Chapitre deuxième
Les Oblates de l’Assomption (1935-1996)

Les paragraphes suivants présentent l’identité de cette branche féminine assomptionniste et son idéal religieux et apostolique en mission. Ils relatent, après ses origines et son expansion, leur raison apostolique d’être en mission

3.2.1. Fondation et expansion (1865-1985)

Les origines de la congrégation des Oblates de l’Assomption 972 sont liées à celle des Augustins de l’Assomption dont elle est la branche féminine. Au cours de l’audience avec le pape Pie IX (1839-1872) lors du pèlerinage du Père Emmanuel d’Alzon à Rome en 1862, le pontife romain vint à lui dire : « Je bénis vos œuvres d’Orient et d’Occident ». Aussitôt, en 1863, le Père Emmanuel d’Alzon envoya à Constantinople le Père Victorin Galabert (1830-188) pour travailler à la restauration de l’unité l’Église orthodoxe avec l’Eglise catholique.

Soucieux d’associer à cette nouvelle œuvre la collaboration d’une congrégation religieuse, le Père Emmanuel d’Alzon s’engagea, en 1862, à fonder la congrégation des Oblates de l’Assomption dans sa maison natale du Vigan, sous la responsabilité du Père Hippolyte Saugrain (1822-1905) qui, à l’extérieur de ce noviciat, s’adonnait à la prédication et à la confession des fidèles.

Cette activité apostolique aboutit à la formation d’un groupe de jeunes filles des Cévennes que le Père Emmanuel d’Alzon réunit, le 24 mai 1865, dans une grande maison au quartier de Rochebelle dans le faubourg du Vigan. Il leur donna le nom « Oblates de l’Assomption » impliquant le sens des personnes « offertes » pour le service de l’Eglise et leur appartenance à la famille des Religieux de l’Assomption qu’il avait fondé à Nîmes en 1850.

Afin de marquer leur première destination dans l’Eglise, il plaça leur maison sous le patronage de « Notre-Dame de Bulgarie » qui a et garde une connotation de la mission étrangère ou mieux de la mission lointaine, hors des frontières nationales françaises, dans l’Eglise. La vie y était austère et constituée d’austérité et de prière : coucher sur la planche, souper au pain et à l’eau deux fois la semaine, adoration du Saint Sacrement chaque dimanche, et une adoration nocturne hebdomadaire.

Aussitôt, le problème de la responsable de cette nouvelle communauté se fait sentir. Le Père Emmanuel d’Alzon avait déjà estimé, lors de la direction spirituelle de Marie Correnson, aînée de dix enfants, avait un appel particulier du Seigneur. Elle était la fille de Correnson, médecin du collège de l’Assomption de Nîmes, et ami du Père Emmanuel d’Alzon. Au cours de ces rencontres spirituelles, Le Père Emmanuel d’Alzon intéressa et fpréparaMarie Correnson à la fondation de nouvelle congrégation naissante 973 .

Le Père Emmanuel d’Alzon proposa comme objectif à cette institution religieuse une devise qu’il emprunta de l’apôtre Paul (I Co, 9, 22) : « Je me suis fait tout à tous, afin de les gagner tous à Jésus-Christ ». Ainsi demanda-t-il à la Supérieure de rendre son cœur « mille fois plus grand, plus ardent pour tout ce qui est grand, beau, divin, dans les perfections de Jésus-Christ et la cause de Dieu ?»

En 1867, après un temps nécessaire de discernement et après s’être imprégnée des projets, des désirs et des inspirations du Père Emmanuel d’Alzon, Marie Correnson devint, à l’âge de 25 ans, la cofondatrice de cette congrégation des Oblates de l’Assomption, et prit comme nom de religion celui de Mère Emmanuel-Marie de la Compassion. Par-là, Les bases de la fondation de cette nouvelle institution religieuse étaient lancées.

Cette devise et ce cœur large ouverts se polarisent sur trois orientations dans un même but comprenant des dimensions missionnaires, œcuménique et caritative ainsi concrétisées dans leurs récentes Constitutions et leur Règle de vie :

‘« Nous entendons rester fidèles à ces trois finalités de nos origines par le service de l’évangélisation dans tous les pays du monde, avec une attention spéciale à ceux qui ne connaissent pas le Seigneur, le travail en faveur de l’unité des chrétiens, le service des plus démunis et le souci constant de la croissance de l’homme dans l’esprit de l’Evangile, plus particulièrement par l’assistance éducative, médicale et sociale Partout où nous sommes envoyées, nous suscitons des engagements au service de l’Eglise 974  ».’

