Partie II : Résultats et bilan

Chapitre VI : Synthèse des résultats

6.1. Synthèse des analyses et interpretations des entretiens pour le sous-groupe 1 - 4

En résumé, les points suivants peuvent être mis en évidence :

  • Entretien n° 1
  1. L’établissement et l’« espace public » constituent les deux espaces de travail articulés décrits dans l’entretien n° 1 ; le domicile de l’informateur n’est pas mis en évidence en tant que lieu significatif de l’activité professionnelle.
  2. En conformité avec la double dimension spatiale, la temporalité du travail personnel est donc, avant tout, binaire : le temps investi dans l’« espace public » prépare à l’accomplissement du service d’enseignement et des tâches éducatives dans l’établissement ; un temps complémentaire d’échanges avec les pairs renforce la pertinence de la démarche individuelle. Dans tous les cas, la quotidienneté rythme l’activité. La rationalité de type axiologique semble jouer, ici, un rôle marquant.
  3. C’est à l’aune d’un crible qualitatif que l’informateur entend évaluer son activité : le souci de l’autre, sur le plan de la responsabilité éducative en particulier, est donc manifeste. Dans la sphère du travail personnel, la perspective didactique s’en trouve reléguée à un plan secondaire, à l’avantage, déclaré, de la considération pour un destinataire aux multiples visages, puisque l’informateur emploie pour le désigner, presque indifféremment, plusieurs dénominations.
  4. Dans cette approche qui se veut exhaustive, au détriment d’une clarté dans la position personnelle, nous pensons pouvoir lire la trace d’un choix dicté par une rationalité de type téléologique. Cependant, il ne nous est pas possible de déterminer avec suffisamment de fiabilité le type de but poursuivi : but pragmatique, à court-terme, la validation de l’année PLC2, d’autant mieux atteint que l’ensemble des normes de la profession seraient embrassées avec opiniâtreté ? But plus personnel à moyen-terme, de réalisation de soi par l’établissement d’une relation équilibrée entre les valeurs personnelles (éthiques) et les normes professionnelles ?
  5. La rupture affichée avec le cycle antérieur universitaire / académique alimente à la fois notre position quant à l’éventuelle pertinence de la rationalité téléologique, et l’existence du rôle éventuel joué par la rationalité cognitive dans les choix revendiqués par l’informateur : cette rupture pourrait avoir été causée par l’adhésion à de nouvelles théories ou à des connaissances de statut plus spécifiquement professionnel, partagées avec les pairs ou acquises en formation
  • Entretien n° 2
  1. L’espace de travail personnel se découpe en deux entités : le domicile de l’informateur et l’établissement où il a été affecté pour l’année PLC2. Le premier de ces deux espaces est nettement favorisé, d’après les indicateurs temporels auxquels il est fait référence. Nous y lisons la présence d’un choix dicté par une rationalité de type utilitaire.
  2. Le temps passé dans l’établissement fait l’objet d’une double évaluation : quantitative, lorsqu’il est question des heures contraintes par les aléas de l’emploi du temps ; qualitative, quand l’informateur mentionne les échanges avec ses collègues. La volonté de partager des normes ou des valeurs professionnelles, et la préférence affichée pour le travail à domicile semblent éclairer cette considération différenciée.
  3. La rationalité axiologique semble présente dans le choix suggéré ci-dessus. Nous ne retenons pas, en l’occurrence, l’hypothèse d’une influence téléologique, dans la mesure où l’informateur semble s’affirmer, d’ores et déjà, comme un pair parmi les pairs : son avis n’aurait pas moins de valeur que celui de son interlocuteur, il prétend pouvoir apporter des idées novatrices.
  4. Le caractère manifestement chronologique des procédures à respecter dans l’élaboration de la production personnelle complète les caractéristiques temporelles de la « scène du travail personnel » qui nous a été dévoilée dans l’entretien n° 2. Le travail décrit est de nature essentiellement didactique : les conceptions qui le structurent prennent le pas sur l’expérience acquise antérieurement, en tant qu’élève ; la mention du constructivisme en témoigne, comme les fréquents exemples issus de la méthodologie des Sciences de la vie et de la terre. L’absence d’allusion à un projet ou à des tâches de nature éducative, voire pédagogique, confirme la prééminence du volet disciplinaire.
  • Entretien n°3

a) Le domicile de l’informatrice constitue le lieu de travail principal de travail, malgré les inconvénients que cela génère dans la gestion de l’espace privé ; nous y lisons une prédominance de rationalités traditionnelle et utilitaire.

