Conclusion : Surréalisme carnavalesque

Libérer les comportements, l’éthique, la charge du social, c’est, d’abord, s’opposer à ce qui le détermine ou le prédétermine. On trouve donc, dans le surréalisme carnavalesque, un aspect à la fois de révolte et de négation. Mais l’expérience surréaliste carnavalesque, où se déréalise le quotidien, où se fait jour le poids du déterminisme socio-éthique, où l’humain est considéré dans sa totalité sociale, dessine les contours d’une interrogation, plutôt qu’une anarchique remise en question. C’est par ce biais que cette expérience remet en jeu cycliquement une conception sociale de l’homme, considéré en lui-même et dans son rapport avec la société. Comparée à cette expérience carnavalesque très subjective, la folie, son corollaire intrinsèque, n’exclut pas une lucidité qui contient en elle-même sa propre critique. Dans ce sens, la notion de folie refuse de répondre, de façon dogmatique, à la question politique révolutionnaire, ce n’est qu’un outil qui permet, un temps seulement, d’abandonner le réel, de s’en dégager par la magie d’un merveilleux, d’un extra quotidien qui est la fois vécu et contemplé et dont l’espoir positif en est la source. Mais rêver n’est pas faire, et l’on ne peut, si l’on veut, changer les règles de la société. La magie cultive l’imagination et n’est pas réalité. Cependant, toute métaphysique et toute vision surréaliste expriment une même vérité, celle de l’homme, et de ses conditions fondamentales qui procèdent à un perpétuel retour à un en-deça rituel et à une expérience immédiate visant à la satisfaction d’un besoin. La mise en scène d’un imaginaire ou d’une rêverie sociale reste ainsi prédéterminée en acte, par des contraintes à la fois culturelles et individuelles, transcendantes et subjectives. Le carnaval n’est donc que subversion réglée et le surréalisme carnavalesque permet de dévoiler, en fin de compte, une vérité d’ordre politique.

Nous pourrions alors supposer que cette tension sociale temporelle, née de l’interstice, stimule et décrit une vision générale ou globalisante de la société elle-même.