2- L’acculturation managériale des acteurs lyonnais

La création de l’ADERLY et la mise en œuvre de la politique économique lyonnaise par les acteurs locaux traduit un changement profond de mentalité au sein du milieu politique lyonnais, habitué à se tenir relativement à l’écart des affaires économiques. Dans la seconde moitié des années 1970, le basculement de l’économie mondiale dans un régime de crise conforte les autorités politiques de l’agglomération dans la volonté de se saisir des questions de régulation économique sur le territoire local, du moins de façon indirecte par le biais de l’aménagement spatial et de la planification.

Le cadre référentiel de la politique économique est profondément renouvelé (voir supra) et l’Etat modifie progressivement sa position vis-à-vis des acteurs et des contextes locaux, en se désengagement de la conduite de l’intervention économique au niveau local. Les grandes orientations stratégiques de la politique nationale s’estompent au profit d’interventions plus ponctuelles et réservées aux zones en plus grande difficulté économique que les grandes villes métropolitaines. Une approche plus libérale et pragmatique de la régulation économique et territoriale se dessine ainsi.

Le partenariat politique et institutionnel avec les organismes patronaux permet aux élus et techniciens communautaires de renforcer leur autonomie d’action par rapport au joug de l’Etat et de s’ouvrir aux problématiques de développement et aux méthodes issues du monde des entreprises, notamment par l’intermédiaire des bras exécutants de la COURLY (SERL, ATURCO). La collaboration technique étroite entre acteurs économiques et pouvoirs publics locaux permet en outre le déploiement d’une action économique locale plus en phase avec les besoins et les intérêts des entreprises, plus qualitative et pragmatique, mieux adaptée aux enjeux de développement propres de l’agglomération lyonnaise.

Le contexte à en effet des répercussions très importantes sur le comportement des entreprises et des investisseurs au niveau national et dans l’agglomération lyonnaise. Des usines ferment, des établissements sont délocalisés et le territoire local se trouve de plus en plus en position de concurrence avec d’autres métropoles françaises et européennes. La manière partenariale dont est conduite la politique de régulation économique territoriale dans l’agglomération et l’orientation qualitative de l’intervention, inspirée des nouvelles méthodes de management et de marketing anglo-saxonnes, apparaissent comme des solutions d’adaptation de l’action publique aux nouvelles contraintes du régime économique, marqué par la stagnation de la croissance et l’augmentation des logiques de concurrence.

Les acteurs lyonnais, grâce à l’assistance technique apportée par des bureaux d’études parisiens à la SERL et à l’ADERLY, s’organisent afin de développer leur capacité d’expertise immobilière dans le domaine tertiaire. Ils adoptent une stratégie d’action inédite à Lyon pour impulser le développement des activités tertiaires, beaucoup plus qualitative et innovante que celle déployée jusqu’à lors pour maîtriser le desserrement des activités industrielles. Leur intervention s’opère essentiellement sur des aspects de l’action publique économique relativement novateurs, tels que le marketing, la gestion commerciale et la promotion immobilière, selon une approche pragmatique, globale et intégrée de la problématique du développement tertiaire.

La gestion du développement tertiaire de l’agglomération lyonnaise et l’adaptation de l’action économique naissante au nouveau contexte de crise marquent donc un tournant méthodologique et politique dans la manière dont s’opère la régulation économique et territoriale au sein du système d’acteur local. Il est largement initié par le positionnement stratégique et les travaux de prospection et de promotion territoriale de l’ADERLY. Il est également soutenu par les bureaux d’études de la CDC, qui interviennent aux côtés de la SERL lors de la mise en œuvre du centre directionnel de la Part Dieu.