b) La perception du temps semble différente selon les espaces dans lesquels il est considéré : fréquence occasionnelle dans l’établissement, qu’il convient cependant de rentabiliser, investissement quotidien indispensable au domicile, qui ne fait pas l’objet d’une recherche d’efficience accrue ; le transfert d’activités vers l’établissement n’est pas envisagé.

c) Ce qui structure l’activité, dans les deux espaces précités, paraît dicté par des choix qu’éclairent des rationalités téléologique et cognitive : obtenir la validation de l’année PLC2, en respectant les théories didactiques proposées en formation et dans les ouvrages spécialisés.

d) Les destinataires de l’activité sont définis de manière abstraite et générique : « les / des élèves » ; aucun terme alternatif n’est utilisé (enfant, adolescent, jeunes, apprenants, « mes » élèves, classe…)

e) Les partenaires associés sont rares et choisis selon les rationalités que nous avons mentionnées au point (c).

En résumé, il semble qu’une tension existe entre les buts poursuivis, qui dépendent en partie de l’adoption de normes, voire de théories et connaissances conformes, et les pratiques antérieures adaptées aux préférences de l’informatrice en matière de cadre de travail personnel. Il en résulte une forme de double-dépendance, à un cadre spatio-temporel qui limite le contact à autrui et la possibilité de relecture des pratiques empiriques et traditionnelles, d’une part, et aux signaux multiples générés à chaque cours par les élèves, d’autre part. La limitation des contacts pourrait induire un manque de tamisage des signaux ainsi cumulés et, en conséquence, un surcroît de travail quotidien d’ajustement ; en écho à cette situation, nous soulignons l’impossibilité affirmée par l’informatrice de prévoir le travail à moyen terme.

  • Entretien n°4
  1. L’espace de travail personnel se partage entre le domicile et l’établissement dans lequel se déroule le stage en responsabilité. Le domicile n’est pas décrit en tant que lieu de travail possédant des caractéristiques singulières, qui auraient pu en expliquer le choix préférentiel, pour l’étude des programmes, en particulier. L’établissement est le siège des relations avec les pairs-enseignants, la tutrice du stage et, en outre, la technicienne du laboratoire.
  2. On peut noter que le type de relation dont il est question est à situer dans le registre de la recherche d’informations, de compréhension, par rapport à l’élève, à l’enfant.
  3. Cependant, ni l’un, ni l’autre n’apparaît nettement dans la sphère du travail personnel de l’informatrice, au contraire des programmes, et des livres qui en proposent l’application, et qui tiennent une place prépondérante dans le temps professionnel hors-cours.
  4. On peut remarquer, au titre des partenaires associés, l’absence de mention explicite de personnels éducatifs ; au titre des espaces de travail, la non-délimitation, dans l’établissement, d’un espace de travail précis : salle des professeurs, salle de travail dédiée, CDI…
  5. Il conviendrait de souligner, enfin, la faible caractérisation du mode de travail personnel décrit, par rapport au champ disciplinaire concerné : la Physique-chimie. En dehors du travail, inévitable, en laboratoire, les activités qui sont décrites restent très générales.
  6. Les deux types de rationalités dont nous pensons qu’ils peuvent majoritairement éclairer les choix déclarés sont de types téléologique et axiologique ; ils marquent le choix d’atteinte d’un but (la certification et l’intégration durable) et, dans une moindre proportion, la référence à des normes ou des valeurs de l’institution et / ou de la profession.