Le 21 décembre, solstice d’hiver, situé à six mois du solstice d’été, est un point solsticial où la course du soleil se renverse : la durée des nuits commence à se réduire.
À partir de cette date, douze jours intercalaires – les douze jours qui séparent l’année solaire de l’année lunaire – correspondant au renouvellement de l’année et de la lumière, vont assurer le « raccord soli-lunaire ». Le temps lunaire s’arrête douze jours pour attendre symboliquement le temps solaire. Au centre de ces douze jours se situe le début de l’année civile. Ces douze jours correspondent au décalage qui existe entre une année lunaire qui compte 354 jours, répartis sur douze mois dotés alternativement de 29 ou 30 jours, et une année solaire qui elle en compte 365 jours 1/4.
C’est dans cet intervalle d’attente et de renversement de la course solaire que débutent les inversions sociales et sexuelles. C’est notamment le temps de la « Fête des Fous ».
Ainsi, la période de renouvellement de l’année, du renouveau, donc de la licence temporaire admise, était située, à l’époque où les autorités religieuses réglaient le quotidien du peuple, entre le solstice d’hiver et le 6 janvier, Épiphanie, jour des Rois 259 .
C’est un temps suspendu qui n’appartient pas au déroulement ordinaire de la vie. Mais durant ces douze jours, comme un retour au chaos primordial, se suspend temporairement l’ordre cosmique et s’ouvre le ciel pour faire circuler les forces ; les défunts peuvent réapparaître parmi les vivants. C’est pourquoi cette période de l’entre-deux calendaire a constitué le temps le plus fort de la sortie des masques d’hiver. Les masques sont en effet les médiateurs par excellence entre passé, présent et avenir, entre vie, mort et résurrection.
La vertu du nombre 12, qui est à l’origine de la division actuelle des mois en année, du jour en heures, en minutes et en secondes, symbolise les douze apôtres de Jésus Christ.
Le carnaval est donc né de la mise en place d’une société entièrement modelée par le christianisme, notamment avec l’instauration des cycles liturgiques.
Cependant, les autorités religieuses n’ont cessé, tout au long des premiers siècles, de condamner cette manifestation considérée comme une oeuvre satirique ; le port du masque était, par exemple, considéré comme une atteinte au Créateur 260 .
Claude Gaignebet, Olivier Ricoux, in Carnavals et mascarades, Paris, Bordas, 1988.
L'homme étant fait à l'image de Dieu, s'il modifie son image, il commet un grave péché.