La Corporation des Bouchers 158

En France, à Paris, au XVIIIe siècle, le clou du carnaval parisien était le défilé des Boeufs-Gras parés de rubans multicolores, mené par la Corporation des Bouchers de Paris. En effet, les Boeufs-Gras étaient l’emblème corporatif des bouchers.

Après la disparition des Gaillardons, ce fut tout naturellement la Corporation des Bouchers de Chalon qui se chargea de perpétuer la tradition carnavalesque. Au mois de janvier, tous les ans, la Corporation promenait dans les rues chalonnaises deux beaux boeufs bien gras ornés de fleurs, de rubans et de cocardes multicolores.

Un mannequin était sacrifié le soir du Mardi Gras sur le Pont Saint-Laurent par ces mêmes bouchers qui lisaient publiquement la sentence de son procès 159 dont s’inspire aujourd’hui encore très largement la Confrérie Royale de l’Ordre Gôniotique. Comme aujourd’hui, il était jeté à la Saône après lui avoir mis le feu au derrière sur ces paroles :

« Tous les bouchers ne sont pas des cons,

Ils ont foutu Carnaval en bas du pont.

Par bonheur qu’il savait nager,

Il s’est tiré du côté de l’hôpital,

Il s’est tiré du côté du Port Villers » 160

Notes
158.

La tradition de cette corporation est très ancienne et est étroitement liée aux cycles de carnaval. En Allemagne, à Nürenberg, en 1349, a eu lieu un soulèvement général des corporations contre l’empereur ; seule la corporation des Bouchers lui est restée fidèle. Pour la récompenser, l’empereur autorisa ses membres à défiler le Lundi Gras.

159.

 « Nous, tête de vaux, premier membre du Casio, Commissaire Rapporteur de la Société Inébranlable des Enfants de la Taverne :

Après enquêtes et interrogatoires de plusieurs commères et fillaudes, avons relevées contre cet Eschalier du Diable, dit Carnaval, les griefs couchés ci-dessous: Ivrognes et Féteurs de Piots à certaines vespées qu'il rentrait plein (...) (suivait la liste des crimes et délits dont il était chargé). Pour toutes ces raisons par nous débagoullées, étant bien entendu ledot Carnaval a cent meschiefs sur la conscience, qu'on ne peut avoir nulle confiance en lui et qu'il marche à grand renfort de pied dans toutes les voies orgieuses (...).

Attendu que cet homme, reconnu comme perturbateur du repos de la ville ne peut changer ni de vie ni de moeurs et que son existence est un danger pour la sécurité de la santé publique ;

nous, membre de la Société inébranlable, l'avons condamné à être berné, sauté à la couverte et dansé dans toutes les rues, coins, places et carrefours de cette ville par les quatre plus grands gourmands, feignants, mandrins, et membres lâches que vous voyez devant vous ».

160.

Claude Lougnot, Chalon et la Saône, Précy-sous-Thil, Ed. l’Armençon, 1992, p. 80.