En dépit de la mise à l’écart progressive du Comité d’expansion et de la réorganisation profonde du système de gestion territoriale de l’agglomération opérée par l’Etat, qui limitent fortement le pouvoir d’intervention des structures de représentation des intérêts économiques dans la conduite de la régulation économique et de la politique urbaine, le patronat lyonnais conserve une certaine capacité d’influence sur les autorités politiques locales durant les Trente Glorieuses. Les relations étroites très importantes qui existent au sein du système d’acteurs lyonnais, notamment entre la sphère politique et la sphère économique, permettent à la fois aux élus locaux d’exercer une forme de contrepoids politique face à la domination étatique, et à certains responsables patronaux de défendre ou promouvoir les intérêts de leurs entreprises auprès des responsables de la COURLY, malgré l’arrivée de nouveaux responsables économiques appartenant aux grands groupes industriels extra locaux.
Déjà sous le « règne » d’E. Herriot 85 , des liens très forts unissent les dirigeants politiques et les dirigeants économiques de Lyon. Le contrat de confiance existant entre ces deux groupes, qui s’interpénètrent parfois au gré des alliances familiales (Sauzay, 1998), explique d’ailleurs largement la stabilité et la longévité des équipes politiques municipales lyonnaises. L. Pradel, qui succède à E. Herriot en 1957, s’intéresse peu aux questions relatives à l’économie et à son développement, à l’image de son homologue marseillais (G. Defferre) à la même époque (Morel, Sanmarco, 1985), du moins il le fait avec une certaine distance, c’est-à-dire par personnes interposées.
Il délègue en effet la gestion des questions économiques à ses proches collaborateurs ou à ses adjoints, souvent bien insérés dans les milieux d’affaires locaux, confortant et renouvelant ainsi un système de clientélisme local classique et solidement établi. Les représentants patronaux et les chefs d’entreprises restent majoritairement à l’écart des responsabilités politiques, mais ils bénéficient d’un accès direct à la sphère décisionnelle municipale grâce à des réseaux d’interconnaissance solides et actifs (Angleraud, Pellissier, 2003).
A la fin des années 1960 toutefois, les liens traditionnels tissés entre les élus locaux et les représentants de l’économie lyonnaise se distendent quelque peu, obligeant notamment le patronat industriel et celui du BTP à repenser leur position vis-à-vis des orientations de la politique urbaine et du pouvoir politique dans l’agglomération lyonnaise.
Edouard Herriot est maire de Lyon de 1905 à 1957, avec une interruption entre 1941 et 1945 imposée par le gouvernement de Vichy.