L’histoire incorporée

La superposition de la vie à l’histoire

En analysant la méthode de l’école des Annales, Paul Ricœur souligne un problème généré par la notion de « longue durée » : « Un temps long peut être un temps sans présent, donc aussi sans passé ni futur […] ». Car sans aucune intrigue au niveau narratif, « la longue durée risquerait d’arracher le temps historiographique à la dialectique vivante entre le passé, le présent et le futur 1436  ». Le philosophe souligne alors l’importance du rapprochement entre le temps individuel et le temps collectif, comme Péguy :

‘« Cette conséquence désastreuse ne peut être éludée que si une analogie est préservée entre le temps des individus et le temps des civilisations : analogie de la croissance et du déclin, de la création et de la mort, analogie du destin.  1437  »’

La stratégie de Proust réside dans cette idée, lorsqu’il compare le roman futur de son narrateur aux Mémoires de Saint-Simon. Il dégage cette analogie entre le déroulement de la vie d’un homme et celui d’une civilisation de l’époque qu’il a vécue, et de plus, rapproche l’évolution de la société de celle de son narrateur, à l’instar de Chateaubriand et de Michelet. L’histoire de Combray est située après la Guerre franco-allemande de 1870, donc au moment de la naissance de la troisième République. L’apprentissage du narrateur se déroule parallèlement au développement de la société française de cette période. Pendant la Grande Guerre, en renonçant à devenir écrivain, il vit reclus dans un hôpital ; dans le même temps Saint-Loup meurt et Charlus est déchu du rang de premier ordre qu’il occupait autrefois dans le faubourg Saint-Germain. Aussi pouvons-nous dire, avec Julia Kristeva, que cette partie du roman qui se passe pendant la guerre relève de la catégorie du « temps de la mort 1438  », inauguré par le décès d’Albertine. Enfin, le dénouement du roman se situe après la Grande Guerre, permettant que la renaissance du temps perdu du narrateur et la reconstruction de la société se superposent 1439 . Ce n’est pas tout, il nous semble qu’en choisissant un village médiéval comme pays d’enfance du narrateur, Proust superpose l’origine du narrateur à celle de la France. Nous allons examiner cela à présent.

Il nous semble qu’en enrichissant la généalogie de Guermantes, Proust pose une question grave : celui qui n’est pas né d’une famille dont le nom est immortalisé dans l’histoire n’a-t-il pas des difficultés à relier sa vie à son origine ? Proust le suggère en effet :

‘« […] tandis que la parenté d’un bourgeois s’enfonce dans la nuit, les recueils de mémoires, de correspondances du XIXe, XVIIIe, XVIIe, XVIe siècle me permirent de retrouver aisément tous les ascendants de M. ou de Mme de Guermantes comme des gens visibles, vivants […] 1440  »’

C’est pourquoi il importe de mettre en relation l’origine du narrateur et celle de Guermantes. La fascination du narrateur provient de ce que les Guermantes descendent du comte de Combray et de Geneviève de Brabant. En eux, l’histoire de France et l’enfance du narrateur se croisent. Dominique Jullien le remarque en analysant l’aspect féerique de l’étymologie et de la généalogie chez Proust :

‘« Le snobisme se nourrit de l’histoire rêvée. Mais dans le cas du Narrateur, le trajet historique se double et s’enrichit d’un trajet dans le temps, qui par-delà la déception actuelle, le ramène à l’enfance.  1441  »’

Jean-Pierre Richard note également :

‘« Autre rapport entre Combray, cette fois le Combray remémoré, resurgi du don de la mémoire, et le thème mérovingien : tous deux ont valeur de tuf, de socle, l’un pour l’histoire personnelle, l’autre pour l’histoire de France. Les amener à se rencontrer, c’est donc opérer la jonction de deux territoires d’enfance, deux mythes d’origine.  1442  »’

Ainsi, remonter la chaîne généalogique des Guermantes équivaut à la recherche de l’origine du narrateur (dans le double sens du terme, c’est-à-dire familial et historique). Il s’agit de la fusion entre l’histoire collective et la vie individuelle. Est-ce pour se sentir avec le Michelet proustien être « dans la vie, dans l’histoire 1443  » ?

