Du Conseil Général des pèlerinages à la Bonne Presse

Deux aspects apparaissent d’emblée comme fondamentaux dans la « médiatisation » de la congrégation qui s’effectue au tournant des années 1870 : les pèlerinages et la presse.

La réputation, non usurpée, d’organisateurs de pèlerinages accordée aux assomptionnistes date de la création de l’Association de Notre-Dame du Salut 192 , en janvier 1872, par le Père Picard. Elle se déploie en facettes successives à la façon d’un papillon qui sort de sa chrysalide : en janvier, son but est « le soutien des œuvres ouvrières par l’aumône et la prière » ; au mois de mars vient s’y ajouter « l’organisation de la prière de la nation pour son salut » ; enfin au mois d’août de la même année, l’association s’enrichit d’un Conseil des pèlerinages. La direction en est assurée jusqu’à sa mort par le P.Picard, la présidence par Madame de la Rochefoucault, duchesse d’Estissac, jusqu’à son décès en 1905. Nous nous limiterons à présenter l’activité des pèlerinages qui prend petit à petit une place prédominante dans l’association.

L’idée d’organiser des pèlerinages revient à un prêtre de la paroisse Saint Gervais de Paris, l’abbé Thédenat, qui, en octobre 1871, fait un voyage à Ars, au tombeau de Saint Jean Marie Vianney. Lors de cette visite, et en particulier devant la statue de Sainte Philomène 193 , il se sent fortement incité à lancer un pèlerinage de la France pénitente vers la montagne de La Salette. Dans cette perspective, il réclame l’aide de l’Association de Notre-Dame de Salut et du Père Picard qui ont comme but de sauver la France par la prière, message de la Vierge en pleurs sur la montagne de La Salette. Dans un premier temps, le directeur de Notre Dame de Salut semble faire peu cas de cette demande pour un champ d’activité qui n’est pas le sien, d’autant plus que l’effectif assomptionniste à Paris est des plus réduits. Mais ses hésitations sont de courte durée, et bien vite il entrevoit les énormes possibilités offertes aux assomptionnistes de mettre en pratique leur devise. Dans une lettre au Père d’Alzon, le 13 mai 1872, il lui expose ses incertitudes : « Notre Dame de Salut ayant mis en avant des prières, des messes et communions pour la délivrance de la France, devait attirer les pèlerinages, c’est ce qui arrive. Voici les faits. Un prêtre et quelques âmes pieuses ont déjà préparé un pèlerinage à Ars et à La Salette pour la conversion de la France et le triomphe du Saint Siège (…) Ces braves gens viennent me demander d’être à leur tête, non pour l’activité, mais comme appartenant à une congrégation essentiellement ultramontaine. En vain j’oppose mon inaction, la nécessité de quitter Paris… On insiste et je n’ose refuser (…) Pour moi j’aimerais mieux Lourdes, mais on a choisi La Salette et les premières démarches ont été faites, je réfléchis, j’examine et j’attends » 194 .

Ainsi cette année 1872 correspond au départ d’un formidable élan des pèlerinages à La Salette, tous les étés jusqu’en 1898, puis de façon irrégulière par la suite ; à Lourdes, tous les 15 août de 1873 à la guerre ; à Rome, dès 1873, de manière régulière jusqu’en 1914 ; et enfin en Terre Sainte à partir de 1882.

Notes
192.

C’est au couvent des religieuses de l’Assomption à Auteuil qu’a lieu le 24 janvier 1872, la première réunion de cette association qui prend le nom de Notre Dame de Salut du fait de la présence au couvent d’une statue médiévale d’une vierge à l’Enfant mutilée lors des troubles de la Commune.

193.

Saint Jean Marie Vianney professait pour Sainte Philomène une tendre dévotion et lui attribuait les miracles qu’il accomplissait.

194.

Pages d’archives, troisième série, n°3, novembre 1963, p.186.