3- Limites politiques de l’intégration de l’intérêt des entreprises par le Grand Lyon

La prise de contrôle du système de gouvernance économique par le Grand Lyon se traduit par l’intégration du portage de l’intérêt des entreprises par les services économiques de l’organisme communautaire, c’est-à-dire par la puissance publique locale. Elle se manifeste également par une tentative de fédérer la multiplicité des acteurs impliqués dans la régulation économique territoriale sous la bannière unique des pouvoirs publics de l’agglomération lyonnaise et par une certaine relégation des organismes patronaux au simple rang de sous-traitants ou d’exécutants des actions portées au niveau politique par le Grand Lyon. La CCIL se trouve en particulier quelque peu affaiblie par cette nouvelle situation, voire même remise en question dans sa légitimité à intervenir en matière de développement économique local (voir supra).

L’intégration de l’intérêt des entreprises par le Grand Lyon pose également plusieurs problèmes, en raison de son statut d’établissement public de coopération intercommunale au service de la poursuite de l’intérêt général et de ses prérogatives d’action publique couvrant d’autres champs et d’autres finalités que le seul développement économique. Ce dernier occupe désormais une place centrale et directrice parmi les politiques urbaines (voir supra, Section 1), mais il s’avère être parfois en contradiction avec les autres domaines de l’action publique locale comme l’urbanisme, l’aménagement spatial, la préservation du patrimoine ou la protection de l’environnement.

Plus largement, l’impératif de développement économique, du moins dans sa dimension dominante d’exacerbation des logiques de concurrence et d’attractivité entre les territoires métropolitains, correspond essentiellement au point de vue des acteurs économiques privés que sont les entreprises, mais pas forcément aux intérêts de l’ensemble de la société locale (habitants, citoyens, usagers, etc.). Il est cependant indissociable de l’idéologie néolibérale qui se généralise dans les sociétés contemporaines et relève d’un parti pris politique en faveur des lois du marché. Il tend ainsi à s’imposer sur les politiques urbaines parce que les pouvoirs publics d’agglomération font le choix de privilégier l’intérêt des entreprises par rapport à celui de la population locale, qui intègre certes en partie celui des acteurs économiques, mais ne peut pas se résumer à celui-ci. L’intégration de l’intérêt des entreprises par le Grand Lyon pose donc un problème démocratique nouveau, qui peut remettre en question la légitimité et la capacité de la puissance publique locale à garantir l’intérêt général.