3. 2. 3. De Deken chez les Ding orientaux

Les récits de voyages de Constant De Deken ont d’abord été publiés en tant que feuilleton dans Missions en Chine et au Congo 2 . Ensuite, ils apparaissent dans un livre intitulé Deux Ans au Congo 3 .

Ce livre comprend l’ensemble des notices du journal que son auteur tenait alors qu’il accompagnait son supérieur Van Aertselaer de 1892 à 1894.

De Deken raconte d’abord le voyage qui les emmène de l’Europe à Luluabourg. Ensuite il parle du périple qui le conduit de Luluabourg à Moanda et de Moanda à Luluabourg. Ce double voyage, le plus instructif pour l’histoire des Ding orientaux, lui a été commandé pour aller chercher les Sœurs de la Charité de Gand destinées à la nouvelle mission de Luluabourg-Mikalayi.

Le livre de De Deken se termine, par le récit du retour en Europe avec l’étape obligatoire de Berghe Sainte-Marie et un saut à Nouvelle-Anvers chez les Bangala. Revenons au voyage aller-retour de 1893 destiné à accompagner les Sœurs de la Charité jusqu’à Luluabourg.

La construction de la résidence des Sœurs de Charité de Gand est terminée. Il faudrait maintenant aller les chercher à Moanda, à la côte atlantique. Van Aertselaer désigne De Deken pour cette mission spéciale. Celui-ci quitte Luluabourg-Mikalay le 10 avril 1893 pour attendre l’Archiduchesse Stéphanie à Luebo. Le steamer arrive le 23 mai au soir. Le lendemain, il s’embarque en destination de Nzonzadi où il attendra le Stanley en provenance de Lusambo. Il note :

‘Enfin, le 23 mai, vers 8 heures du soir, la sirène d’un steamer se fait entendre. Nous courons à la berge : c’est l’Archiduchesse Stéphanie, commandée par M. Carlier, de Namur. Quatre blancs sont à bord : M. Carpentier, directeur de la S.A.B. ; son secrétaire, M. De Joncker ; M M. Stache et Defrère, qui viennent enrôler les ouvriers. Je demande passage jusqu’à Bena-Bendi, pour attendre à ce poste le Stanley descendant de Lusambo. Cette permission m’étant gracieusement accordée, j’embarque mes deux boys, les deux ménages emmenés de Loulouabourg, mes bagages, ceux de M. De Saegher et nous partons le 25, non pas pour Benda-Bendi mais pour Nzonzadi, où Cadenas a transféré tout récemment sa résidence, le premier poste n’ayant pas d’avenir 1 .’

À Nzonzadi De Deken devait attendre près d’un mois. Heureusement, il s’est trouvé deux compagnons, deux agents de la S.A.B. : « deux gentlemen avec qui l’on voudrait passer sa vie, si l’on n’avait affaire ailleurs » 2 . Le missionnaire de Scheut observe que dans la région les vivres sont bon marché : « […], les vivres sont d’un bon marché fabuleux. Une poule se paye deux perles ; une chèvre, dix. De même pour le poisson. En conséquence, j’en achète une grande quantité, que je vais boucaner, en prévision du prix énorme que j’aurai, dans d’autres parages, à payer pour la nourriture de mes six gens » 3 . Pour varier l’ordinaire de leur table, Cadenas, Piron et De Deken se rendaient souvent à la chasse à l’hippopotame. Une fois ce sport a failli tourner au drame. L’animal blessé menace de charger la pirogue.

Le Stanley arrive à Nzonzadi le 23 juin. L’équipée s’embarque pour Léopoldville. Elle s’arrête à Lubwe où Lemarinel fonde un poste d’État et y installe un Haoussa comme chef, à la satisfaction du chef local. La population de cette région est décrite comme étant « nombreuse, riche en ivoire et cultivant de vastes plantations ». Elle a aussi des « bonnes dispositions » 4 .

Le 30 juin la flottille arrive à Berghe-Sainte-Marie. Les nouvelles parvenues d’Europe signalent la mort du Provicaire apostolique, Ferdinand Huberlant, et le débarquement à Boma de deux nouveaux missionnaires, De Cleene et Calon ; mais le renfort attendu de nouvelles Sœurs n’est point annoncé. De Deken devra donc choisir le contingent promis à la mission de Luluabourg parmi les religieuses arrivées précédemment. La descente de Boma à Moanda se fait à bord du steamer Hirondelle. Le Père choisit cinq Sœurs pour Luluabourg : mère Amalia, sœurs Albania, Humiliana, Hygina et Godelieve.

De Deken et ses cinq religieuses préparent le voyage retour. La petite caravane arrive sans encombre à Léopoldville. De Léopoldville, le Père et les 5 Sœurs traversent le fleuve et atteignent Brazzaville où la délégation reçoit « une charmante hospitalité » chez les religieuses de Cluny. Mgr Augouard leur réserve, lui aussi, un bon accueil. Ils retournent à Léo où ils s’embarquent à bord du Stanley. Ils arrivent à Berghe-Sainte-Marie. De nouveaux compagnons se joignent à eux. Il s’agit des Pères Hoornaert et De Clerq, et du frère Buyle. De Deken note : « À Berghe-Sainte-Marie, mission que je trouve plus prospère à chacun de mes passages, les Pères Hoornaert et De Clerq récemment arrivés d’Europe, montent à notre bord, pour nous accompagner jusqu’à Loulouabourg. Au réfectoire du navire, nous sommes dix blancs, cinq sœurs, trois missionnaires, le capitaine et le chef mécanicien » 1 . Le voyage continue sans désemparer. On fête Noël dans le bateau. Le Stanley va jusqu’à Lusambo. Ici l’accueil des Sœurs est enthousiaste. Les voyageurs arrivent finalement à Luluabourg, le 7 janvier 1894 et les Sœurs prennent possession de leur maison.

De Deken ne donne pas beaucoup de détails sur ce voyage retour. Il demande à ses lecteurs de se référer à la relation de la Sœur Godelieve : « Sœur Godelieve a tracé de notre voyage un récit trop intéressant pour que je reprenne sa tâche. Je me contenterai de choisir dans mes notes journalières les traits de mœurs, les incidents que l’ignorance de la langue et des usages a fait passer inaperçus » 2 .

Notes
2.

MCC., 1893-1894.

3.

DE DEKEN, Deux ans au Congo..., op.cit., p. 324

1.

De DEKEN, op.cit, p. 250

2.

DE DEKEN, op.cit., p. 252.

3.

DE DEKEN, op.cit., p. 151.

4.

Idem, p. 253.

1.

DE DEKEN, op.cit, p. 263.

2.

Idem, p. 160-161.