3. 2. DEUXIÈME PÉRIODE (1914-1916)

La nomination d’Egide de Boeck comme Pro-préfet du Haut-Kasaï marque une rupture décisive avec l’ère Cambier. L’homme impose un nouveau style et se préoccupe particulièrement des écoles 2 . De Boeck avait la possibilité de se démarquer de la politique de son prédécesseur parce qu’il venait d’ailleurs et il n’était pas mêlé aux querelles et aux intrigues du Kasaï. De Boeck n’est pas resté longtemps au Kasaï. Deux ans plus tard, il doit descendre à deux reprises à Léopoldville pour des raisons de santé. Ses passages à Pangu sont mentionnés dans le Journal de la Mission (exemples : le 30 septembre 1914 ; le 16 avril 1916, etc.). Il est finalement contraint de rentrer en Europe ; il arrive à Londres le 26 août 1916 et il y restera jusqu’à la fin de la guerre. Cette guerre qui a touché la Belgique en août 1914 avec son invasion par les troupes allemandes, aura de graves répercussions sur le renouvellement du personnel et sur le développement des œuvres missionnaires. Le 19 août, la veille de l’entrée des Allemands à Bruxelles, le supérieur général Florent Mortier quitte la maison mère de Scheut pour l’Angleterre ; Londres devient ainsi le quartier général de la Congrégation durant toute la guerre.

En cette année 1914, Baerts est toujours supérieur à Pangu ; il effectue une tournée d’évangélisation dans le bassin supérieur de la Lubwe. Il va jusqu’au pays de Bampende et place quelques catéchistes dans ces contrées. Van Aelst parcourt les pays de Badinga, Bashilele ; il visite les Bambunda où il place des catéchistes (mai 1914) et ramène les enfants à la mission. Il descend aussi à Lubwe, Mangaï, Eolo et Dima. En septembre, le Père Henri Moons est nommé à Pangu où il arrive au mois de novembre.

À part les visites des ecclésiastiques [De Boeck, Bracq, Bivort (21 janvier), Handekyn (30 septembre), etc.], le journal de la Mission signale le passage à Pangu du commissaire de district, Guelders (27 mars), du chef Bampende, Kakese (31 mai) et de l’agent de l’État de Mulasa, Deltour (15 juin).

En 1915 pendant que la guerre continue à faire rage en Europe, les missionnaires poursuivent leur évangélisation à Pangu en installant des catéchistes un peu partout. Le 24 février, après une cérémonie à la chapelle de Pangu, le supérieur, René Baerts, envoie 12 catéchistes en mission à l’intérieur. Nous avons cherché en vain la liste et l’identité de ces catéchistes.

Van Aelst est, quant à lui, très préoccupé par la christianisation de Bambunda. Il pousse ses périples jusqu’aux alentours d’Idiofa et tente d’installer des catéchistes et de fonder une chapelle dans la région de Laba. Mais son entreprise dans cette région s’arrête en juillet lorsque le Préfet le prie d’aller prendre la direction du poste de Lusambo. Van Aelst est remplacé par Van Oost. Celui-ci arrive à Pangu, le 8 août ; il est escorté de son boy de Lusambo, Georges Kayembe. Quant à Van Aelst, il quitte Pangu, le 17 août, accompagné de son boy et de Georges Kayembe qui regagne Lusambo.

C’est aussi en cette année 1915 que René Baerts, arrivé à Pangu en 1909, va dire adieu à cette mission dont il est presque le co-fondateur. Le 24 septembre, rentrant de sa retraite de Luluabourg, il apporte la nouvelle de son affectation à Katakokombe. Il quitte Pangu le 5 octobre et regagne son nouveau poste via Bena Dibele.

À la fin de 1915, il n’y a donc que deux prêtres à Pangu : Oscar Van Oost, le supérieur qui a remplacé Baerts et Henri Moons qui se dévoue surtout à entretenir la foi dans la région de Mangaï.

D’autres événements ont eu lieu à Pangu et dans la région en cette année 1915. Le Journal de la Mission les signale. Il relève par exemple que le 12 mars la Compagnie des Huileries du Congo Belge (H.C.B.) délaisse le poste de Sanga-Sanga. Tout le personnel (Blancs et Noirs) ainsi que le matériel prennent la route de Tangu dans le Kwilu.

Le 11 août, une tornade survient à la mission, le matin très tôt. Un coup de vent renverse deux grandes maisons où sont logées des enfants. Trois garçons trouvent la mort sous des pans de murs renversés. Une bonne douzaine s'en sortent avec quelques blessures. La chapelle est ébranlée et l’enclos du poulailler jeté à terre.

Le 12 août, le commissaire de district, en tournée dans la région, visite la mission sinistrée.

Depuis que la Belgique est occupée par l’Allemagne en 1914, la direction de la Congrégation du Cœur Immaculé de Marie qui se trouvait à Scheut, a trouvé refuge à Londres. C’est donc vers l’Angleterre que les missionnaires du Congo doivent se tourner pour espérer quelque secours en ce temps difficile. C’est ainsi que le Pro-préfet, Egide de Boeck, comme nous l’avons indiqué plus haut, pour des raisons de santé, débarque à Londres, en ce jour du 26 août 1916. Il laisse derrière lui, une préfecture en pleine croissance, malgré le nombre de plus en plus limité de nouveaux missionnaires venant en renfort des anciens. Il avait axé ses efforts sur la mise en place d’un système scolaire viable et créé à cet effet une école des catéchistes à Luluabourg. Il avait aussi contribué à rendre un peu plus rationnelle l’administration des missions en multipliant des instructions sur la tenue des registres et la rédaction des statistiques annuelles.

À Pangu, en cette année 1916, les effets de la guerre se font sentir. Les Pères ont de plus en plus du mal à s’approvisionner en produits européens. Ils sont obligés de renouer des liens avec la C.K. et de recourir constamment à elle 1 . L’entretien de leur steamer, le « Sacré-Cœur », leur coûte de plus en plus cher. Ils se proposent de le vendre 2 . Sur le plan de la pastorale proprement dite, le père Moons continue ses visites à Mangaï. Il fait venir à Pangu, au mois de mai, quelques familles païennes pour le baptême et 12 garçons pour l’école. Le Père Oost, supérieur de la mission depuis 1915, essaye, tant bien que mal, de maintenir les œuvres laissées par ses prédécesseurs. Il est remplacé par Van Aelst qui revient à Pangu le 14 octobre 1916. Le nouveau supérieur sera vite rejoint par son ancien compagnon, Sterpin.

Le Journal de la Mission signale deux visites des agents de l’État à Pangu en 1916 : Monsieur Delhaye vient le 15 janvier afin de chercher des témoins pour l’acte de décès de Monsieur Pierret (mort à l’hôpital de Pangu, le 23 juillet 1912) tandis que monsieur Brichot, agent à Basongo, arrive le 17 avril pour la perception de l’impôt.

Notes
2.

Un rapport de 1913 révèle que dès cette époque, la préfecture apostolique du Haut-Kasaï dépasse largement le vicariat du Congo quant au nombre d’élèves : 7.487 pour le Kasaï, 1.703 pour le vicariat du Congo.

1.

Ainsi, par exemple le 12 juin 1916, le directeur de la compagnie offre au Père Supérieur « un panier de tabac d’environ 25 kilos », titre gracieux.

2.

Dans une lettre écrite le 14 novembre 1916, le Directeur de la Société Congolaise Lulonga-Ikelemba s’informe sur le petit bateau que les missionnaires de Pangu aimeraient vendre.