II – Le processus de réappropriation politique de l’impératif économique

Avec le désengagement de l’Etat central face au nouveau contexte de crise, ce sont les acteurs publics locaux qui sont amenés à prendre en charge la question de la régulation économique territoriale : le rôle des municipalités et de la Communauté urbaine de Lyon devient primordial dans le domaine de l’intervention économique. Ils sont cependant limités dans leur capacité de saisine directe et immédiate par différents facteurs : compétences légales d’action relativement restreintes dans le champ de l’économie, manque de savoir-faire lié à la domination technique en matière d’expertise exercée durant les Trente Glorieuses par le pouvoir central, dissensions idéologiques au sein de la classe politique concernant la légitimité et le bien fondé d’un intervention publique locale dans le domaine économique, rôle très important joué par les structures locales de représentation des intérêts économiques en la matière, qui occupent les premières l’espace laissé vacant par les autorités étatiques (voir supra, 2ème Partie, Section 3).

L’agglomération lyonnaise constitue l’archétype de la ville française qui développe une véritable stratégie politique entrepreunariale (Bardet, Jouve, 1999), au gré de l’instrumentation de la thématique du développement économique par l’un de ses dirigeants au tournant des années 1980 et 1990, à des fins de légitimation électorale et surtout de pouvoir politique. Cette dynamique d’intégration de l’impératif économique par les autorités publiques locales de l’agglomération est renforcée et poursuivie par les exécutifs politiques successifs. La rhétorique économique devient ainsi le référent central des politiques urbaines dans la métropole lyonnaise.

La territorialisation de la régulation économique au niveau local peut également se comprendre comme un processus d’inscription de la politique économique dans les particularités organisationnelles et fonctionnelles du territoire local : elle est un prétexte à la définition d’un nouveau périmètre pertinent de gouvernement local, ainsi qu’à la remise en question des modes de régulation politique et économique existants, au nom de l’objectif prioritaire du développement économique. Elle correspond aussi plus largement à une mise au service de l’enjeu de compétitivité économique et d’attractivité territoriale de nombreux champs d’action publique, comme la culture ou le tourisme.