4.6.2. Ecole Technique Secondaire et Supérieure Agricole et Vétérinaire (1950)

Depuis 1948, il était question d'un établissement près de Butembo qui servirait d'école officielle d'Assistants Agricoles (E.A.A.), dont les Pères Assomptionnistes auraient la direction. Il était aussi prévu qu'en cette école plusieurs missionnaires dispenseraient un enseignement moyen de trois ans, l'enseignement technique étant réservé aux agronomes 1345 .

En 1949, le Ministre des Colonies désira créer une École d'Assistants Agricoles dans le territoire de Lubero. Il tenait à la confier aux missionnaires. Le Père Rodrigue Moors, Supérieur provincial assomptionniste de la Belgique, accepta la proposition et forma cinq missionnaires qui s'occuperaient de l'école moyenne préparatoire dans cette école qui appartient à l'Etat 1346 .

Après deux ans de pourparlers entre les représentants du Gouvernement et Mgr Henri Piérard, le Père Edmond Darche, prit, en 1950, la direction de l'École moyenne des Assistants Agricoles qu'il débuta dans les locaux de l'ancien hôpital de la mine à Kitatumba. Plus tard, le Gouvernement y ajouta une section vétérinaire. Avant l'indépendance, cette nouvelle institution s'appela École Technique Supérieure Agricole et Vétérinaire (E.T.S.A.V.). Elle deviendra, à partir de 1972, l’Institut Technique Agricole et Vétérinaire (I.T.A.V.).

Dépendant de l'État sous la direction des missionnaires, l'E.T.S.A.V. avait, dès ses débuts, un caractère congréganiste. Cet aspect n'alla pas sans créer des tensions et des problèmes. D'une part, le personnel religieux pouvait trouver par ce caractère congréganiste un moyen de se soustraire à l'autorité de leur Supérieur religieux en se réclamant de l'Évêque, premier pouvoir organisateur, et de l'Etat.

D'autre part, le personnel laïc du Gouvernement pouvait afficher une attitude hostile aux religieux quand ceux-ci voulaient étendre leur influence sur les élèves et les professeurs. Néanmoins, l'E.T.S.S.A.V. faisait la fierté des autochtones en sorte que le personnel religieux et laïc ainsi que les étudiants pouvaient tous en retirer leur fierté à cause de la beauté des bâtiments, de l’enseignement de haut niveau, et de l’hétérogénéité des étudiants qui venaient de toutes les provinces administratives du Congo-Belge 1347 .

Les difficultés réelles commencèrent après l'accession du pays à l'indépendance en 1960. Un sentiment nationaliste régna dans la conscience du personnel laïc et des étudiants. En 1961, les autorités provinciales furent obligées d'intervenir pour dompter une révolte des étudiants. Ce sentiment nationaliste culmina dans une lettre du 15 mai 1967 qui revendiquait la réorganisation de l’école sous la direction d’un laïc 1348 .

Mgr Emmanuel Kataliko et le Vice-provincial, Willibrord Muermans durent se rendre à Kinshasa, le 17 octobre 1967, pour traiter de la question de l'E.T.S.A.V. auprès du ministère de l’éducation. Sur l'agenda à présenter aux autorités compétentes se trouvait entre autres la juste interprétation de la convention en ce qui regarde les responsables de l'école et la constitution du corps professoral.

A ce sujet, plusieurs points furent retenus. D'abord, l'Ordinaire du lieu fut confirmé dans son pouvoir organisateur mandaté par l'Etat pour tout le fonctionnement de l'école. Néanmoins, cette école dépendait du Ministre de l'éducation nationale pour ce qui concerne la gestion financière, l'administration, le corps enseignant, les programmes, les horaires, et la sanction des études.

Ensuite, on procéda à la mise en place de deux directeurs techniques pour les sections agricole et vétérinaire. Ces directeurs devraient être engagés sur proposition de Ministre de l'Agriculture moyennant l'accord du pouvoir organisateur de l’évêque et l'agrégation du Ministre de l'éducation nationale. Enfin, l'E.T.S.A.V. fut maintenue dans son statut d'école officielle congréganiste, le corps professoral étant constitué sur proposition du pouvoir organisateur 1349 .

Au cours de cette rencontre, on définit les compétences des autorités provinciales et centrales en ce qui concerne la gestion du personnel, les finances et le contrôle technique. Ce fut plutôt l'entretien du lundi 23 octobre 1967 qui fut déterminant : les autorités de l’Administration nationale et les ecclésiastiques renouvelèrent le corps professoral et missionnaire de l’école En dépit de ces difficultés entre missionnaires et laïcs, les anciens de l’ETSAV gardent toujours en mémoire, le dévouement et l'aspect spirituel des missionnaires qu'ils ont connus 1350 .

Notes
1345.

Romanus DECLERCQ, Lettre à la famille, Butembo, le 19 décembre 1948.

1346.

Henri PIÉRARD, « Du Congo », dans la Lettre à la famille (1949) n° 75, p. 37.

1347.

Propos de Hubert Bwanahaig, agronome, ancien finaliste de l’ETSAV (1970-1976).

1348.

APAR, 2 LN 219 : G. Kiro, T. Burutere, et H. Bwakyanakazi, A Son Eccellence Monsieur le Ministre de l’Agriculture à Kinshasa-Kalina. Réorganisation de l’ETSAV de Butembo. Butebo, le 15 mai 1967 ; 2 LN 221 : Correspondance du Père Théodard Steegen avec le Père Wilfrid J. Dufault. Difficultés à l’ETSAV de Butembo. Butembo, le 14 septembre 1967 ; 2 LN 222 : Correspondance du PèreMarie-Jules Celis avec le Père Wilfrid J. Dufault. Pourquoi j’ai quitté le Congo. Bruxelles, le 12 octobre 1967.

1349.

Cfr. Dossier de l’Etsav : APAR, 2LN 217-244.

1350.

Témoignages (1995), de deux anciens de l'E.T.S.A.V , Joseph Kashauri et de Hubert Bwanahaig.