2- Anticipation d’une compétence attendue (1989-1991)

L’action économique des services de la COURLY est très indirecte dans les années 1980 et s’inscrit en complémentarité des actions de promotion territoriale, de développement technopolitain et d’internationalisation de l’ADERLY (voir infra, Section 3). Elle passe essentiellement par l’amélioration du savoir-faire des services communautaires dans le domaine de l’aménagement spatial et de l’urbanisme opérationnel (voir infra, Section 2). L’organisation progressive des services techniques communautaires dans le domaine du développement économique local à partir de 1989 permet cependant aux exécutifs successifs de la COURLY de construire une compétence économique spécifique en interne, parallèlement à la construction du projet politique.

Une Cellule Economie est en effet instituée en 1989 au sein du service des Activités économiques (Département du Développement). Cette création dénote un nouveau volontarisme au sein de l’organisme communautaire en matière d’intervention économique, directement lié à l’arrivée de l’équipe de M. Noir à la tête de l’exécutif (voir supra). Elle est placée sous la responsabilité des vice-présidents à l’urbanisme et aux activités économiques 243 .

Sa mission est de mettre en œuvre les objectifs de développement économique définis pour l’agglomération, malgré l’absence de compétence légale de la COURLY en ce domaine. Cette mission économique exercée sans légitimité institutionnelle passe donc essentiellement par une meilleure connaissance du système productif local (recensement des bases de données existantes et listage des principaux secteurs d’activités représentés sur le territoire), capable de renforcer la capacité d’expertise économique des services communautaires. Elle participe également à plusieurs groupes de réflexion, constitués pour examiner les conditions de mise en place d’observatoires et de dispositifs d’études particuliers, en lien avec le monde des entreprises (conjoncture économique, marché immobilier, tableau bord des filières d’activités locales).

En 1990, la Cellule Economie devient la Mission Développement économique (MDE), au gré de la réorganisation du département de Développement urbain destinée à adapter la technostructure communautaire aux nouvelles orientations politiques stratégiques du mandat Noir, fondées sur l’engagement de grands projets structurants 244 et le développement d’une logique plus pragmatique de mission pour leur mise en œuvre (voir infra, Section 2). Elle participe dès lors au groupe de travail chargé d’élaborer un Schéma Directeur d’Urbanisme Commercial (SDUC) et de préparer la 5ème enquête ménages aux côtés de la CCIL, de la Chambre des Métiers et de l’AGURCO, s’insérant un peu plus profondément dans le système d’acteurs local de la régulation économique.

Elle s’implique également dans le volet opérationnel du relogement des entreprises chassées par les grands projets d’aménagement ou d’urbanisme et poursuit le développement de son expertise technique et économique sur les projets d’urbanisme (réalisation des études de faisabilité économique en amont des opérations d’urbanisme lancées dans l’agglomération, y compris sur les questions relatives au commerce, notamment dans les quartiers en DSU). Elle se penche de façon plus globale sur la mise en cohérence des actions de la COURLY, au nom de l’impératif stratégique du développement économique de la métropole.

La MDE participe enfin aux travaux de la RUL comme représentant de la COURLY sur les questions économiques à partir de 1990, au sein des groupes de travail Parcs d’Affaires, Observatoire Economique, Plateforme Logistique et Stratégie Economique. Elle occupe ainsi toujours plus d’espace dans le système d’acteurs local du développement économique, à mesure qu’elle clarifie ses domaines d’intervention (urbanisme économique et urbanisme commercial), identifie ses priorités d’actions (analyse et amélioration de l’offre de sites d’accueil de l’agglomération, prise en charge de la réflexion sur le maintien et le développement des activités économiques en milieu urbain dans le cadre de la révision du POS) et met en place les outils nécessaires à la définition des orientations stratégiques de la politique communautaire (observatoires de l’immobilier d’entreprises et du commerce, fichiers des terrains industriels).

Si le volet « accueil des entreprises » est encore largement géré par l’ADERLY au tournant des années 1990 (voir infra, Section 3), la nouvelle cellule communautaire dédiée aux questions économiques se met en relation étroite avec les techniciens de l’association pour s’insérer dans la conduite de la politique d’action et participer directement aux contacts avec les entreprises à la recherche d’un site d’implantation. Elle offre son assistance dans la proposition de sites aux sociétés candidates dans l’agglomération et la recherche de nouveaux lieux d’implantation potentiels. Elle se lance en effet dans des travaux préparatoires concrets pour la définition d’une offre de sites d’activités dans l’agglomération lyonnaise, directement portée par les services communautaires : diagnostic, prospective, propositions de création d’une offre nouvelle en termes de capacité, de différenciation, de qualification, de répartition géographique des sites, mais aussi de services aux entreprises, d’environnement et de qualité des sites.

La MDE intervient donc au début des années 1990 dans un large domaine économique tertiaire, industriel et commercial, en lien direct avec les questions d’urbanisme en raison de l’ambiguïté de son existence, non légitimée par une compétence d’action officielle de l’EPCI dans le champ de l’économie. Elle fait autant office d’observatoire et de lieu de construction d’une première expertise économique au sein de l’appareil communautaire, que de service d’urbanisme et d’études produisant des diagnostics et des propositions pour la préparation du volet économique des opérations d’aménagement et des documents de planification. Elle se positionne également de plus en plus comme une structure d’accueil, d’orientation et de conseil pour faciliter l’implantation des entreprises dans l’agglomération.

Elle tend ainsi à empiéter sur les compétences et missions d’accueil et de proposition de sites d’implantation aux entreprises dévolues à l’ADERLY, mais aussi sur certaines tâches assurées jusqu’alors par l’AGURCO (expertise, observatoire, réflexions croisées avec la problématique de la planification territoriale), voire même par certains services de la COURLY (urbanisme opérationnel, aménagement). A partir de 1992, son existence est enfin officiellement légitimée par la nouvelle compétence de développement économique attribuée par la loi ATR : elle peut dès lors prendre en charge directement la fonction d’accueil des entreprises en lieu et place de l’ADERLY et se charger de la réalisation et de la mise en valeur de l’offre de sites d’implantation sur le territoire.

Jusqu’à 1998, la MDE du Grand Lyon gère ainsi l’offre de sites d’accueil pour les entreprises de l’agglomération (observatoire immobilier et foncier, industriel et tertiaire, développement du potentiel d’offres aménagées publiques en ZAC et réhabilitation des ZI de première génération), ainsi que l’instruction des implantations commerciales dans le cadre du SDUC. Elle contribue activement à l’élaboration et à la mise en œuvre du volet économique des documents d’urbanisme (POS, SD), et gère la maîtrise d’ouvrage des projets urbains et des opérations d’urbanisme à vocation économique (voir infra, Section 2).

Notes
243.

H. Chabert et P. Voegel.

244.

Périphérique Nord, Cité Internationale, Manufacture des Tabacs, Boulevard de l’Europe, Aménagement des espaces publics centraux.