Cette entreprise pèlerine repose sur l’initiative d’un religieux, l’abbé Potard, qui, pèlerin en Terre Sainte à de multiples reprises, décide d’organiser en 1898 des caravanes de pèlerins durant les vacances d’été, période que ne proposent pas encore les assomptionnistes.
L’abbé Potard est né en 1866 à Saint-Barthélémy (aux portes d’Angers), passe son enfance dans la paroisse Saint-Léonard d’Angers, puis adolescent, aide ses parents comme jardinier dans la propriété familiale. Il n’est attiré par l’état ecclésiastique qu’à l’âge de 17 ans, entre au grand séminaire, et termine ses études dans le diocèse de Constantine où il est ordonné prêtre en 1892. Il reste six ans dans ce diocèse, comme vicaire à Bougie, puis à Bône, comme chapelain à Notre-Dame d’Afrique.
En 1898, il met en place l’œuvre de sa vie, l’organisation de caravanes aux Lieux Saints. Il est un habitué de la Palestine pour s’y être rendu à cinq reprises, dont une fois avec la IXe caravane des Pèlerinages de Pénitence en 1890.
Son attachement pour la Terre Sainte est tel qu’il dirige lui-même les 72 caravanes des pèlerinages Saint-Louis, la guerre de 1939 et son décès l’année suivante mettant fin à cette prospère entreprise. Sa devise, « Recte cum fiducia et perseverantia » 656 et ses armes, « une Nef aux voiles déployées voguant sur une mer agitée, avec au premier plan un Palmier robuste aux racines puissamment fixées dans un sol rocailleux, cependant qu’au loin une Etoile brille dans les cieux » 657 sont autant de signes de ce lien très fort avec l’Orient biblique.
L’attachement de l’abbé Potard à la Terre Sainte et à Jérusalem en particulier est encore plus perceptible dans la construction au sein de sa propriété d’une réplique miniature du Saint-Sépulcre 658 . C’est en 1931, qu’il entreprend l’édification de ce monument qu’il veut être le plus fidèle possible à celui de Jérusalem. La volonté de construire une réplique du Saint-Sépulcre, en terre angevine, répond à la volonté de montrer un bout de la Terre Sainte à ceux qui ne peuvent s’y rendre comme l’affirme l’abbé Potard :
« J’ai pensé aux fidèles si nombreux qui ne pourront jamais aller en Terre Sainte. Et j’ai cru les intéresser et servir en même temps la cause de la foi, en édifiant ici, sur une modeste propriété et au fur et à mesure de mes possibilités, la reconstitution très exacte que vous allez voir. Il m’a fallu des années et des années pour l’achever, mais il y a des gens qui sont contents de voir ça » 659 .
L’abbé Potard a effectivement construit un domaine oriental au milieu des terres angevines avec une entrée qui se veut la réplique de la porte de Damas de Jérusalem, des cèdres du Liban et le Saint-Sépulcre d’Angers 660 . Cette réplique particulièrement réussie du lieu où fut crucifié et enseveli le Christ atteste l’attachement sans borne de ce religieux pour la Terre Sainte.
L’origine des pèlerinages Saint-Louis, hormis l’engouement de l’abbé Potard, est à rechercher dans la volonté de la Custodie de Terre Sainte de mettre en place un pèlerinage français concurrent de celui des assomptionnistes, congrégation jugée envahissante et présomptueuse. Le soutien à cette entreprise vient également d’un dénommé Victor Poupin, qui tient un magasin rue de Rennes, spécialisé dans les objets pieux en provenance de Jérusalem. Le manque d’archives ne nous permet pas d’avancer une explication plus fournie sur les liens entre les trois protagonistes des pèlerinages Saint-Louis.
L’absence d’archives concernant le pèlerinage Saint-Louis nous oblige à nous appuyer sur des sources indirectes et d’apporter des conclusions qui ne sont que partielles.
« Marcher droit avec confiance et persévérance ».
P. Georges Lugans, Le Saint-Sépulcre d’Angers, Archives des Servantes des Pauvres, Angers.
Voir annexe, Le Saint-Sépulcre d’Angers.
Ibid.
Le fascicule mis à la disposition des visiteurs du Saint Sépulcre d’Angers décrit ainsi les lieux : « On pénètre dans la propriété de Monseigneur Potard en passant par la « Porte de Damas », porte monumentale, aux deux tours couronnées de créneaux. (…) Au centre de la voûte est reproduit le blason de Monseigneur Potard (…) A droite et à gauche, deux niches vides. L’une abritait la statue de Foulques Nerra [Pèlerin en Terre Sainte au XIe siècle] L’autre niche contenait une statue de Godefroy de Bouillon.
Entrons dans la propriété. [A propos du Saint-Sépulcre] Pour abriter cette reproduction du tombeau du Seigneur tel qu’on peut le voir actuellement dans la basilique du Saint-Sépulcre à Jérusalem, il fallait un monument… D’où la construction de cette rotonde qui, bien sûr, n’a pas les dimensions de celle de la Ville Sainte (38 m de diamètre). Le monument ici construit se compose d’une rotonde couronnée d’une coupole et entourée d’une galerie, ou déambulatoire. L’ensemble a un diamètre de 24m et, à l’intérieur, la coupole s’élève à 22m. (…)
Au dessus de la porte d’entrée se trouve la statue de Pierre l’Ermite. (…) Juste au-dessus de la porte d’entrée est dessinée une croix particulière : (…) C’est la « Croix de Jérusalem ». (…) A l’intérieur de la rotonde, cette « Croix de Jérusalem » est reproduite en divers endroits : sur le sol, sur les piliers, au sommet de la coupole. (…)
Voici, au centre de la coupole l’édicule qui abrite le Saint-Sépulcre. (…) L’édicule construit ici lui est exactement semblable par son aspect et ses dimensions : 8m25 de long, 5m de large et 5m de haut. (…) La dalle du tombeau a été rapportée de Jérusalem. Elle a 12 centimètres d’épaisseur et pèse 600 kilos. Ce sont les chrétiens de Jérusalem qui l’ont polie. Au fond, une petite niche où l’on conserve un fragment du rocher de Gethsémani (…) Toutes les lampes en cuivre viennent de Palestine ».