CHAPITRE II. PROUST, ARCHÉOLOGUE DE LA MÉMOIRE

Les vestiges — lecture et écriture

Nous tenterons dans ce chapitre de nous interroger sur le rapport entre la leçon de l’histoire proustienne et la lecture qui amène inévitablement à la question de l’écriture chez Proust. Or, rappelons que chez Proust, on rencontre la Muse de l’histoire dans une « vieille cathédrale » ou une « église provinciale », en résumé, un vieux monument religieux. Schopenhauer lui aussi, en trouvant la véritable qualité de l’histoire dans la lecture, s’attache aux monuments :

‘« […] en présence d’un monument de l’antiquité primitive, qui a survécu à sa propre signification, par exemple en présence des pyramides, des temples et des palais du Yukatan, nous restons aussi déconcertés et aussi stupides […] que l’homme qui considère une vieille page d’écriture jadis chiffrée par lui et dont il a perdu la clef […] 1279  »’

Ici, le monument est comme un vieux livre dont on ne comprend plus la signification. Une page plus loin, Schopenhauer écrit : « Les monuments de pierre ne servent pas moins à cette fin que les monuments écrits.  1280  » Le penseur trouve une analogie entre monument et lecture-écriture. On peut tenter de dégager une image identique dans l’œuvre proustienne.

Notes
1279.

Ibid., p. 1185.

1280.

Ibid., p. 1186 « la « fin » dont il est question désigne le rétablissement de l’unité du genre humain « brisée et morcelée sans cesse par la mort »).