La première mention d’un groupe sillonniste lyonnais d’envergure dans la revue Le Sillon date de 1905 22 . Le passage de Marc Sangnier à Lyon, le 20 décembre 1905, sembla donner l’élan nécessaire à son officialisation. La déclaration d’association en préfecture n’intervint cependant que le 6 mars 1908. La fondation tardive du Sillon lyonnais, et de tous les sillons locaux du sud-est de la France, par rapport aux autres Sillons de province qui s’étaient organisés entre 1901 et 1904, s’expliquait par la concurrence qu’exerçaient dans la région la Chronique sociale et ses cercles d’études. Christian Ponson a montré que les années 1900-1904 furent pour la Chronique une période d’affirmation 23 qui vit la réflexion sociale prendre le pas sur la politique militante. Les groupes d’études affiliés à la Fédération du Sud-Est se multipliaient dans le Rhône, la Loire, l’Isère et attiraient les jeunes catholiques des milieux populaires, tout en fournissant un encadrement qui permettait d’organiser la formation intellectuelle de leurs membres 24 . Jeanne Caron invoque cependant la présence à Lyon d’un « Sillon local », formation limitée à la ville 25 . Dans cet ordre d’idée, Christian Ponson prévient ses lecteurs contre l’idée d’un strict cloisonnement des mouvements catholiques en ce temps d’organisation. « Quelle que soit l’intention de la Chronique de se distinguer des autres mouvements, on doit mentionner que pendant toute cette période, les groupes – groupes d’études, groupes paroissiaux […] s’affili[aient] à tel mouvement, ou à plusieurs, au gré des circonstances. » 26 Cette réalité, ajoutée à « la proximité d’intention et de comportement » 27 qu’entretenait la Chronique avec le Sillon, nous permet de comprendre comment une présence sillonniste pouvait se développer au contact des groupes d’études affiliés à la Chronique. Le succès rencontré par le mouvement lyonnais expliquait quant à lui la difficulté d’implantation, sur le même terrain social, de groupes sillonnistes suffisamment étoffés. La volonté du Sillon central changea les données.
Les débuts du Sillon lyonnais ont été étudiés par Gatien Goyard, Le Sillon dans le Rhône (1904 – 1910), op. cit., dans une première partie consacrée à « La difficile naissance du Sillon dans le Rhône. 1904 – 1905 ». Les archives locales lui ont permis de compléter les quelques remarques de Jeanne Caron sur le Sillon de Lyon incluses dans le chapitre sur les Sillons de province. Cf. J. Caron, Le Sillon et la démocratie chrétienne, op. cit., p.. Christian Ponson avait déjà enrichi ces informations grâce à l’étude des papiers conservés à la Chronique Sociale et des Archives de l'Archevêché de Lyon, pour écrire les pages destinées à expliquer les relations entre la Chronique et le Sillon. Cf. C. Ponson, Les catholiques lyonnais et la Chronique sociale, op. cit., p. 153-157 surtout. J’ai utilisé ces travaux pour replacer les sillonnistes qui intéressent mon sujet dans le contexte de l’histoire du Sillon lyonnais.
Voir C. Ponson, Les catholiques lyonnais et la Chronique sociale, op. cit., Chapitre V « Les œuvres de l’époque de la démocratie chrétienne : l’affirmation de la Chronique (1900-1904) », p. 69-84.
Sur les cercles d’études de la Loire, voir Jean Nizey, « Les cercles d’études de jeunes gens dans la région stéphanoise », in J.-D. Durand, B. Comte, B. Delpal, R. Ladous, C. Prudomme (dir.), Cent ans de catholicisme social à Lyon et en Rhône-Alpes – La postérité de Rerum Novarum, op. cit., p. 323-342 et du même auteur, « Jeunes sillonnistes de la Loire : le Sillon izieutaire », in Gérard Cholvy, Bernard Comte, Vincent Feroldi (dir.), Jeunesses chrétiennes au XXe siècle, Paris, Les Editions ouvrières, 1991, 174 p., p. 31-44.
J. Caron, Le Sillon et la démocratie chrétienne, op. cit., p. 227.
C. Ponson, op. cit., p. 79.
C. Ponson, op. cit., p. 151.