L’intensité de l’occupation politique et administrative n’a été, depuis le début même de la colonisation, que très peu significative dans le territoire des Ding orientaux et le Kwilu en général. Un premier poste d’État est créé, nous l’avons vu, en 1894 à Lubwe avant tout pour des raisons commerciales. Il est repris, en 1901, par la C.K. qui, pendant un certain temps, exerce, dans la région, les fonctions traditionnellement dévolues à l’État. Jusqu’en 1906, la C.K. règne pratiquement sur tout le territoire compris entre le Kwilu et la Loange.
D’après le témoignage de Paul Grenade, le capitaine Daelman , fonde, en mai 1906, le poste d’État de Mulasa. La même année, sur la rive gauche du Kasaï, le poste de Basongo est établi chez les Lele, à une cinquantaine de kilomètres en amont de Pangu 1 .
Par l’ordonnance n° 168/2 du 28 novembre 1913, le Ministre des Colonies crée le territoire de la Kamtsha-Lubwe dont le chef-lieu est fixé à Mulasa. Ce territoire fait partie de la Province du Congo-Kasaï et du district du Kasaï 2 . Par l’ordonnance n° 77/S.G. du 28 septembre 1927, le secrétaire général agrée le transfert du chef-lieu du territoire de Mulasa à Idiofa 1 . Au terme de l’ordonnance n° 30/ AIMO du 21 mars 1930, le territoire de la Kamtsha-Lubwe est annexé au district du Kwango. En 1935, le Ministre des Colonies signe l’ordonnance n° 35/AIMO du 15 mars 1935 portant changement du nom de territoire de Kamtsha-Lubwe en territoire d’Idiofa. Au terme de l’ordonnance N° 21/60 du 25 février 1954 portant organisation de la Province de Léopoldville, l’ancien district du Kwango est scindé en deux : le district du Kwango et celui Kwilu. Le territoire d’Idiofa reste dans le Kwilu.
La réforme administrative de 1913 crée une situation rocambolesque chez les Ding orientaux. Leur espace ethnique est réparti entre le territoire de Basongo (l’est de la Lubwe) et celui de la Kamtsha-Lubwe (l’ouest de la Lubwe). Cette situation n’est que partiellement corrigée par l’ordonnance de 1930, lorsque la frontière du territoire de la Kamtsha-Lubwe est reculée jusqu’à la Loange 2 .
À l’époque des Jésuites, la région d’Ipamu a donc appartenu administrativement au territoire de la Kamtsha-Lubwe puis d’Idiofa, au district du Kasaï puis du Kwango, à la province du Congo-Kasaï.
Cfr. infra.
B.O. (1913), p. 206.En 1914, les 22 districts que comptait le Congo belge sont regroupés en quatre provinces : le Katanga, la Province orientale et la Province du Congo-Kasaï. Cette dernière province comprenait à peu près les actuelles provinces du Bas-Congo, de Bandundu, du Kasaï occidental, du Kasaï oriental et la ville province de Kinshasa. C’est aussi par cette même ordonnance de 1913 que le territoire de Basongo est créé et son chef-lieu est fixé à Basongo. Les territoires de la Kamtsha-Lubwe et de Basongo font partie du district du Kasaï et de la province du Congo-Kasaï.
Nous avons déjà signalé que le poste d’État d’Idiofa est créé bien avant 1927. Le Journal des missionnaires de Pangu signale la présence des agents européens à Idiofa à partir de 1914. Lorsqu’il a été question, en 1919, de transférer l’assassin du catéchiste de Ngulungu, il est envoyé par les missionnaires de Pangu à Idiofa plutôt qu’à Mulasa. Les agents de l’État auxquels les Jésuites d’Ipamu auront à faire face, résident à Idiofa plutôt qu’à Mulasa. Donc, c’est bien avant 1927 que les administrateurs du Territoire ont habité Idiofa au détriment de Mulasa. L’ordonnance du 28 septembre n’est venue qu’entériner une situation de fait qui n’avait que trop longtemps duré.
Même en reculant la frontière du territoire jusqu’à la Loange, l’autorité coloniale ne réussit pas à regrouper tous les Ding orientaux sous une même entité administrative parce qu’il existe, au délà de la Loange, le long du Kasaï, des communautés villageoises qui se réclament être Ding et qui sont considérées comme tel par les Lele. Sur la rive droite du Kasaï, se trouvent aussi, comme nous le verrons plus loin, les Ding orientaux que l’autorité coloniale recense dans le territoire d’Oshwe.