2. Dimensions individuelle et collective de la dette au Mexique

Appréhender les mécanismes de l’appropriation ou l’insertion des services financiers procurés par un dispositif de microfinance dans les pratiques de dette/créance préexistantes exige de restituer les logiques sous-jacentes à ces pratiques. Cela ne peut se faire sans une compréhension du double rôle économique et social de la dette au niveau du village et des unités domestiques dans le contexte étudié (chapitre 4). Couplées à une approche des dimensions collectives de l’action individuelle, posée au cours de la partie 1, nos observations de terrain nous autorisent à avancer que la circulation de la dette et sa reproduction perpétuelle assurent le fonctionnement socio-économique du village. Les logiques sous-jacentes aux pratiques de dette/créance que nous décrivons laissent au total entrevoir une gestion “collective” des surplus de richesse au niveau du réseau social. Ce résultat présente une implication forte.

Si l’on considère que l’implantation de l’IMF oppose à cette logique de gestion collective des surplus de richesse, de liquidité sous forme de dettes/créances une sorte d’individualisation des pratiques d’endettement, en se positionnant comme intermédiaire chargé de collecter l’épargne et d’octroyer des crédits, la question qui se pose alors est la suivante : l’accès aux services financiers du dispositif de microfinance vient-il rompre l’interdépendance économique et sociale au cœur des pratiques instituées d’endettement?

Avant de continuer notre cheminement, nous nous attachons à présenter un bref état des lieux du secteur mexicain des finances rurales, ses évolutions récentes et ses principaux enjeux. Dans cette mouvance, nous présentons le dispositif de microfinance étudié dans ce travail (chapitre 5).