2- L’intégration de la planification territoriale locale dans la politique nationale d’aménagement au service du développement économique

L’aménagement spatial et la planification territoriale sont mobilisés par l’Etat pour faciliter et accompagner la politique volontariste et incitative en faveur du développement économique national. Ils constituent un moyen concret, quoique indirect, de concourir à la réalisation des objectifs du Plan et de la politique économique, en fournissant un cadre réglementaire et technocratique, tant pour l’intervention des collectivités locales dans la régulation économique que pour le comportement spatial des entreprises.

Le développement économique de l’agglomération lyonnaise se réalise en même temps que se dessinent les documents de planification territoriale successifs, de la fin des années 1950 au début des années 1970. Bien qu’ils soient élaborés à des échelles géographiques différentes, le PDGU, le PADOG et le SDAM permettent de saisir la manière dont la régulation territoriale de l’économie se matérialise dans l’agglomération lyonnaise. L’analyse de leur contenu révèle l’affirmation progressive du double principe de l’exurbanisation des activités industrielles et de la construction d’une métropole tertiaire autour de Lyon, essentiellement porté par les services de l’Etat bien que partiellement relayé par les autorités politiques de l’agglomération et les structures de représentation des intérêts économiques locaux.

Les deux premiers documents de planification territoriale établis pour l’agglomération lyonnaise sont en effet fortement imprégnés de l’empreinte industrielle locale, tant au niveau des études préparatoires qu’au niveau des orientations spatiales qu’ils proposent pour le développement urbain et industriel local. Les structures de représentation des intérêts économiques locaux participent activement à leur élaboration, aux côtés des techniciens de l’Etat et de la Ville de Lyon. Les municipalités de Lyon et Villeurbanne sont consultées dans le cadre du GU et délibèrent pour approuver les plans, assurant un rôle de coordination des études avec une certaine liberté conférée par les autorités centrales. L’influence des travaux d’expertise économique du patronat lyonnais est déterminante la délimitation des échelles territoriales de référence de l’ensemble lyonnais et sur la conception d’une planification spatiale fonctionnaliste conduite à l’échelle de l’agglomération.

La réflexion territoriale est cependant menée plus en termes de localisation des fonctions dans l’espace que de stratégie de développement économique pour l’agglomération. Cette période de forte expansion économique demande avant tout de parer au plus pressé dans la répartition des fruits de la croissance et dans l’ordonnancement des équipements sur le territoire, mais pas encore de positionner l’agglomération lyonnaise sur le marché des villes, par rapport à d’autres métropoles françaises ou étrangères.

En revanche, le schéma de l’OREAM est beaucoup plus marqué par la conception stratégique des services centraux de l’Etat en matière de développement économique et d’aménagement du territoire. Il prévoit en effet de hisser l’ensemble lyonnais au rang de métropole d’équilibre, traduisant le renforcement de la mainmise de l’Etat sur la destinée économique de l’agglomération lyonnaise et l’influence de la logique de développement industriel et tertiaire nationale sur la conduite de la régulation économique territoriale. Les acteurs locaux, élus et représentants des intérêts industriels, sont en grande partie exclus du processus décisionnel, du moins confinés dans un simple rôle de consultation pour avis.

La problématique de la localisation des activités tertiaires devient centrale, tandis que la thématique industrielle est redéfinie et calibrée en fonction des enjeux nationaux et internationaux de la réorganisation des structures productives françaises. Le schéma instaure un système territorial d’intervention dual, organisé à partir de deux dimensions spatiales emboîtées : la Région Urbaine de Lyon, où s’exprime le projet métropolitain des services de l’Etat, et l’agglomération lyonnaise, correspondant au périmètre institutionnel de la COURLY (voir infra, Section 2).