A. Les activités agricoles

La subsistance des ménages vivant dans les localités étudiées est fortement déterminée par les produits de la terre. Seulement 13% des ménages de notre échantillon (dont la moitié vit dans la Mixteca, région où le taux de migration est très élevé) ne vivent pas, même partiellement, de l’agriculture. Le régime foncier est donc crucial et génère souvent de nombreux conflits 92 . Depuis la révolution mexicaine, deux statuts de propriété communale de la terre – par opposition à la propriété privée officialisée à la fin du XIXe siècle- coexistent. Les deux formes sont : l’ejido et les biens communaux. L’ejido est composé de parcelles individuelles placées sous administration collective 93 . Les biens communaux « proviennent plutôt de la législation des titres de propriété antérieurs, d’origine espagnole » [Dehouve, 2003 : 50]. Dans les villages où nous avons mené notre recherche, la structure agraire correspond exclusivement aux biens communaux.

La répartition des activités agricoles concernant les deux principaux produits agricoles nous est fournie par le tableau 7 ci-dessous.

Soulignons que dans la Mixteca, la production agricole est essentiellement constituée de celles du maïs et du frijol (haricot noir) destinées à l’auto-consommation du ménage. Par ailleurs, le pourcentage de ménages qui cultivent le maïs et le frijol dans la Mixteca est plus élevé que dans la Sierra Sur. Au-delà des critères géographiques, la forte migration, caractéristique de cette région par rapport à Sierra Sur, explique le fait que l’agriculture soit quasi-exclusivement destinée à l’auto-consommation.

Dans la Mixteca, la migration est essentiellement internationale et permanente et concerne 55% des ménages de notre échantillon alors que dans la Sierra Sur le phénomène migratoire se caractérise principalement par une migration régionale temporaire [Morvant, 2005a]. Cette situation a entre autres pour conséquence que les transferts monétaires issus de la migration (remesas) constituent la principale source de revenus monétaires. Ainsi, si les ménages de cette zone exercent davantage d’activités de petit commerce, l’agriculture se concentre sur l’essentiel et ne vise pas à assurer un revenu monétaire au ménage. Nos données mettent en effet en évidence qu’en moyenne 14% de ce qui est récolté- essentiellement du maïs, du haricot- est vendu. Dans la Sierra Sur, la part de la récolte de maïs et haricot destinée à la vente est de 20%.

En revanche, comme nous l’avons souligné précédemment, la production de café est essentiellement destinée à la vente. Ainsi, d’après nos observations, à San Agustin Loxicha, dans la Sierra Sur, 90% de la récolte est vendue à un prix variable suivant la période et l’acheteur 94 .

Tableau 7. Production agricole en pourcentage de l’échantillon des ménages étudiés
  Localité
Produit Échantillon total Sierra Sur Mixteca
Maïs et frijol 78% 75% 82%
Café 50% 50% 0

Source : Enquêtes Morvant [2004a et 2004b].

Notes
92.

La municipalité de San Agustin Loxicha où nous avons mené une partie de notre travail de terrain est connue pour ses violents conflits autour du problème agraire.

93.

Les membres de l’ejido élisent un comité de six personnes élus pour trois années : un président, un secrétaire, un trésorier et des suppléants. La propriété ejidale a été réformée à partir de janvier 1992. Cette réforme revendique une individualisation du régime foncier et pose les bases d’une éventuelle dissolution de la personnalité juridique de l’ejido.

94.

On oppose les « producteur libres » qui ne sont pas affiliés à une coopérative qui rachète le café à un prix plus élevé que celui pratiqué par les acheteurs particuliers.