Conclusion de la troisième partie

De 1929 jusqu’à la passation du pouvoir, les Assomptionnistes ont collaboré avec de multiples congrégations missionnaires. Depuis les années 1980, les Pères Croisiers, les Carmes, les Pères Servites, les Sœurs Joséphites et les Comboniennes se sont ajoutés. Ce personnel missionnaire a été progressivement renforcé par des agents autochtones de la christianisation, les catéchistes, le clergé diocésain (1940), les Petites Sœurs de la Présentation (1950), et les Frères de l’Assomption (1952).

Un regard rétrospectif sur la christianisation des zones administratives de Beni et de Lubero fait percevoir une « révolution sociale et culturelle » qui a culminé dans le passage de l’Église missionnaire à l’Église locale. Cette révolution est passée par plusieurs moments qui font passer de l’indifférence ou de la méfiance à l’accueil du christianisme, c’est-à-dire le passage du paganisme au christianisme.

Cette religion a longtemps été perçue comme une « religion européenne, bonne pour les Européens (dini ya bazungu) ». Elle est devenue peu à peu un patrimoine et un héritage missionnaire lors de la passation du pouvoir ecclésiastique aux autochtones, en 1966, avec le sacre de Mgr Emmanuel Kataliko, et l’élection de la Sœur Monique comme Supérieure des Petites Sœurs de la Présentation, ainsi que celle du Frère Athanase Kibambi, en 1963, comme Supérieur général des Frères de l’Assomption, et l’établissement d’un centre catéchétique dans le diocèse (1967)

Pour l’Église de Butembo-Beni, la date de 1966, peut être considérée aussi comme le commencement d’une nouvelle période : l’histoire chrétienne des Nande, dont les fondateurs oont été Mgr Gabriel Grison (1906-1929), Mgr Henri Piérard (1929-1965), et Mgr Emmanuel Kataliko (1965-1996). L’histoire les reconnaîtra-t-elle comme « les ancêtres-fondateurs » de l’histoire religieuse des Nande ?

La passation du pouvoir ecclésiastique missionnaire au clergé autochtone signifie pour l’Église universelle, la maturité d’une Église locale qui a désormais ses agents indigènes de christianisation dans le clergé et le laïcat. L’établissement d’une hiérarchie ecclésiastique autochtone a une signification profonde. Elle apparaît comme une adoption et une appropriation de la religion nouvelle qui transforme, en quelque sorte, les croyances traditionnelles. La nouveauté de cette religion ne transparaît pas seulement dans la doctrine mais aussi dans la vie de la population locale. Le consentement des parents à laisser leurs filles et leur fils devenir des agents de la nouvelle religion est une étape nouvelle dans la vie du peuple.

La référence sociale, religieuse, et parfois politique, n’est plus le chef ni le sacrificateur mais le catéchiste, la religieuse ou le religieux, le prêtre ou l’évêque. Ce transformation sociale est d’autant plus sensible qu’elle se double d’un réseau d’œuvres devenues essentielles à la vie collective.