4.9.5. La Planification Familiale Naturelle

Pendant que la Commission Justice et Paix s'occupe des relations humaines sans se substituer au pouvoir politique et judiciaire, la Planification Familiale Naturelle (P.N.F.) centre ses activités sur les relations conjugales. Depuis mars 1988, le diocèse a lancé l'Action Femme et Famille afin d'aider les couples à mener une vie familiale harmonieuse.

Elle insiste sur la planification familiale naturelle, projet de développement portant le nom de Jamaa la heri 1430 , sous la direction de la Sœur Kasika Germaine assistée par les dames Madeleine Kasonia Vira, Musaka Christine, Zamani Bukundika Gertrude, et Odilie Byabuwavingi. Cette orientation familiale est en fait une réponse de l'Eglise locale de Butembo-Beni à l'Episcopat du Congo-Kinshasa. Cette institution lance des appels aux chrétiens afin qu’ils prennent leur responsabilité sur les questions touchant à la vie humaine, au couple, et à la gestion rationnelle de leur fécondité. Dans ce dessein, le 10 janvier 1990, le diocèse appela M Elimo Elindo pour former des animateurs de la Planification Familiale Naturelle.

Les objectifs de cette initiative cherchent d’abord, l'épanouissement du couple dans le dialogue. Ce souci du bien-être familial peut aussi se concrétiser, parmi tant d’autres activités conjugales, par une régularisation intelligente des naissances. Ensuite, le but central de cette initiative est de chercher à protéger la santé et la stabilité du foyer.

Elle aimerait aussi aider les couples féconds à espacer les naissances par la pratique des « méthodes d'auto-observation 1431  ». Bien plus, elle vise à lutter contre la stérilité et aux parents sans enfants à en avoir. Aussi veut-elle aider les couples à créer un climat d'harmonie conjugale 1432 . En outre, elle voudrait expliquer les méfaits de la contraception artificielle, ses effets sur la santé de la mère et même celle des enfants. Ces derniers risquent de naître avec des handicaps physiques, des problèmes psychologiques ou même avec des malformations avec toutes les frustrations subséquentes. Elle insiste dans ses causeries sur les maladies sexuellement transmissibles et le sida.

Par ailleurs, les membres intensifient des visites à domicile pour suivre de près les personnes qui ont reçu de la Planification Familiale Naturelle. Ils se rendent dans toutes les couches sociales pour responsabiliser les couples afin qu'ils puissent rayonner dans leur milieu. Enfin, ils projettent des sessions pour éducateurs et éduqués pour mieux lutter contre l'ignorance des couples par des conférences, des informations, et même des récollections. Ils veulent aider les parents à surmonter la timidité et le manque de confiance mutuelle en les incitant au dialogue et à la discussion informative, et en les encourageant à prendre ensemble leurs loisirs.

Aussi souhaiteraient-ils partager les expériences des autres cultures et d'autres régions par des expositions, des projections, des films, des démonstrations en art culinaire, des films ayant trait aux Maladies Sexuellement Transmissibles (M.S.T.). Ils cherchent des couples qui donneraient des témoignages de foyers équilibrés et harmonieux 1433 .

Cependant, les membres rencontrent une sérieuse difficulté parce qu'elle traite des problèmes sexuels qui sont encore des sujets tabous dans la culture nande. C'est pourquoi, en mars 1993, la directrice Stella Kavira Sivyaserya, religieuse de la Compagnie de Marie, avec les animatrices Madeleine Kasonia Vira et Gertrude Zamani Bukundika associèrent des aumôniers, les abbés de la cathédrale, Jean Baudouin Potomonio et Vincent Kalume, et de la paroisse de Bulema, dans la cité urbaine de Butembo. Les animatrices trouvent ainsi l’appui de l'Église catholique pour communiquer avec la population sur les questions sexuelles. Ainsi pensent-elles démystifier le sexe afin d'amener les couples et les familles à pouvoir dialoguer sur les problèmes de fécondité et de progéniture.

En outre, les animatrices voudraient conscientiser les époux à prendre leur responsabilité dans la procréation en abordant les questions relatives au respect de son partenaire, au devoir des parents à des enfants « déjà nés et à naître », et envers la société ainsi que la nation. Enfin, la présence des aumôniers aide les parents à connaître la doctrine de l'Eglise en rapport avec la vie familiale, à prendre conscience de leurs devoirs de décider librement du nombre d'enfants dont ils seront capables de nourrir, d'élever, d'éduquer, de former, d'instruire, et de pourvoir à leur avenir.

Les résultats de la Planification Familiale Naturelle (P.F.N.) ne se firent pas attendre 1434 . Toutefois, les couples réguliers aux réunions deviennent difficiles à suivre à cause de la pénurie et de l'insuffisance des formateurs qui souvent ne savent pas élaborer les fiches des statistiques. À cause de ce manque de personnel compétent et expérimenté, les membres la Planification Familiale Naturelle ne parviennent pas à organiser régulièrement des sessions pour les nouveaux éducateurs, à suivre de près leurs activités pour pouvoir pallier les lacunes éventuelles 1435 .

En plus, le manque de financement ne favorise pas la formation et l'encadrement des formateurs, la construction des locaux appropriés pour les causeries et la conscientisation des couples, et le déplacement pour atteindre les couples éloignés du centre de Butembo. Enfin, les travaux des champs mobilisent les parents en brousse pendant toute la journée et même des semaines selon les périodes. Une fois de retour aux heures tardives de l'après-midi, ils préfèrent le repos après des heures ou des jours de fatigue aux instructions de la Planification Familiale Naturelle 1436 .

Notes
1430.

Il est difficile de traduire proprement cette expression swahili en français. Elle signifie littéralement la famille de joie, mieux encore, la famille heureuse.

1431.

La « méthode d'auto-observation », selon les explications de l’infirmière Germaine Kasika Vihamba, consiste à être attentif à la femme durant son cycle mensuel.

1432.

Germaine Kasika Vihamba, P.F.N., Rapport du 5 juin 1990, p.1-6.

1433.

Madeleine Vira Kasonia et Kavira Sivyaserya, Rapport annuel de la P.F.N. Butembo, le 18 février 1993, p. 1.

1434.

Trois ans après sa fondation, en 1993, dans le centre de Butembo, 1 557 participèrent aux réunions de la P.F.N.

1435.

Madeleine. Vira Kasonia et Kavira Sivyaserya, op. cit., p. 1.

1436.

Germaine Kasika Vihamba, op.cit., p. 6.