Pourtant, Proust va plus loin. Nous avons rapidement vu qu’au début du roman, en dormant le narrateur devient le sujet d’un livre qu’il a lu avant de s’endormir 1444 . D’ailleurs quand il se réveille, il se sent revenu à l’état d’animal :

‘« […] j’avais seulement dans sa simplicité première, le sentiment de l’existence comme il peut frémir au fond d’un animal ; j’étais plus dénué que l’homme des cavernes […] 1445  »’

Pourtant, tout de suite, le secours arrive, il passe « une seconde par-dessus des siècles de civilisation 1446  ». Cette image qui montre la perte d’identité qu’on ressent en se réveillant nous semble significative. L’histoire de l’humanité à travers des millions d’années est incorporée dans le narrateur. Selon Péguy, il faut inclure dans la même race les anciens, derrière la mère et derrière le père, qu’on n’a même pas connus. Proust évoque les anciens jusqu’à l’origine biologique ou génétique de l’humanité, l’évolution biologique de l’humanité est inscrite dans son corps. Il nous semble que l’obstination de décrire l’hérédité et la ressemblance physique ou spirituelle entre parents et enfants chez Proust découle de cette conception de l’histoire incorporée.

Proust s’attache en particulier à l’hérédité chez les Guermantes, comme il s’attache à leur généalogie. Or, Antoine Compagnon souligne que Proust conçoit l’homosexualité comme un trait héréditaire ou plutôt, en s’appuyant sur la médecine de l’époque, comme une maladie héréditaire qui surgit dans une famille par intermittence travers des siècles. Et cette résurgence d’une hérédité chez un membre de la famille est, selon Antoine Compagnon, « non pas dégénérescence ou déterminisme héréditaire, mais résurrection dans le présent, mémoire de l’origine, intermittence indéterminée 1447  ». Chacun des Guermantes se comporte sexuellement de façon excessive, excepté la comtesse de Marsante. Au fil du récit, comme Charlus, le prince 1448 et Saint-Loup révèleront leur homosexualité en nouant plus ou moins une liaison avec Morel, le protégé de Charlus. Le narrateur explique pourquoi, en dépit de son amour passionnel pour Morel, Saint-Loup ne rompt pas la relation avec Rachel :

‘« Quant au genre d’amours que Saint-Loup avait hérités de M. de Charlus, un mari qui y est enclin fait habituellement le bonheur de sa femme. C’est une règle générale à laquelle les Guermantes trouvaient le moyen de faire exception parce que ceux qui avaient ce goût voulaient faire croire qu’ils avaient au contraire celui des femmes.  1449  »’

Remarquons que Proust écrit : « les Guermantes ». Reprenant une habitude récurrente de ce lignage noble, Saint-Loup a des maîtresses pour dissimuler son homosexualité ; cette attitude fait partie de la coutume ancestrale qui évite de menacer le bonheur familial. Ajoutons de notre côté que le duc, attaché maladivement aux conquêtes féminines, est comparable à son frère Charlus, caractérisé par sa débauche. Le narrateur met ainsi en parallèle ces frères, le duc et le baron : certes le goût s’oppose chez eux (hétérosexuel et homosexuel), mais ils sont identiques par l’excès de leur comportement sexuel, ils tiennent de leur grand-père 1450 . Par ailleurs, la marquise de Villeparisis, scandaleusement aventurière, faisait perdre leur fortune à certains hommes lorsqu’elle était jeune. La princesse de Guermantes tombe amoureuse de son beau-frère Charlus, et selon ce dernier, la chasteté de la duchesse n’est que légendaire 1451 . Aussi Antoine Compagnon a-t-il raison de faire valoir que Proust décrit les Guermantes « comme une famille pervertie, affectée d’un mal héréditaire, afin d’expliquer l’inversion de l’oncle et du neveu ». Il démontre ainsi que l’hérédité chez Proust se présente comme une « extension de l’intermittence à la race » et une « récurrence du passé 1452  ». Il nous semble qu’avec le thème du discours du maître d’hôtel, ce thème de l’homosexualité montre le caractère réitératif du récit et établit une continuité.

La famille Bloch a également l’homosexualité pour atavisme : la sœur de Bloch se montre lesbienne 1453 et l’oncle Nissim Bernard homosexuel. C’est pourquoi le narrateur met en parallèle les Guermantes et les Bloch :

‘« […] ces particularités [ataviques], devais-je me dire qu’elles mourraient ? […] j’avais vu que ces cellules morales qui composent un être sont plus durables que lui. J’avais vu les vices, les courages des Guermantes revenir en Saint-Loup […] Je pouvais le voir encore en Bloch.  1454  »’

