Le directeur des Pèlerinages de Pénitence

Les pèlerinages à Jérusalem dépendent du Conseil général des pèlerinages, qui, lui-même est une émanation de l’Association Notre-Dame de Salut fondée en 1872. Dans la réalité, l’organisation des pèlerinages en Terre Sainte est l’affaire de quelques hommes et l’Association Notre-Dame de Salut est peu en rapport avec les organisateurs.

Les assomptionnistes, dès la première caravane, ont mis en place une organisation très précise avec un directeur, un sous-directeur, des chefs de groupes et un comité des pèlerinages où les assomptionnistes sont omniprésents. M. de Lacroix, M. Tardif de Moidrey ou le Comte de Piellat sont les laïcs les plus impliqués dans cette organisation.

En 1883, Vincent de Paul Bailly est directeur du pèlerinage, ce qui sera le cas pour tous ceux auxquels il participe. Il est secondé par un sous-directeur, M. de Lacroix, qui prend part à l’organisation de la caravane des mille et récidive l’année suivante 516 . Sur place, comme nous l’avons mentionné, le Comte de Piellat organise la venue des pèlerins.

Son rôle de directeur de la caravane est d’abord en amont du pèlerinage, avec la préparation, la promotion, le lancement des souscriptions… cela lui est d’autant plus facile, qu’il assure depuis 1877, la direction du Pèlerin et qu’il en est de même pour La Croix, à son retour de la IIe caravane.

Une fois l’embarquement effectué à Marseille, il entame une pénitence autre que religieuse : supporter les mauvais caractères, répondre aux multiples sollicitations, arranger les problèmes d’organisation, de transport… Il est également le représentant du pèlerinage auprès des autorités religieuses (le pape, le patriarche ou le custode) ; et des autorités politiques (le consul de France ou le gouverneur de Jérusalem). Il a aussi le devoir de régler les problèmes délicats tels que la mort d’un pèlerin ou d’une pèlerine. C’est le cas en 1884 avec la noyade de l’abbé Bertrand, curé de Thibévilliers, qui, malgré les injonctions des autres pèlerins, veut se baigner dans le Jourdain ce qui lui est fatal. En 1888, c’est une demoiselle anglaise qui endeuille le pèlerinage. Le R.P. Bailly, dans une lettre au consul d’Angleterre à Beyrouth démontre qu’elle a certainement quelques problèmes : « Miss Dowson qui était un peu bizarre, soit naturellement, soit par suite des fatigues de son voyage, voulait toujours rester en arrière de la caravane, dans la course de Nazareth à Tibériade, elle semblait mécontente de tous (…) Le dimanche soir 29 avril vers 11 heures, elle sortit de la tente où elle était avec plusieurs dames, disant qu’elle ne voulait pas coucher là. (…) Au moment de partir, le matin 30, elle manquait à l’appel. (…) Nous sommes partis en chargeant la police et le couvent de continuer les recherches et de renvoyer cette dame à Nazareth ; plusieurs pensaient qu’elle avait voulu partir seule en avant. (…) Ce n’est que plusieurs jours après que nous avons appris par les sœurs de St Joseph qui réclamaient des nouvelles que le corps avait été retrouvé au lac.

Tous les compagnons de voyage de l’infortunée Miss Dowson s’accordent à croire que l’état d’esprit de la victime est la cause du malheur » 517 .

Le Père Bailly résume ainsi son pèlerinage de 1883, mais qui semble valable pour tous : « Nous avons un admirable pèlerinage au milieu d’une contrariété perpétuelle de détails » 518 .

L’installation sur place d’assomptionnistes avec la création de Notre-Dame de France permettra au Père Bailly de se concentrer sur l’aspect religieux et la direction spirituelle du pèlerinage, laissant à d’autres l’aspect matériel.

Notes
516.

C’est son dernier pèlerinage puisqu’il meurt l’année suivante. Il est blessé durant la IIe caravane suite à une chute de cheval à Jaffa. Il est obligé de rester près de trois mois à l’hôpital Saint-Louis, soigné par le médecin Sabadini et certainement choyé par les Sœurs de St Joseph !

517.

MAE, Nantes, Jérusalem, A, 122/124, Lettre de Vincent de Paul Bailly au consul d’Angleterre à Beyrouth, le 14 mai 1888.

518.

Vincent de Paul Bailly, Lettres, au Père Picard, le 28 mars 1883, AAV, tome IX, n°2367.