Conclusion de Section

Au terme de cette présentation du cadre théorique qui enchâsse notre problématique de recherche d’un point de vue politique et territorial, il est donc possible de rappeler les aspects principaux de l’analyse du processus de territorialisation de la régulation économique dans l’agglomération lyonnaise développée par cette thèse.

En s’appuyant sur l’importance des représentations collectives du territoire dans l’aménagement de l’espace et l’action publique territoriale, nous avons déterminé le choix de l’échelle de l’agglomération lyonnaise comme la référence spatiale centrale pour notre étude, entendue au sens du périmètre couvert par la Communauté urbaine de Lyon et ses « dépendances » territoriales en matière de planification urbaine (SD puis SCOT). La dimension politique prime ainsi sur la dimension économique, au gré d’une approche de la régulation économique au niveau local qui est centrée sur le rôle de la puissance publique et non sur les logiques de fonctionnement du système productif lyonnais. La contingence économique occupe cependant une place importante dans notre analyse, dans la continuité de la théorie de la régulation qui confère un rôle déterminant aux effets de contexte historique induits par le fonctionnement de l’économie.

En effet, nous avons vu que le rapport qu’entretiennent les responsables politiques et économiques avec le territoire n’est pas le même selon les périodes. Ce phasage temporel des représentations de la relation entre espace et économie soutient en outre l’hypothèse préalable de notre travail, postulant de la survenue d’un changement d’échelle territoriale dans l’organisation de la régulation économique, parallèlement au basculement dans un régime de crise (voir supra, Section 1).

Le processus de territorialisation de la régulation économique s’inscrirait ainsi dans un vaste mouvement d’avènement de nouvelles politiques locales, et correspondrait à la constitution d’un champ nouveau d’action publique consécutivement au transfert de charge et au désengagement opérés par l’Etat suite au changement de contexte économique d’ensemble. Celles-ci mobilisent notamment des référentiels et des approches méthodologiques d’un nouveau type, qui remettent en question les modes de gestion classique de l’action publique et érigent les territoires locaux – agglomérations urbaines en particulier – en véritables scènes de régulation économique et politique à part entière. Les nouvelles politiques économiques territorialisées donnent ainsi à voir une certaine reconfiguration des systèmes d’acteurs locaux et une profonde réorganisation des rôles entre la sphère publique des collectivités et la sphère économiques privée.

Pour étudier les modalités de gouvernement et de pilotage de la régulation économique territorialisée, il est alors possible de mobiliser la notion très galvaudée de gouvernance. Elle peut en effet constituer une grille d’analyse des jeux de pouvoir, particulièrement bien adaptée aux politiques publiques locales et au champ de l’action économique, en raison de ses liens très intimes avec l’avènement de la rhétorique libérale. Celle-ci accompagne le basculement de l’économie mondiale dans un régime de crise et justifie l’abandon de l’échelon étatique pour privilégier une organisation de la régulation plus proche des réalités contrastées du terrain local.

Il s’agit ainsi d’envisager les considérations méthodologiques et politiques de la conduite de la politique économique lyonnaise de façon conjointe. Cette approche globale permet au final d’ouvrir l’analyse du processus de territorialisation de la régulation économique à Lyon sur le problème des limites d’une intégration de la culture et des intérêts des entreprises par les pouvoirs publics locaux, notamment vis-à-vis de la représentation démocratique et de la poursuite de l’intérêt général.