Une lente acceptation

Au fil des caravanes de l’abbé Potard, une certaine cohabitation tend cependant à s’installer, bon gré, mal gré, même si la rivalité subsiste jusqu’en 1914, et au-delà, puisque les deux organisations reprennent le chemin de la Palestine après la guerre.

Les assomptionnistes semblent très vite prendre conscience qu’il faut accepter la présence d’une autre caravane de pèlerins français, et étudient les possibilités de rebondir à une époque où les effectifs des caravanes assomptionnistes sont à la baisse, où il va falloir se disputer le pèlerin, comme les religieuses se disputent le malade à Jérusalem. Ils en arrivent ainsi en 1910 à s’interroger sur le partage de l’Etoile avec la Revue générale des sciences qui organise des voyages en Orient deux fois par an. Ceci permettrait de limiter les frais d’un navire qui, lorsqu’il n’est pas complet, coûte très cher au comité de pèlerinage. Les caravanes de l’abbé Potard empruntant les lignes des Messageries Maritimes n’ont pas ce problème.

Malgré tout, les pèlerins des deux caravanes sont amenés à se fréquenter à de nombreuses reprises au détour d’un lieu saint à Jérusalem ou en Galilée, d’autant que les dates pour les pèlerinages de printemps et d’été sont sensiblement les mêmes et les rencontres de ce fait fréquentes.

Lors du 28e pèlerinage de pénitence, en août 1904, les deux organisations se retrouvent en même temps au départ de Marseille et fraternisent en toute simplicité : « Le 18 août, à l’heure où l’Etoile levait l’ancre, un autre groupe de 26 pèlerins s’embarquait à bord de l’Equateur, paquebot des Messageries Maritimes. Réunis sous le patronage de Saint-Louis, (…) on fraternisa à diverses reprises pendant le voyage et même dès les débuts. A Notre-Dame de la Garde, aucun prêtre du groupe Saint-Louis n’ayant été désigné pour la messe du pèlerinage, un prêtre de la caravane de Pénitence fut heureux et honoré de remplir cette fonction.

L’itinéraire devait être à peu près le même que celui des pèlerins de la Pénitence » 691

Le bon sens pèlerin semble tout de même primer face aux calculs ou à l’orgueil de la hiérarchie.

Les caravanes de l’abbé Potard, tout en étant concurrentes de celles des assomptionnistes, n’en restent pas moins principalement françaises, la présence de pèlerins étrangers étant minimes. L’arrivée à la fin du siècle de caravanes de catholiques ou protestants européens et américains de plus en plus importantes modifient au contraire profondément l’entreprise pèlerine en Terre Sainte, reléguant les caravanes de l’Assomption au rang de pionnières, tout en gardant cependant le prestige de Notre-Dame de France.

Notes
691.

Jérusalem, AAV, tome I, 1904-1905.