Quant au fils Bloch, l’ami du narrateur, il tient sa méchanceté envers son beau-père de son père : ce dernier ne s’empêche pas se mettre en colère contre Nissim Bernard, l’oncle maternel du fils Bloch. Le narrateur conclut de l’observation de l’hérédité chez la famille Bloch que, si la propagation d’une mentalité dans une société prend une dimension spatiale, la transmission d’un trait héréditaire se produit, quant à elle, dans le temps :

‘« De même qu’en écoutant parler Cottard, Brichot, tant d’autres, j’avais senti que, par la culture et la mode, une seule ondulation propage dans toute l’étendue de l’espace les mêmes manières de dire, de penser, de même dans toute la durée du temps de grandes lames de fond soulèvent, des profondeurs des âges, les mêmes colères, les mêmes tristesses, les mêmes bravoures, les mêmes manies à travers les générations superposées, chaque section prise à plusieurs d’une même série offrant la répétition […] 1455  »’

Proust, en s’intéressant à la génétique, conçoit ainsi une sorte de théorie de l’hérédité : le trait héréditaire relie des membres d’une famille dans des générations différentes par son caractère réitératif. Il y a une continuité dans une famille. Pour la même raison, il persiste à dépeindre la ressemblance physique entre un personnage et ses parents ou d’autres parents. Voyons la physionomie de Gilberte : la nature en a fait « une nouvelle variété de Mme Swann 1456  ». Selon le narrateur, à première vue, on ne reconnaît pas dans son apparence ce qu’elle doit à sa mère, car, alors que cette dernière est brune, Gilberte, elle, tient la chevelure rousse et la peau dorée de son père aussi bien que deux grains de beauté au coin du nez. En revanche, ce nez a été légué par Odette. Le narrateur compare cette transmission génétique à une œuvre plastique : « le nez arrêté avec une brusque et infaillible décision par le sculpteur invisible qui travaille de son ciseau pour plusieurs générations 1457  ». Mais la physionomie de Gilberte n’est pas distinctement composée de tels traits venus de son père et de tels autres de sa mère, elle forme un « mélange » du physique de son père et du physique de sa mère 1458 . Il en est de même de la personnalité de Gilberte. Ainsi, la vertu qu’elle a héritée de son père et le vice qui évoque sa mère sont alternativement présents 1459 .

Ce qui est important, c’est qu’on peut dégager du thème de l’hérédité et de la ressemblance filiale chez Proust une transmission séculaire. Revenons aux Guermantes. L’aspect de ce lignage a été transmis pendant plus d’un millénaire, c’est-à-dire depuis la dynastie des Mérovingiens. Le curé de Combray raconte à Léonie l’histoire des frères de Charles le Bègue et de Gilbert le Mauvais, qui sont des descendants de Geneviève de Brabant et des ancêtres des Guermantes : après que leur père soit mort d’une « maladie mentale », Charles le Bègue « exerçait le pouvoir suprême avec toute la présomption d’une jeunesse à qui la discipline a manqué ». Quant à Gilbert, il incendia l’église de Combray pour se venger de son frère et tua ce dernier. « Mais il ne me semble pas avoir su se concilier la sympathie des habitants de Combray, car ceux-ci se ruèrent sur lui à la sortie de la messe et lui tranchèrent la tête 1460  », conclut le curé. Quant à Geneviève de Brabant, la petite fille de Sigebert, elle fut assassinée par son mari. Selon Jean-Pierre Richard, ce dernier fut « lassé d’elle, de sa douceur ou de sa vertu, poussé en outre par l’intrigue de sa redoutable favorite, Frédégonde, la fit étrangler la nuit durant son sommeil 1461  ». Aussi peut-on dire que Proust considère les Guermantes comme une famille noble qui possède des légendes sanglantes et, qui a parmi ses ancêtres, d’horribles personnages historiquement connus. C’est ainsi que la perversion partagée par chacun des Guermantes et la déchéance qu’ils subissent à la fin du roman ont pour origine le haut Moyen Âge.

Quant à l’homosexualité de la famille Bloch, elle prend la forme d’un « atavisme d’Orient 1462  ». Il est remarquable que l’homosexualité de Nissim Bernard se présente comme une malédiction de type racinien : « Que ce fût par atavisme hébraïque ou par profanation du sentiment chrétien, il se plaisait singulièrement, qu’elle fût juive ou catholique, à la cérémonie racinienne.  1463  ». D’après ce que remarque Antoine Compagnon dans son étude, le labyrinthe du Grand Hôtel de Balbec parcouru par Nissim Bernard, jeté à la poursuite des garçons, constitue une allusion au sérail de Bajazet de Racine 1464 . Il faudra expliquer dans cette optique pourquoi Proust cite des vers d’Athalie, une tragédie de la malédiction héréditaire dans la famille royale juive. Par ces comparaisons, Proust compose un mythe des descendants des habitants de Sodome. Selon le narrateur, l’hérédité de la famille Bloch prend une dimension millénaire, et non séculaire comme chez les Guermantes. Pour emprunter le terme de Gilles Deleuze, la « transversalité » ou la « communication » est établie au delà de milliers d’années.