‘Filles de l’Eglise’, et ‘ouvrières d’unité’, les Oblates de l’Assomption recherchent la gloire de Dieu et la réalisation de l’ultime souhait du Christ : ‘Qu’ils soient un’. Par ailleurs, dans les attitudes évangéliques de simplicité et d’humilité, elles trouvent une voie qui les rend proches des pauvres et qui favorise le dialogue 975 . Partageant la spiritualité assomptionniste et la devise ‘Que ton Règne vienne, Seigneur’, elles se rendent disponibles en empruntant la parole du prophète : ‘Ecce ego, mitte me : Me voici, envoyez-moi (Is, 6,8).

Cette parole du prophète est pleine de sens pour elles car elle englobe leur oblation au Christ dans l’engagement de tout leur être par les vœux d’obéissance, dans l’accueil de la volonté du Père, de pauvreté à la suite du Christ pauvre, et de chasteté en se rendant proche du genre humain racheté par le sang du Christ.

À la manière des Assomptionnistes menant une vie de prière, d’oraison et de recueillement en présence de Dieu, les Oblates de l’Assomption radicalisent cette attitude par une phrase lapidaire en se persuadant qu’il est « impossible d’être une vraie fille de l’Assomption si on n’est pas en même temps une fille d’oraison ». Cette oraison puise ses énergies dans l’Eucharistie, où ‘l’Oblate s’unit au Christ dans le don total de sa vie’. Cette conviction prolonge la sensibilité spirituelle du Père Emmanuel d’Alzon qui exhorte ses religieux en leur disant que « À l’Assomption, le Saint Sacrement est le maître de la maison 976  ».

La vie de donation à Dieu se concrétise dans la vie commune, enracinée dans la Trinité, communauté d’amour. Ainsi, se proposent-elles, selon l’esprit augustinien, une vie faite de simplicité, de franchise et de cordialité, de partage de biens, de charité, et de service de frères dans un esprit de famille, afin de faire rayonner le Règne de Dieu en elles et autour d’elles.

Dès sa fondation, la congrégation des Oblates de l’Assomption était destinée à franchir les frontières françaises pour étendre « le Règne de Dieu » dans le monde. Le cœur large et ouvert à l’Eglise des premières Oblates de l’Assomption s’est progressivement réalisé sur les cinq continents à travers le temps dans 17 pays : en Europe (1865), en Orient (1889), en Afrique (1935), en Amérique latine (1964), et en Asie (1985).

Cette expansion serait-elle due au fait que leur particularité religieuse favorise une large ouverture d’options apostoliques ? C’est ce que suggère cette évocation :

‘« L'Europe Occidentale et Orientale, l'Afrique peuvent l'appeler tour à tour pour se dévouer dans les oeuvres les plus diverses, partout où il y a quelque bien à faire, quelque détresse à soulager, -au chevet des malades dans les cliniques les plus réputées comme dans les hôpitaux dans les dispensaires, près des enfants qu'il faut instruire, dans les orphelinats et les patronages, aussi bien que dans les grandes institutions où les jeunes filles de la société reçoivent une éducation conforme à leur rang, -dans les garderies, les écoles d'apprentissages et les ateliers chrétiens, où il faut préserver la jeune fille de l'ambiance souvent funeste respirée au dehors. Elle a sa place également dans l'Action Catholique et se dévoue dans les oeuvres sociales : goutte de lait, visite des taudis, régularisation des mariages 977  ».’
Notes
972.

Pour ce rappel historique de cette branche féminine des Augustins de l’Assomption, nous nous référons à ces ouvrages : Les Augustins de l'Assomption. Origines. Esprit, organisation, oeuvres. Paris, Maison de la Bonne Presse, 1928, p. 157-159 ; « La fondation des Sœurs Oblates de l’Assomption », dans L’Assomption et ses Œuvres (1980) n.602, p. 15-16 ; Pierre TOUVENERAUD et Marie-Léonie MARICHAL, La fondation des Sœurs Oblates de l’Assomption. Rome, 1980, 1-36. Ce dernier ouvrage a été tiré à l’occasion du centenaire des Augustins de l’Assomption.

973.

Marcel NEUSCH, « Les Oblates de l’Assomption », dans Les Oblates de l’Assomption, s.d, s.l. Cette revue présente sommairement cet institut religieux sous forme de plaquette. Elle sert dans l’animation des vocations.

974.

Règle de Vie de la Congrégation des Oblates de l’Assomption, Paris,1985, n°1.

975.

« Oblates de l’Assomption, qui êtes-vous ? », dans Les Oblates de l’Assomption, op. cit., p. 4.

976.

« L’esprit de l’Assomption », dans Les Oblates de l’Assomption, op. cit., p. 10.

977.

« Oblates de l'Assomption », dans L’Afrique ardente (1947) n°44, p. 10.