2. 3. Derniers préparatifs et départ « au-delà des mers »

Il fallait commencer par régler des questions pratiques. D'abord le sort du séminaire africain et de ses six candidats. Des tractations ont lieu avec Edmond van Eetvelde, administrateur général de l'EIC à Bruxelles, agissant au nom du Souverain. On convient de transformer le Séminaire en theologicum de la Congrégation de Scheut. Tous les séminaristes, à l'exception de l'abbé Reynen, passent à Scheut.

Ensuite, on débat de la délicate question de la prise en charge financière : l'entretien et la formation des candidats missionnaires destinés au Congo sont financés par une rente de 4 000 FB, une subvention de 5 500 FB de la part de l'État et une bourse d'études de 500 FB, accordée par un généreux fondateur. L'immeuble occupé par le séminaire africain – propriété du roi par personne interposée – est mis à la disposition de la Congrégation. Enfin il fallait aussi négocier la question des missions fondées par les spiritains. On décide qu'ils quitteront les missions de Boma et de Kinlau (Nemlao) au fur et à mesure que les scheutistes seront à même de les remplacer, ceux-ci dédommageront des frais consentis lors de la construction des résidences 3 .

Le statut juridique et ecclésial de la nouvelle circonscription confiée aux soins des missionnaires de Scheut reste à être clarifié. Le 9 avril 1888, se tient une « congrégation générale » de la Propagande. Les sept cardinaux membres décident de l'érection d'un vicariat apostolique couvrant le territoire du Congo Indépendant, sans passer par les stades préliminaires habituels de mission et de préfecture.

Par le bref Quae catholico nomini du 11 mai suivant, le Pape Léon XIII crée officiellement le Vicariat apostolique de l'État Indépendant du Congo, comprenant tout le territoire du Congo, à l'exception du vicariat apostolique du Tanganyika, crée en 1886 et confié aux Pères Blancs d’origine belge. Provisoirement, le supérieur du vicariat ne sera pas nommé évêque. Le même bref annexe à la Congrégation de Scheut le Séminaire Africain, qui cesse dès lors d'exister 1 .

L'heure du départ pour la « brousse africaine » vient donc de sonner. Le voyage de la première caravane dite « caravane sacrée » 2 est prévue pour la mi-juillet. En attendant cette échéance, on continue à se préparer.

Sous l'impulsion de l'épiscopat belge et à l'initiative de personnages influents dans les milieux catholiques, il se forme un Comité promoteur de l’œuvre religieuse du Congo. Dans sa première réunion, en juin 1888, ce comité commence par remercier la Congrégation de Scheut d'avoir transformé ses maisons par déférence aux désirs du roi et de l'épiscopat belge. Il « sait gré à la Congrégation de Scheut d'avoir mis son expérience au service de cette nouvelle œuvre ». Et il ajoute :

Tous seront disposés à favoriser une Congrégation chargée de missions si étendues ; tous, comme catholiques et comme belges, seront fiers de la mission providentielle qu'ils ont à remplir envers l'Église et envers la patrie 3 .

Les promesses de soutien financier sont faites, notamment par des personnalités en vue, comme le Comte de Hemptinne, président du comité et le curé de Saint Joseph à Anvers, Mgr Van den Berghe.

D'autres petits détails sont réglés avant le grand départ. L'État donnera un terrain à la mission ; la Congrégation créera dans son sein une section de Frères Coadjuteurs; elle s'assurera le concours des Sœurs de la Charité de Gand et éditera une revue de ses missions.

On désigne alors les membres de la première caravane destinée au Congo : Albert Gueluy 4 , nommé supérieur ad intérim de la nouvelle mission par un décret de la Propagande du 20 juin ; les deux novices-prêtres Ferdinand Huberlant 1 et Albert De Backer et un tout jeune scheutiste, Émeri Cambier 2 . Le ticket de bateau est payé par l’état et les quatre missionnaires emportent un ravitaillement pour six mois.

Le départ prévu pour la mi-juillet n'a lieu que le dimanche 26 août 1888, à l'aube. Nos missionnaires s'embarquent à Anvers, à bord du bateau anglais « Africa ».

Notes
3.

BONTINCK, op.cit., p.118-119.

1.

On peut lire le texte de ce Bref papal dans MCC, 1889, p. IV-V.

2.

Pour cette expression, lire BONTINCK, «Les débuts...», op.cit., p. 120.

3.

Van RONSLÉ, op.cit., p. 21.

4.

GUELUY, A., né à Anvaing le 23 avril 1849, ordonné prêtre à Tournai le 24 juin 1872, entre au noviciat de Scheut le 5 septembre 1875. Parti pour la Chine le 7 mars 1877, nommé assistant du Supérieur Général en 1877, il s'embarque pour le Congo, le 25 août 1889. Il meurt à Scheut, le 22 décembre 1924.

1.

HUBERLANT, F., avait été nommé provicaire apostolique du Congo le 13 février 1891. Malade, il retourne en Belgique en septembre 1892, il décède à Scheut, le 24 mars 1893.

2.

CAMBIER Émeri est né le 2 janvier 1865 à Flobecq, ordonné prêtre le 21 novembre 1887. Il sera missionnaire au Congo pendant 25 ans. Préfet Apostolique du Haut-Kasaï de 1904 à 1913, il meurt à Namur en 1943.