Le narrateur aussi, dans La Prisonnière, se met à ressembler à sa famille tant « les choses se répètent » : il parle tendrement à Albertine en imitant sa mère et sa grand-mère ; comme son père dans « Combray II », il s’intéresse au temps qu’il fait ; s’il est capable de rester couché dans son appartement sans suivre son amie bien qu’il suspecte cette dernière d’infidélité, c’est parce que la tante Léonie « faire taire parfois » ses « soupçons jaloux 1465  ». Le narrateur en conclut :

‘« Quand nous avons dépassé un certain âge, l’âme de l’enfant que nous fûmes et l’âme des morts dont nous sommes sortis viennent nous jeter à poignée leurs richesses et leurs mauvais sorts, demandant à coopérer aux nouveaux sentiments que nous éprouvons et dans lesquels, effaçant leur ancienne effigie, nous les refondons en une création originale. […] Nous devons recevoir, dès une certaine heure, tous nos parents arrivés de si loin et assemblés autour de nous.  1466  »’

Proust considère ainsi le vieillissement comme un retour à l’origine, non seulement à l’enfance mais aussi aux ancêtres 1467 . Ou plutôt, ce sont les ancêtres qui renaissent en nous à mesure que nous vieillissons 1468 . Notre vice ou notre vertu est un resurgissement du vice ou de la vertu d’un ancêtre. Nous ne sommes pas déracinés, notre racine se trouve en nous, notre histoire de milliers d’années est incorporée en nous, comme notre origine se trouve dans le fond de notre mémoire, c’est ce que Proust nous invite à comprendre. Dans ce sens, la naïveté de Françoise doit être interprétée comme la résurgence d’une paysanne médiévale. L’esprit de rebelle du maître d’hôtel provient de celui du peuple révolutionnaire. Ce n’est pas seulement les aristocrates qui incarnent l’histoire. En parlant de l’histoire de France, Proust n’a aucune perspective politique ou précisément nationaliste, il n’y a absolument pas d’idée monarchique, même si son roman est paré de nombreux personnages nobles. Car, finalement chez Proust, l’histoire est une affaire individuelle, spirituelle et artistique.

Notes
1436.

Temps et récit, op. cit., t. I, p. 394-395.

1437.

Ibid., t. I, p. 395.

1438.

Le Temps sensible, Proust et l’expérience littéraire, op. cit., p. 231.

1439.

Peut-être que Proust s’inspirer pour concevoir le cycle mort-renaissance de l’Histoire de France de Michelet. Celui-ci écrit dans la préface de 1840 : « Ce volume et le suivant ont pour sujet commun la grande crise du XVe siècle, les deux phases de cette crise où la France sembla s’abîmer. Celui-ci racontera la mort, le suivant la résurrection. » (Histoire de France, livre V à IX, t. V, op. cit., p 281).

1440.

CG, II, II, Esquisse XXXII, p. 1266.

1441.

Proust et ses modèles, les Milles et Une Nuits et les Mémoires de Saint-Simon, op. cit., p. 126.

1442.

« La nuit mérovingienne », op. cit., p. 229-230.

1443.

« “L’affaire Lemoine” par Michelet », in CSB, p. 28.

1444.

CS, I, I, p. 3

1445.

CS, I, I, p. 5.

1446.

CS, I, I, p. 6.

1447.

« Mme de Cambremer, née Legrandin, ou l’avant-garde à rebours », op. cit., p. 277.

1448.

SG, II, III, p. 464-468.

1449.

TR, p. 282.

1450.

TR, p. 594.

1451.

