Poétique du feu

Le feu est de puissance divine et donc le seul capable de détruire une autre « divinité ». Il est en effet le seul élément naturel que l’homme puisse produire, c’est pourquoi il est la marque de sa ressemblance avec le monde surréel des dieux, et ce d’autant que de nombreux mythes, tel le mythe prométhéen,rapportent que le feu était à l’origine propriété des dieux, et que l’homme est venu leur dérober.

Châtiment divin, et dérobé par Prométhée pour le bonheur et le malheur des hommes, l’un des symboles des plus actifs et des plus universels, ou flamme parcelle vengeresse et purificatrice, le feu n’en demeure pas moins un élément spectaculaire concomitant de la ritualisation moderne soucieuse de conserver un attrait certain sur le spectateur et éventuellement sur les medias visuels : « L’idéalisation du feu par la lumière repose sur une contradiction phénoménale : parfois le feu brille sans brûler ; alors sa valeur est toute pureté 344 . »

Une règle, en effet : la crémation du roi carnaval a lieu uniquement la nuit tombée, comme pour magnifier, dans une imagination nocturne, la puissance de la lumière qui est l’essence même du feu purificateur. La lumière, puissance diurne surpasse de son pouvoir les puissances nocturnes démoniaques et distingue ainsi des ténèbres, les lumineuses valeurs de l’ordre social et du système politique établi.

Notes
344.

Gaston Bachelard, La psychanalyse du feu, Paris, Gallimard, p. 180.