6. 3. AGRICULTURE

Les quelques sources dont nous disposons indiquent clairement que les Scheutistes de Pangu ont essayé de faire produire la terre autour de la mission. Dans un état de lieu du 30 juin 1913, nous lisons :

‘On a commencé les plantations de café : pour les pépinières, on a déboisé et desséché et rehausser une plate-bande marécageuse entre deux fortes collines : 50 mètres de largeur sur 1000 de longueur. Le ruisseau a été détourné. Cela servira de pépinière pour le café et le caoutchouc, de jardin potager et nous comptons continuer ce travail pour des prairies 2 .  ’

La documentation écrite actuellement disponible, n’indique pas ce qu’est devenue la pépinière pour le café et le caoutchouc. Mais nous supposons que cette pépinière était destinée à la C.K. parce qu’à Bena Makina la compagnie avait, en 1904, demandé aux missionnaires d’établir une plantation de caoutchouc.

En ce qui concerne le jardin potager, les sources n’informent pas sur ce qui y était planté. Cependant, en 1913, les Pères avaient deux jardiniers ; ce qui laisse croire qu’ils mettaient beaucoup de soin à cette activité qui leur procurait des légumes.

Parmi les travailleurs de la mission, il y a un « malafutier » ; il s’agit d’un tireur de vin de palme (malafu).

(source : De Clerq, MCC 1894)

La région de Pangu et le pays des Ding orientaux, entre la Pio-Pio et la Loange, était réputé être riche en vin de palme succulent. Les témoignages du 19e siècle abondent à ce sujet. Le missionnaire protestant, George Grenfell, de passage dans la région écrit : Les populations (Ba. Dinga) qui habitent le long du Kasaï (Inférieur) sont réputés être turbulents et ivres. C'est l'abondance de vin de palme qui les rend ainsi. » 1 Nous avons, à ce sujet, déjà évoqué les témoignages de De Deken, de Sœur Marie Godelieve et de De Clerq 2 .

Les missionnaires de Pangu se sont bien adaptés aux habitudes de cette région où les populations raffolent du vin de palme. Ils n’ont pas eu besoin d’importer le vin de l’Europe pour garnir leur table et étancher leur soif. Toutefois, ils n’avaient pas osé se servir de ce vin indigène pour célébrer l’eucharistie. Aucune source écrite ne garde la trace des habitudes alimentaires de ces missionnaires de Pangu. Aucune allusion n’est faite, dans le journal de la Mission, à un quelconque repas des Pères. Il est donc difficile d’établir si ceux-ci s’étaient accommodés aux mets de la contrée. Ce qui est certain c'est qu’ils avaient immensément besoin de manioc et de maïs pour nourrir leurs travailleurs et leurs élèves. Ils devaient pour cela mettre à contribution des villages environnants. Nous n’avons pas trouvé des données sur la livraison ou sur l’achat de la cikwangue ou du « pain de maïs ».

Les Pères de Pangu ont été mis à contribution par l’État pour vulgariser la culture du riz parmi les populations au milieu desquelles ils oeuvraient. En juillet 1916, 10 sacs de semence de riz sont expédiés au Supérieur de la mission de Pangu, par le bureau du Commissaire de district :

‘J’ai l’honneur de vous faire savoir que j’expédie ce jour à destination de Pangu et sur la demande du Révérend Père Supérieur de la Mission St Antoine de Lusambo 10 sacs de semences de riz blanc dénommé Mongala. Je vous serais très obligé, Très Révérend Père Supérieur, de bien vouloir propager ce riz entre les chefferies de la région de Pangu qui désirent s’adonner à la culture de cette céréale 1 . ’

Le 29 juillet 1918, par l’intermédiaire de l’administrateur territorial de Basongo, le Commissaire du district du Kasaï propose encore au supérieur de Pangu la distribution du riz pour l’ensemencement :

‘J’ai l’honneur de vous faire savoir que Monsieur le Commissaire du district du Kasaï tient à votre disposition une certaine quantité de riz destinée à l’ensemencement. Je vous serais obligé de vouloir me faire savoir quelle quantité de riz vous aimeriez qu’il vous soit envoyé 2

Le riz sera effectivement vulgarisé et les Ding s’adonneront à sa culture. Douze années plus tard, en 1928, un administrateur territorial de Luebo fera ce constat :« Les Badinga habitent un pays de galeries et de forêts. Ce sont des chasseurs assez frustes mais qui commencent, grâce à la propagande active, à s'adonner à la culture du riz et à la récolte des fruits du palmier » 3 . La consommation du riz va supplanter celle du maïs. On le mangera sous forme de bouillie appelée « ikap ». Il s’agit de la farine de riz plongée dans l’eau tiède, puis pétrie, emballée dans les feuilles et cuite à la vapeur. Cette recette était réservée aux personnes en deuil et à qui il était rituellement interdit de consommer la cikwangue.

Notes
2.

Papiers divers, A.R.CCIM, II.2.1. boîte G.XIII.b.1.18.

1.

JOHNSTON, H., George Grenfell and the Congo, vol. I. London, 1908, p. 148.

2.

Cf. supra.

1.

Lettre signée, pour le Commissaire de District absent, par l’Adjoint Supérieur, f.f., le 10 juillet 1917.

2.

Lettre de l’administrateur territorial de Basongo, Basongo, le 29/7/1918 (manuscrit)

3.

LODE ACTTEN cité par Van BULCK, « Les Badzing dans nos sources de littérature ethnographique » dans Congo, II (1934), p. 326.