L’Autriche-Hongrie : sur les traces des Pèlerinages de Pénitence

L’Empire de François-Joseph est l’autre grande nation catholique d’Europe après la France et, même si ses liens avec l’Orient sont au XIXe siècle minimes, la présence austro-hongroise en Palestine est avérée dès le milieu du siècle, avec en particulier l’ouverture d’un consulat autrichien à Jérusalem en 1849 693 .

Le premier signe visible de l’implantation de l’Empire de François-Joseph en Palestine, outre un consulat, est la construction d’un hospice pour pèlerins achevé en 1858.

Ce bâtiment est, en dehors de Casa Nova, le premier hospice pour pèlerins et les caravanes françaises, surtout lors des premiers Pèlerinages de Pénitence, y trouvent une hôtellerie fort agréable. La revue Jérusalem fait une description élogieuse de ce bâtiment catholique situé à l’intérieur des murs, le long de la Voie douloureuse :

« L’hospice, qui a un seul étage, est de style roman. Il s’élève au milieu d’un jardin (…) qui est entouré par un mur de 280 mètres de longueur. Au Midi, la Voie douloureuse longe ce mur sur une assez grande étendue et passe devant la porte d’entrée de l’établissement, en face de la IIIe station. (…) De la terrasse de l’hospice on jouit d’un superbe panorama sur la Jérusalem antique dont les maisons couronnées de petites coupoles offrent un coup d’œil agréable et original. (…) Au premier étage se trouvent les chambres des pèlerins de première classe,une salle de bains installée à la moderne et un salon. (…) L’hospice est dirigé par deux prêtres séculiers de l’empire austro-hongrois. A eux incombent le soin des pèlerins et l’entretien de l’hôtellerie. (…) Le soin matériel de l’hôtellerie est confié à cinq sœurs allemandes de la Congrégation de Saint-Charles Borromée (…). Les pèlerins pauvres d’Autriche-Hongrie sont hébergés gratuitement pendant plusieurs jours. Les pèlerins qui en ont le moyen payent chaque jour de 5 à 7 francs de dédommagement » 694 .

Cet hospice autrichien, bien antérieur à Notre-Dame de France, a d’emblée la protection de l’Empereur François-Joseph, pèlerin aux Lieux Saints en 1869. Il reste par la suite très attentif au développement de la Palestine et à la protection des catholiques locaux, en envoyant de nombreuses oboles pour la construction ou l’amélioration des églises de Terre Sainte. Il a aussi le souci comme tout dirigeant d’une grande puissance européenne de préserver et d’accentuer les intérêts de son empire en Palestine.

La présence austro-hongroise n’en reste pas moins marginale, par rapport à la France 695 ou aux pays protestants et orthodoxes puisque, hormis l’hospice de Jérusalem, l’Empire de François-Joseph ne peut se prévaloir que de la protection de l’hôpital de Tantur, située entre Jérusalem et Bethléem. Par contre, un point non religieux mais commercial est à mettre à l’actif de l’empire austro-hongrois : c’est la poste autrichienne créée en 1858, la même année que l’hospice, et qui est le service le plus efficace et le plus sûr pour assurer la circulation du courrier entre l’Europe et l’Orient. Tous les consulats et autres entreprises étrangères passent par la poste autrichienne, signe d’efficacité dans une région où l’acheminement du courrier relève plus de la bonne volonté d’Allah que du bon vouloir des hommes.

Notes
693.

Barbara Haider, Zwischen Anspruch und Wirklichkeit. Kirche und Staat in Österreich und das Heilige Land 1843/49-1917. in Bernhard A.Böhler, Mit Szepter und Pilgerstab - Österreichische Präsenz im Heiligen Land seit den Tagen Kaiser Franz Josephs, dieses Katalogbuch erscheint anläblich der Ausstellung, Wien, 2000.

694.

L’Autriche-Hongrie à Jérusalem, l’hospice austro-hongrois, in Jérusalem, AAV, tome II, 1906-1907.

695.

Tout en étant deux nations catholiques, les liens entre les deux puissances seront souvent tendus, principalement du fait de la France, qui s’appuyant toujours sur les capitulations, s’estime protectrice de tous les lieux catholiques de Palestine, ce que bien sûr refuse l’Autriche.