À la recherche du temps perdu. Certes, on reconnaîtra ici l’entrelacement des temps, typique chez Proust, mais le temps de Combray revêt une régularité cyclique. Si l’univers de « Combray II » se présente comme euphorique, c’est grâce à cette cohabitation des hommes avec le temps.