Charlus dit au narrateur : « la légende de pureté de la duchesse était faite en réalité d’un nombre incalculable d’aventures habilement dissimulées » (TR, p. 600). Il nous semble que, pour renforcer la ressemblance spirituelle chez les Guermantes, dans la partie se déroulant pendant la Grande Guerre, le narrateur ne cesse de mettre Charlus en rapport avec quelques-uns de ses parents, en dépit de sa brouille avec eux : la dégradation sociale du baron est rapprochée de celle de sa tante, Mme de Villeparisis (TR, p. 344), sa germanophilie de l’anglophilie du duc (TR, p. 361) et son dilettantisme de l’intellectualisme de Saint-Loup (TR, p. 340). Ajoutons-y que la mort héroïque de Saint-Loup est dépeinte comme un retour à la race, car, selon le narrateur, il tombe au champ d’honneur, selon une tradition médiévale, comme « un Guermantes » (TR, p. 429).

1452.

« Mme de Cambremer, née Legrandin ou l’avant-gardiste à rebours », op. cit., p. 267-277. Ensuite, Antoine Compagnon applique le même thème, la résurgence intermittente, à l’idée de Proust sur l’histoire de l’art : le romancier considère que l’innovation dans le domaine artistique se produit comme un retour au passé. Par exemple, le romancier écrit dans « À propos du “style” du Flaubert » : « Flaubert était ravi quand il retrouvait dans les écrivains du passé une anticipation de Flaubert, dans Montesquieu, par exemple » (CSB, p. 587). À la différence de Chantal Robin qui dégage un mouvement spiral des leitmotive dans la Recherche, Antoine Compagnon fait valoir que ces récurrences observées chez Proust se produisent essentiellement par intermittence. Il conclut : « Proust rectifie la confusion positiviste de l’évolution et du progrès […] Entre la temporalité évolutionniste [au sens darwinien] et la temporalité intermittente de l’art, une temporalité critique, en fin de compte indéterministe. » (« Mme de Cambremer, née Legrandin, ou l’avant-garde à rebours », op. cit., p. 278).

1453.

SG, II, II, p. 236.

1454.

TR, p. 516-517.

1455.

TR, p. 517.

1456.

JF, I, p. 554.

1457.

Idem.

1458.

« Il ne faudrait pourtant pas se représenter la ligne de démarcation entre les deux ressemblances comme absolument nette. Par moments, quand Gilberte riait on distinguait l’ovale de la joue de son père dans la figure de sa mère comme si on les avait mis ensemble pour voir ce que donnerait le mélange ; cet ovale se précisait comme un embryon se forme, il s’allongeait obliquement, se gonflait, au bout d’un instant il avait disparu. » (JF, I, p. 554-555).

1459.

JF, I, p. 555. Par là, le narrateur généralise la ressemblance filiale : « Encore la distribution des qualités et des défauts dont [l’enfant] hérite se fait-elle si étrangement que, de deux qualités qui semblaient inséparables chez un des parents, on ne trouve plus que l’une chez l’enfant, et alliée à celui des défauts de l’autre parent qui semblait inconciliable avec elle. Même l’incarnation d’une qualité morale dans un défaut physique incompatible est souvent une des lois de la ressemblance filiale. »

1460.

CS, I, II, p. 104.

1461.

« La nuit mérovingienne », op. cit., p. 228.

1462.

SG, II, II, p. 239.

1463.

SG, II, II, p. 238.

1464.

« Racine est plus immoral », in Proust entre deux siècles, op. cit., p. 89. N’oublions pas que Proust suggère également les Mille et Une Nuits (SG, II, II, p. 239).

1465.

Pr., p. 586.

1466.

Pr., P. 587.

1467.

Dans le « Bal de têtes », le narrateur remarque qu’ayant vieilli, des femmes prennent un trait physique que leurs parents portaient et qu’elles n’avaient pas jusque-là : « il n’y avait pas que chez [Gilberte] qu’avaient apparu des traits familiaux qui jusque-là étaient restés aussi invisibles dans sa figure que ces parties d’une graine repliées à l’intérieur et dont on ne peut deviner la saillie qu’elles feront un jour au dehors. Ainsi un énorme busquage maternel venait, chez l’une ou chez l’autre, transformer vers la cinquantaine un nez jusque-là droit et pur. Chez une autre, fille de banquier, le teint, d’une fraîcheur de jardinière, se roussissait, se cuivrait, et prenait comme le reflet de l’or qu’avait tant manié le père. Certains même avaient fini par ressembler à leur quartier, portaient sur eux comme le reflet de la rue de l’Arcade, de l’avenue du Bois, de la rue de l’Élysée. Mais surtout ils reproduisaient les traits de leurs parents. » (TR, p. 529).

1468.

À propos de Saint-Loup, le narrateur déclare : « l’hérédité entrait pour une grande part [dans l’évolution de Saint-Loup] » (TR, p. 339).