4.2.4. Le patronage (1951)

Il est difficile de préciser à quel moment le patronage appelé Kiro (dérivé de l’abréviation XP grec et devenu Kiro, c’est-à-dire Christ Jésus Mort pour Tous) est entré dans le diocèse de Butembo-Beni. Les sources orales restent silencieuses sur ce point. Le Directoire non plus n'indique pas la date de l'introduction du mouvement dans le vicariat de Beni. Il nous en donne seulement l'esprit. Il n'y a que le Père Dunlop Kieran et la Soeur Marie-Jeanne dans leurs articles un patronage noir et Patronage, mon beau souci qui nous donnent des renseignements sur l'organisation du mouvement et les débuts dans le diocèse 1255 .

Par contre, le Père Charles Mbogha dans sa thèse de licence 1256 affirme que le Père Arnold Verqualie fonda ce mouvement le 20 mai 1951 à Musienene. En réalité, ce Père fut le premier pionnier de ce mouvement en ce lieu après le Père Kieren Dunlop qui introduisit probablement le mouvement dans le poste de Beni en 1948.

Selon les informations du Père Kieren Dunlop et de la religieuse, ainsi que les indications de Mgr Henri Piérard qui parle de l'organisation du patronage pour les garçons et les filles, et qui relate que leur réunion se termine par une petite causerie spirituelle, une invitation à l'apostolat, et une prière 1257 , il est probable que ce mouvement fut introduit vers 1948 dans le vicariat de Beni.

Certes, le mouvement se développa à Musienene mais à cause de l'éloignement du Père Kieren Dunlop à Beni et de sa discrétion, comme l'affirme le Père Lieven Bergmans, plusieurs crurent que le mouvement fut fondé en ce lieu par le Père Arnold Verqualie, aidé de l'abbé Emmanuel Kahongya, tous deux professeurs au petit séminaire de Musienene 1258 .

Pour commencer le mouvement, racontait le Père Kieren Dunlop, il a suffi d'une phrase dite à un petit enfant que le jeudi prochain, deux Pères feraient un mchezo, c'est-à-dire un jeu. Conformément à la tradition vécue dans leurs pays d'origines, les missionnaires choisirent le jeudi après-midi, jour où les jeunes n'avaient pas de classe et donc disposaient de temps pour jouer.

Cependant, le jeu n'était pas la cible pastorale du mouvement. Son idéal était plutôt spirituel, à savoir un travail personnel sur soi et l'entraide mutuelle afin de devenir de bons chrétiens. Cet idéal du mouvement, dans le vicariat de Beni, en 1958, fut défini comme une « œuvre de préservation » des jeunes contre les mauvaises compagnies et de toutes les occasions qui constitueraient un danger pour leur vie chrétienne 1259 .

Il est aussi défini comme une « oeuvre de formation personnelle » afin de corriger les défauts des jeunes et de les aider à s'engager sur la voie des vertus que propose le christianisme. Pour arriver à cet idéal spirituel, le patronage propose des moyens naturels et surnaturels véhiculés dans le « mot d'ordre » : « la mise en vedette d'une vertu chrétienne, un petit point précis, concret, vers lequel on demande aux patronnés de faire converger tous leurs efforts 1260  ». Il oriente les exercices spirituels et apostoliques de la semaine, et incite à l'action.

Le patronage, placé sous le patronage de saint Louis de Gonzague, est un mouvement qui regroupe différentes catégories de personnes selon l'âge et le sexe, à partir des enfants jusqu'aux adultes. Ainsi donc, les petits, les moyens et les grands reçoivent une formation appropriée selon leur âge et leur sexe.

Chaque samedi l'après-midi, les chefs et les cheftaines préparent et organisent les activités de la journée du dimanche. Ce travail en commun à travers des contacts cordiaux tourne autour des exposés, des évaluations et des confrontations de leurs réflexions et de leur vécu, de leurs projets et de leurs difficultés comme aussi de leurs expériences dans leur vie et dans leurs groupes respectifs.

Le jour de la réunion générale du mouvement, le dimanche, les activités commencent après la messe dominicale par la prière, l'appel des membres, l'inspection, le dernier rapport, et une instruction donnée par le dirigeant. Ensuite, les différents groupes vont vaquer à leurs différentes activités, notamment les réunions, les chants du mouvement ainsi que les chants liturgiques en vue de la préparation de leur messe hebdomadaire du vendredi. Leurs jeux ont un objectif distractif et formateur au niveau personnel et communautaire, jusqu’à éveiller un esprit d’émulation chez les membres. Les causeries morales clôturent habituellement les rencontres en groupes.

Ensuite, un rassemblement général réunit tous les groupes, et le dirigeant donne le mot d'ordre de la semaine en cours. Le prêtre aumônier, un religieux ou une religieuse ou encore un laïc en l'absence de ces derniers, donne une instruction. Généralement ces instructions comportent de thèmes variés. Ils ont trait à l'esprit du mouvement, à l'approfondissement de l'évangile du jour, à l'éducation morale, à l'exhortation à l'apostolat dans son milieu, et à la régularité à l'animation de la messe du groupe en semaine.

Enfin, tous les mouvements de l'action catholique de la paroisse se rendent à l'église pour le salut au Saint-Sacrement durant lequel le prêtre peut donner une exhortation à tous les mouvements. A la fin du salut au Saint-Sacrement, chaque groupe chante l'hymne du mouvement, et chacun se rend chez lui. Le patronage, bien qu'il ait été affecté lors de l'avènement du pays à la seconde république dans les années 1970, fait la vie des communautés chrétiennes. Il leur fournit des catéchistes, s'engage à l'entretien de la chapelle et des shamba la kanisa, c’est-à-dire les champs communautaires de la communauté chrétienne pour subvenir à ses besoins élémentaires, et édifie la communauté par l'exemple de vie chrétienne 1261 .

Notes
1255.

Kieren DUNLOP, « Un patronage noir », dans L’Afrique ardente (1948) n°51, p. 11 ; MariA JOhannA, « Patronage, mon beau souci », dans Le Royaume (1956) n°19, p. 10-11

1256.

Charles MBOGHA, op. cit., p. 197.

1257.

Henri Piérard, Rapport annuel, 1947-1948, p. 3.

1258.

Lieven BERGMANS, op. cit., p. 172.

1259.

Directoire, op. cit., p. 79-80.

1260.

Ibidem, p. 79.

1261.

Observation personnelle comme aumônier des mouvements de jeunesse dans la paroisse de Mbau (1986-1991).