§2. Les formes collectives d’accès à l’emprunt

A. La tanda (tontine)

Mécanisme qui permet aux uns d’emprunter et aux autres (les derniers numéros de la tontine) d’épargner, la tontine est un phénomène très répandu en milieu urbain mexicain [Velez-Ibañez,1993 ; Campos, 1998]. En revanche, dans le contexte rural que nous étudions, les revenus de l’agriculture annuels et non pas hebdomadaire ou mensuels rendent improbables l’organisation et la participation à une tontine. De fait, nous n’avons rencontré qu’une seule tanda dont nous décrivons le fonctionnement ci-dessous (encadré 6).

Encadré 6. La tanda de Santa Catarina Loxicha
Cette tanda a été initiée deux années avant notre passage par César, un jeune boulanger qui revenait de la capitale, pour s’établir dans son village, après y avoir suivi une formation de boulanger. Lors de son séjour il avait entendu parler de cette pratique ce qui l’a incité à démarcher des personnes de son entourage susceptibles d’êtres intéressées et leur a expliqué le fonctionnement de la tanda. Onze personnes se sont réunies. Au départ, ils se sont mis d’accord pour commencer avec seulement 300 pesos (30 US$), c’était à lui que revenait le premier rang (personne qui récupère l’intégralité de la somme en premier). Ensuite les numéros étaient attribués en fonction de critères de confiance et de critères de besoins de liquidité. Ainsi ceux qui préfèrent attendre pour toucher la somme désireront se situer parmi les derniers numéros de la tanda. Dans la mesure où ses possibilités financières le lui permettent et parce que ses nécessités financières étaient souvent supérieures à celles des autres, César s’attribue habituellement deux numéros ce qui implique une cotisation plus importante mais qui lui permet de toucher deux fois la somme réunie de façon hebdomadaire par le groupe. Avant de commencer une nouvelle tanda, Cézar consulte les membres sur le montant de la cotisation, lors de mon passage il souhaitait proposer une augmentation. S’il n’obtient pas satisfaction, il s’octroie un numéro supplémentaire au nom de sa femme par exemple. Il arrive que les gens souhaitent changer de numéro, il le concède une fois que la personne a prouvé qu’elle pouvait être digne de confiance.
En effet, le mécanisme de sélection des personnes est très simple : César attribue aux nouveaux entrants le dernier numéro afin d’être sûr qu’au moment où cette personne récolte la somme des autres, elle a réalisé l’ensemble des cotisations.

Source : Enquêtes Morvant [2004c]