Répartition fonctionnelle et hiérarchisée des activités économiques sur le territoire

Le SDAM pointe la nécessité pour la puissance publique d’agir sur les conditions du développement et sur l’environnement territorial des entreprises, en préparant des structures d’accueil – « une politique réaliste des zones industrielles » (OREAM, 1971, p.210) – pour recevoir les transferts ou les créations d’entreprises dans la métropole. Il préconise l’aménagement d’une offre diversifiée de surfaces d’activités, qui puisse faciliter et améliorer l’inscription territoriale de l’expansion économique locale. Une batterie d’aides financières, conditionnées par l’inscription territoriale des entreprises, accompagne la politique d’aménagement étatique et la réalisation des zones industrielles. Elles permettent de confirmer le choix technocratique de l’orientation tertiaire et des industries légères pour l’agglomération lyonnaise, et le principe de l’exurbanisation des activités industrielles jugées stratégiques (pétrochimie, sidérurgie) à l’échelle de la RUL, c’est-à-dire en dehors de l’agglomération lyonnaise, imposés par les services centraux de l’Etat.

Le cœur de l’agglomération lyonnaise (Lyon et Villeurbanne) est destiné à accueillir le centre directionnel de la métropole, c’est-à-dire les activités économiques tertiaires à vocation métropolitaine et à forte valeur ajoutée : les principales administrations départementales et régionales, les centres de décision de la vie économique (notamment les sièges sociaux d’entreprises) et certaines catégories de services supérieurs pour les entreprises et les particuliers. Le concept de centre directionnel métropolitain est issu des études d’armature et de développement urbain conduites par les services centraux de l’Etat (DAFU du ministère de l’Equipement et GCPU) au milieu des années 1960. Il est importé à Lyon depuis Paris par la technocratie étatique.

Il se greffe sur le projet de restructuration du centre de Lyon prévu par le PADOG, en redéfinissant complètement le contenu et l’orientation fonctionnelle du programme de rénovation urbaine de la Part-Dieu, élaboré par les services de l’urbanisme municipaux. Ce dispositif s’accompagne du changement d’affectation de nombreux immeubles anciens de logements transformés en bureaux dans le centre traditionnel de la Presqu’île, ainsi que dans les quartiers de la rive gauche du Rhône, voisins de la Part-Dieu (Brotteaux, Guillotière). Le périmètre central de l’agglomération lyonnaise est ainsi appelé à devenir le pôle économique tertiaire dominant de la métropole tripolaire, et la Part Dieu le nouveau quartier d’affaires et centre directionnel de Lyon (voir infra).

La proche périphérie lyonnaise et certains quartiers péricentraux de Lyon et de Villeurbanne sont voués à l’accueil des autres activités économiques considérées comme centrales : les services courants aux particuliers ou aux entreprises et les activités de production industrielle peu nuisantes (textile, habillement, montage), qui ne nécessitent pas obligatoirement une localisation dans le centre de la ville. Outre la plupart des petits établissements industriels, sont ainsi visés les centres de recherche, certains établissements universitaires, une grande partie des établissements tertiaires de traitement de l’information ou de gestion (les « usines à papier »), et tous les services administratifs et financiers qui n’ont pas besoin de contacts fréquents avec le public, sans oublier les équipements collectifs régionaux comme le nouveau palais de la Foire, la gare routière, le commerce de gros et les grandes surfaces commerciales.

L’accueil de ces activités industrielles et tertiaires, dont beaucoup se desserrent depuis le centre de la ville, est prévu dans des zones d’activités nouvellement créées ou modernisées dans l’Est de l’agglomération, bien desservies par les infrastructures de transport, notamment à Bron et à proximité du nouvel aéroport de Satolas. De manière plus générale, les activités économiques « banales », en grande partie induites par les besoins de la population (commerces, services aux particuliers, artisanat, petites unités de production industrielle…) sont localisées dans le tissu urbain, un peu partout dans l’agglomération : le SDAM ne précise pas leur localisation exacte, qui est laissée à l’appréciation des futurs SDAU et POS prévus par la LOF de 1967 et des plans de détail à l’échelle des quartiers.

Les activités industrielles classiques recherchent majoritairement des surfaces de 1 à 10 ha, la proximité des autres entreprises et des lieux d’habitation des ouvriers. Leur localisation est donc prévue à proximité immédiate de la zone centrale de l’agglomération lyonnaise et de manière regroupée au sein de zones industrielles équipées, afin de limiter les effets de nuisance dans l’espace en les isolant par rapport aux zones d’habitation, et de faciliter la mise en place de services et d’équipements communs. Les nouvelles zones industrielles de taille moyenne (100 à 200 ha), qui sont aménagées dans les communes de banlieue lyonnaise par les acteurs locaux, leur sont donc logiquement destinées : Neuville - Genay au Nord, Saint-Genis-Laval au Sud-ouest, Saint-Priest et Vénissieux-Corbas au Sud-est… (voir infra, Section 2).

Enfin, les secteurs périphériques, situés en dehors du périmètre de l’agglomération lyonnaise, doivent accueillir la majeure partie des nouvelles activités industrielles lourdes et nuisantes (pétrochimie, sidérurgie), qui nécessitent de vastes surfaces d’implantation. Les espaces qui leur sont destinés sont greffés à proximité d’une des centres urbains secondaires de l’aire métropolitaine comme Vienne, Villefranche-sur-Saône et Péage-de-Roussillon, mais également en rase campagne, à proximité des futures villes nouvelles projetées pour canaliser et limiter l’extension démographique et spatiale des villes principales. Il s’agit de la Plaine de l’Ain autour de Méximieux et Ambérieu au Nord-est de Lyon (zone industrielle de Saint-Vulbas – Loyettes) et de l’Isle d’Abeau dans la plaine du Dauphiné, à l’Est. Leurs importantes réserves foncières sont destinées aux activités industrielles qui se desserrent depuis les agglomérations urbaines de la région ou qui sont décentralisées depuis Paris (voir infra).

Les orientations spatiales du SDAM consacrent donc le projet des services de l’Etat de sortir la grande industrie du périmètre de l’agglomération lyonnaise. Les activités productives lourdes, considérées comme motrices et porteuses de développement économique pour le territoire par la politique nationale d’expansion économique et d’aménagement du territoire, sont mises à l’écart du giron industriel lyonnais, pourtant propice à leur installation et à leur développement. La base économique lyonnaise repose pourtant en grande partie sur l’existence d’un puissant secteur chimique, mais le développement de ce complexe est projeté au-delà des limites de l’agglomération à partir de pôles de croissance régionaux. En revanche, l’agglomération lyonnaise polarise les activités tertiaires, conformément à l’orientation définie par la politique des métropoles d’équilibre.