Section 4. Coexistence de deux logiques distinctes de la relation marchande

Nous l’avons vu précédemment, la théorie économique laisse entendre que le paiement de la dette clôt la relation entre les échangistes. Mieux, si aucun lien ne survit après l’extinction de cette dette, celle-ci ne prend appui sur aucune relation préalable. Appréhendée ainsi, l’activité économique se « concrétise par des relations de dette désincarnées » [Blanc, 1998 :295]. Or, cette approche purement comptable et atemporelle de la relation marchande doit être dépassée pour envisager la possibilité d’une relation qui survivrait à la relation de dette entre le débiteur et le créancier. Nous verrons donc qu’en réalité, les relations qualifiées de marchandes mettent en jeu des logiques divergentes dont l’opposition se fonde sur deux critères essentiels : la temporalité dans laquelle la transaction s’insère ainsi que le statut des échangistes [Servet, 1999 (dir.) ; 2006a et 2006b]. Cette optique permet de différencier deux logiques d’échange : celle qui s’inscrit dans une logique relationnelle et celle qui au contraire n’inscrit pas l’échange dans une dynamique relationnelle entre les échangistes (§1).

Ce cadre théorique qui se situe dans la lignée des travaux de Karl Polanyi nous permettra d’analyser la logique sous-jacente à l’émergence de la microfinance dans les pays du sud et en particulier dans notre d’étude (§2).