Plaidoyer pour un sujet dit mineur

La Palestine du XIXe siècle, soit en pleine déliquescence de l’Empire ottoman et avant le coup de tonnerre sioniste, est le plus souvent étudiée par le prisme de la politique, de la diplomatie où se mêlent religion et intérêts nationaux. Henry Laurens a récemment proposé une synthèse qui fait référence sur la place de cette région au temps des empires coloniaux. Nombreuses sont par ailleurs les études sur les questions politiques qui agitent cette région ottomane, l’ingérence des nations européennes et leurs ambitions sur un territoire aux multiples atouts, avec l’intérêt retrouvé des religions pour cette terre sainte.

Notre étude s’inscrit dans une démarche que l’on pourrait qualifier de micro-histoire, l’analyse de sujets le plus souvent considérés comme mineurs et de ce fait largement marginalisés par les historiens. Une étude sur les pèlerinages catholiques français en Terre Sainte au XIXe siècle correspond pleinement à la volonté de mettre en lumière un mouvement quasiment disparu pendant des siècles et de comprendre pourquoi il ressurgit avec force au moment de l’intérêt retrouvé par la chrétienté pour la Palestine. Elle remet aussi en lumière des acteurs qui n’ont guère attiré l’attention.

Le cas des congrégations féminines est particulièrement intéressant car elles ont toujours été négligées, considérées comme « les petites mains » des religieux. Elles sont cependant pour la Palestine les pionnières dans le retour des catholiques en Terre Sainte, à l’image des Sœurs de Saint Joseph, des Sœurs de Notre-Dame de Sion ou des Dames de Nazareth. Il n’existe aucune étude approfondie sur ces institutions et leurs histoires palestiniennes et, même si la plupart de ces congrégations ont du mal à s’ouvrir aux chercheurs, elles n’en restent pas moins des acteurs qui ont compté au moment de l’âge d’or français de la fin du XIXe siècle. Leur histoire reste à faire, et leur influence dans la modernisation de la Palestine et la formation d’élites féminines à évaluer. Nombreuses sont ainsi les pistes de recherche qui restent à explorer autour de la place de la France catholique en Palestine, notamment jusqu’à la Première Guerre mondiale, et sur son rôle dans la transformation de la société.