2.4.5. Préparation au vicariat apostolique de Beni (1934-1938)

L`érection de Beni en mission indépendante stimula le zèle apostolique des missionnaires assomptionnistes. Il furent encouragés par la visite de leur Supérieur général, le Père Gervais Quénard venu au Congo pour un séjour de deux mois (04 novembre 1935-03 janvier 1936) durant lequel il s'intéressa aux œuvres réalisées et projetées par les missionnaires, leur prêcha une retraite annuelle.

Il vint aussi avec un groupe de trois missionnaires et des ânes qui faciliteraient les randonnées apostoliques des religieux dans les brousses. Ces présences furent ressenties par les missionnaires comme un appel á de nouvelles conquêtes stimulées par l`arrivée successive de deux groupes de nouveaux missionnaires en novembre et en décembre 1934.

Dès son retour en Europe, le Père Gervais Quénard publia son livre, Le Miracle des Églises noires. Il trouva un écho favorable auprès du pape Pie XI qui demanda la publication de son entretien avec le Père général dans l'Osservatore romano du 26 décembre 1936. Cette propagande missionnaire sur le Congo renforça par ailleurs l'enthousiasme de onze nouveaux missionnaires assomptionnistes.

Cette équipe masculine fut renforcée par l'arrivée du premier groupe missionnaire des Oblates de l'Assomption fondée en 1865 accueillies à Beni le 23 décembre 1935 où elles se mirent aussitôt au service de l'émancipation de la femme congolaise par l'instruction chrétienne et scolaire; s'engagèrent dans les œuvres sociales en soulageant les malades dans les dispensaires, en se souciant des orphelins, des lépreux, et en fondant des ouvroirs, des foyers sociaux, et des centre d'alphabétisation.

Grâce à la présence de ces deux congrégations religieuses missionnaires ; la mission connut une diversification des œuvres. Les missionnaires ouvrirent quatre nouveaux postes de mission : Bunyuka Notre Dame des Anges (1935), Mbingi Notre Dame des Lourdes (1935), Manguredjipa Saint Joseph (1937) et Kyondo, Marie Immaculée (1938). Ces nouvelles fondations exigèrent des missionnaires un travail de christianisation du peuple. Il se faisait par les randonnées continuelles en brousse, par l'instruction religieuse auprès des catéchumènes, par la régularisation des cas litigieux de mariages, et par l'instruction de la jeunesse dans les écoles centrales et rurales 620 .

Cependant, le secteur scolaire souffrait du manque de personnel enseignant qualifié. Les Assomptionnistes, dès le début de leur ministère apostolique à Beni; envoyaient les élèves les plus doués chez les Frères Maristes à Kilo dans la Préfecture du Lac Albert. Mais ces spécialistes de l'enseignement ne pouvaient recevoir qu'un nombre assez limité d'étudiants venant des missions voisines.

C'est pourquoi, devant l'urgence d'avoir un personnel qualifié dans les écoles qui ne cessaient de se créer, les Assomptionnistes décidèrent d'ouvrir à Beni en 1936 une école normale qui fut transférée à Mulo (1937) dans un climat froid sans beaucoup de risque de paludisme. Cette institution scolaire suivie plus tard des Écoles d'Application Pédagogique (1950) fournit un nombre suffisant d'instituteurs pour les écoles.

Devant la floraison de la chrétienté et des oeuvres pastorales, sociales et caritatives avec un personnel diversifié constitué de religieuses et de religieux de l'Assomption, d'autochtones catéchistes, d'enseignants, et de futurs prêtres, le pape Pie XI dans sa bulle Si Christi fidelium numero 621 du 9 février 1938 érigea la mission indépendante de Beni, non en Préfecture comme l'espéraient les missionnaires, mais en Vicariat apostolique de Beni.

Cependant, le pape n'avait pas nommé le Vicaire apostolique de Beni. Les présences en Europe des Pères Conrad Grœnen, Supérieur religieux, et de Henri Piérard, Supérieur ecclésiastique, furent interprétées par certains missionnaires comme une « course à la mitre 622  ». Il était prévu que le Père Conrad Grœnen prendrait son congé à cette époque et que le Père Henri Piérard le remplacerait à son retour. Mais pour des raisons de santé, celui-ci dut partir en Belgique pour les soins médicaux 623 . À cause de ces faits, il nous est difficile de croire à cette interprétation d'une rencontre fortuite de ces missionnaires en Europe.

Bien plus, le Père Conrad Groenen dans sa correspondance du 3 mars 1933, relatait à son Supérieur Général, le Père Gervais Quénard, qu'il était une persona non grata auprès de son Excellence 624 ; pour avoir probablement transféré le poste de Kimbulu à Muhangi. Par ailleurs, dans sa lettre du 9 juillet 1933 adressée au Père Norbert Claes, son Supérieur provincial, il suggérait que la mission aurait besoin d'un évêque juriste 625 , qui constituerait un tribunal ecclésiastique pour répondre aux cas pastoraux. Quoi qu'il en soit, le pape Pie XI nomma, par son décret du 14 juin 1938, le Père Henri Piérard, vicaire apostolique de Beni et évêque titulaire d'Andropolis 626 en Afrique du Nord.

Notes
620.

Lieven BERGMANS, op. cit., p. 69-84.

621.

Acta Apostolica Sedis (1939) n°31, p. 688.

622.

Lieven BERGMANS; Cinquante ans de présence assomptionniste au Nord-Kivu, op. cit.; p. 18.

623.

Romanus, Declercq, Lettre à la diaspora, Beni, le 30 septembre 1937.

624.

APAR, 2 LK 31 : Père Conrad Groenen au Père Gervais Quénard. Mulo, le 12 mars 1933.

625.

APAR, 2 LK 31, 2 : Père Conrad Groenen au Père Norbert Claes. Lubero, le 9 juillet 1933.

626.

Acta Apostolica Sedis 31(1939), p. 688.