Extranéités carnavalesques

Ainsi, l’extranéité ou la métamorphose tégumentaire carnavalesque est comprise comme outil de communication, donc comme forme de langage et figure, de manière ponctuelle et/ou cyclique et par une action extérieure transcendante cadrée, une évolution ou un renouvellement. Ce serait ainsi sa fonction et son mécanisme.

Outre certaines professions comme celles d’hôtesses, serveurs, livreurs, policiers, militaires ou encore dans le sport, seul ou presque 274 Mardi Gras et son carnaval, dans la France contemporaine, offre aux adultes la possibilité cyclique – et non ponctuelle – de se déguiser. C’est dire que le carnaval, et son corollaire la fête, intègrent à la fois le ludique et l’esthétique dans une même pratique qui autorise l’anonymat, tout comme ils tolèrent l’annulation du temps, dans un désordre qui n’a alors rien d’enfantin ou de puéril, ou tout comme ils acceptent une modification temporaire de l’espace. Cependant, un style proprement carnavalesque, à la fois produit régional, image identitaire véhiculée et issu d’une longue tradition locale du déguisement et du masque, se distingue largement des autres déguisements non festifs, caractérisant d’autres fêtes religieuses ou non. Le carnaval véhicule en effet son style singulier et reconnaissable de déguisements.

Ainsi, même si les types de déguisement sont extrêmement variés dans les carnavals, il existe toutefois quelques « règles » régionales ou locales plus ou moins élaborées, déterministes et parfois restrictives. Le carnaval de Dunkerque observe en ce sens, et officieusement, un ensemble de règles strictes, et qui en dénote ou s’en démarque est immédiatement stigmatisé, dans les discours recueillis, comme « étranger » ou « non dunkerquois ».

À Cayenne, une panoplie de déguisements considérés comme « traditionnels » fait figure de modèle, de patron des possibles voire de véritable archétype. Ces modèles sont exposés en miniature au siège de l’instance carnavalesque Cayennaise, là exactement où le président de l’association légitime reçoit autant les personnalités étrangères que les membres de tous les groupes carnavalesques de Cayenne.

Le président de la Confrérie Gôniotique et du Comité des fêtes de Chalon-sur-Saône garant et des festivités carnavalesques, et de sa promotion, et de son caractère singulier – donc identitaire - regrette l’arrivée, selon lui récente, des groupes d’enfants et de jeunes scolaires déguisés en lapin, en ourson ou en marguerite, et n’ayant pas la connaissance – historique certes mais identificatrice - du caractère proprement singulier des Gôniots chalonnais, à savoir et en synthèse, la dérision systématique de l’actualité et l’affublement de vieux et sales vêtements –  « mal gônés ! ».

Notes
274.

Avec Halloween à présent.